jeudi 31 mars 2011

Le 16ème commentaire (et le 17ème) : Jacques Fusina n'est pas d'accord

Merci infiniment à Jacques Fusina pour nous permettre de publier sur ce blog la version française de sa chronique initialement publiée en langue corse dans "La Corse Votre Hebdo", chronique qui revient sur la soirée du 22 février à la Librairie Le Point de Rencontre. Y fut proposée, vous vous en souvenez, par Hélène Mamberti et la librairie, un débat à propos de la critique (littéraire, cinématographique, théâtrale...), notamment en Corse.

J'ai placé la chronique de Jacques Fusina à la suite des commentaires qui prolongent le billet "VERS LA FIN DE LA GREVE ?", puisqu'il répond explicitement à ma "demande" de voir les chroniqueurs littéraires insulaires proposer leur choix des dix meilleurs livres des trente dernières années. Je ne révèle pas ici la réponse de l'auteur ! Suspense...

Il faut cliquer ici et descendre jusqu'au 16ème commentaire.

(AJOUT DU 1er AVRIL 2011, non ce n'est pas un poisson... : toujours avec l'accord avec l'auteur, j'ajoute en 17ème commentaire, le message de Jacques Fusina qui accompagnait sa chronique, et qui explicite sa position concernant l'appel à dresser la liste des 10 meilleurs livres corses de ces dernières années ; merci encore à lui !)

La discussion se poursuit. C'est bon.

lundi 28 mars 2011

A quand un ouvrage d'histoire littéraire corse sur le mode de "Lettres créoles" ?


Il y a bien longtemps que je désire que les critiques littéraires corses, que les grands lecteurs capables de lire tous les textes littéraires corses dans toutes leurs expressions linguistiques (latin, italien, corse, français... et autres ?), que les chercheurs, universitaires ou non, qui exhument les manuscrits oubliés et les publications confidentielles, et qui produisent des analyses et des éditions critiques, que les écrivains insulaires amoureux de ce que l'île a pu produire de magnifique dans tous les genres possibles, bref que tout ce beau monde produise enfin la première "Histoire de la littérature corse".

"Ecrire en corse", de Jacques Fusina est la première pierre de ce travail. Cet ouvrage traverse les siècles, évoque la multiplicité des genres, propose quelques avis personnels ; il est extrêmement précieux, et nous le relisons comme un bréviaire. Mais il ne concerne que la littérature d'expression corse.

Alors, en attendant, je propose ici une vision enthousiasmante et originale qui pourrait nous faire réfléchir à ce que serait cette "Histoire de la littérature corse". Il s'agit de l'"Avant-dire" de "Lettres créoles", ouvrage sous-titré "Tracées antillaises et continentales de la littérature. Haïti, Guadeloupe, Martinique, Guyane. 1635-1975", paru chez Gallimard en 1999 (collection Folio, 291 pages). Le livre a été écrit par deux auteurs martiniquais majeurs, Patrick Chamoiseau et Raphaël Confiant (qui ont déjà manifesté dans le passé un regard sur la Corse). Je souligne (en caractères gras) les phrases qui me paraissent les plus importantes.

Mi pare magnificu issu testu di Confiant è Chamoiseau, pienu d'energia ; i so sguardi nant'à a literatura creola accoglienu tutte e spressione literarie (ancu quelle "mimetiche" di e lettere francese) ma ci danu ancu unu filu precisu è ghjuvevule da capisce ciò chì ind'è issa literatura li parenu l'opere è più belle ed e più fertile...

Chì ne pinsate ? A vous la parole : quelle "Histoire de la littérature corse" désirez-vous ?


Donne congé ici aux docteurs de la loi. Laisse aller, qui aborde littérature avec seringue ou bien scalpel. Décommande ces pensées vivisectrices qui médusent les chairs pour deviner une âme. Mieux vaut s'y promener par-derrière ou passer légèrement. Porte sobriété. Développe ta tendresse. Nomme en toi ces rumeurs des vieilles bibliothèques quand, de leurs livres sans âge, s'éveille soudaine une vie insue des biologistes, germée d'une poussière d'encre, de phrases inachevées, d'idées offertes comme hosties aux insectes, de briques manuscrites qui se souviennent d'inondations, de bibles cassantes comme de vieux os, avec l'odeur sédimentaire du papier qui s'émeut d'un souvenir d'incendie. C'est d'abord ça littérature.

Et cette rumeur, au chercheur bardé de décrets universitaires et du souci d'emprisonner, dit que jamais littérature ne meurt, jamais ne se fige, et jamais ne ressemble à ce que l'on dit d'elle. C'est un faste de crépuscule qui libère le regard plutôt que de le soumettre. Chaque pupille, ici, dispose d'un horizon à nul autre pareil. D'ailleurs, ici, nulle contrainte sinon celle bonne du coeur, de l'esprit sensible, de l'imaginaire exigeant. Chaque phrase est un écho de falaise. Chaque livre est un homme. Chaque mot tremble du fourmillement des siècles d'écriture. Et le tout témoigne de l'inépuisable quête d'un idéal changeant. Des fixateurs zélés décline l'autorité.

Littérature est mêlée à l'oxygène des vies. Elle a connu les pays, les peuples, les hommes. Elle résonne dans des cathédrales et des temples de fougères. Elle est avertie de la terre cuite, du papier, de la pierre, de la feuille, de l'écorce, de la parole. Elle sait les sentiments, connaît les émotions, s'articule dans les langues de la tour de Babel et se love dans chacune des conceptions du monde. Et, à chaque fois différente, particulière, totale, en des manières chacune opaque à l'autre, et pourtant une et souveraine.

Alors ? Quoi saisir qui ne soit pas tout pauvre, partiel, infime. De ta tête, de ton pays, de ton histoire ou de ta langue, tu ne disposes que d'un frémissement de ce vaste hosanna. De littérature tu ne peux rien révéler, sinon que témoigner d'une seule aventure que tu devras ponctuer de vomitoires sur l'infinie rumeur.

Ici, aux Antilles, littérature s'est posée en îles dites françaises avec des vols d'oiseaux. Nous l'avons vue s'éprendre, curieuse de cette précipitation coloniale où dans l'horreur, le déni, la souffrance, l'aventure, mille peuples se sont trouvés. Toutes les races. Tous les hommes. toutes les langues, toutes les conceptions du monde. Le divers enclos sur l'indicible mélange qui lui-même diffracte l'ensemble de l'univers. Ici, elle a connu ensemble l'écrit et la parole, le cri et la voix, les rumeurs silencieuses et les déclamations hautes, la racine et l'envol, l'ordre neuf de l'innommé informe. Alors, comprend bien : elle n'a pas une Histoire comme dans les vieilles aventures, elle s'émeut en histoires et mieux, elle sillonne en tracées.

Oh, les docteurs ont sévi, ils l'ont nommée littérature négro-africaine, littérature des îles, littérature noire d'expression française, littérature afro-antillaise... Ils ont isolé sa trajectoire écrite de ses autres sillonnements. Ils ont privilégié une de ses langues au détriment de l'autre. Parmi les races et les cultures, ils n'en ont retenu qu'une selon les airs du temps. Ils y ont vu l'Europe, en d'autres heures l'Afrique, négligeant tout le reste. Ils l'ont vue blanche, puis noire, oubliant les gammes ouvertes de sa palette. Ils ont été embarrassés quand l'écrivain n'était pas né sur place et témoignait pourtant de cette condition. Ils ont été surpris quand, né sur place, l'écrivain n'exprimait qu'un ailleurs de lui-même. Ils ont...

Aujourd'hui encore, ils persistent et mutilent les pompes de ce chaos.
Marronne-les.

Appelle-la simplement littérature créole. Cela témoigne que, née ici, aux Amériques, elle a connu la créolisation qui, dans le creuset des îles ouvertes, a mélangé tout le Divers monde. Aborde-la en français et en créole : deux langues mais une même trajectoire. Et puis descends au coeur des hommes, touche la chaleur des chairs, le palpitant d'une vie, le plaisir dans chaque texte. Ici pour la littérature, l'aventure est nouvelle. Alors plutôt que brève, place l'incise autrement...


(AJOUT DE 20:57... Il s'agit de la conclusion du livre, la "Finale de compte")

1635-1975
Trois cente quarante années d'écrits divers relus au pas de charge, au gré de notre plaisir. Un regard délicieusement injuste, partiel (sinon partial) par endroits, mais toujours sensitif. Il faudrait maintenant tout reprendre : donner le livre des silences, encrer celui du cri, vivre avec le conteur mille pages de ses paroles, relire Césaire avec des yeux d'ici et bâtir le livre de Glissant sur une trame d'herbes folles et de vieux arbres-mémoire. Puis clouer le livre de l'habitation. Puis cimenter le livre de la ville. Puis tout reprendre encore pour une cartographie des facettes d'où les tracées des lettres créoles s'élancent, infiniment plus riches en ramifications que nos deux-trois passages légèrement empruntés.

En fait, le tout s'emmêle dans un cirque de sous-bois naturel. La tracée de la Négritude s'entortille à celle des doudouistes sans que nul ne distingue du point de départ de l'une et de la fin vraie de l'autre. Combien de silences ont précédé (puis habité) le silence caraïbe et les autres silences ? Et combien de Césaire ont précédé Césaire ? Et combien de conteurs ne se sont jamais tus... ? Aujourd'hui encore, en pleine année de grâce 1991, où le mouvement vers la Créolité mobilise l'énergie, se publient maints recueils poétiques inspirés du Cahier, où des nouvelles à couleur doudouiste, ou encore des choses aériennes, transparentes à force d'Universel. La prédominance de telle ou telle tracée littéraire, à tel ou tel moment de notre histoire, témoigne des turbulences politico-sociales qui agitent nos différents pays. La littérature créole, plus que toute autre, est engagée. Elle exprime des urgences : conflits ethniques, frustrations de classe, antagonismes religieux, douleur des langages, troubles intérieurs, appels du monde, désirs de fuite hors de l'habitation qui nous conditionne encore malgré la dislocation de ce système au cours des années 60.

Après 1975, on assiste à une explosion de talents qui balisent l'aire d'évolution, le territoire si l'on préfère, de l'écriture créole. Glissant verra se mettre en place ses paysages prophétisés. Schwarz-Bart et Frankétienne vont confirmer leur puissance créatrice. Dans le roman, Tony Delsham abord un public oublié. En poésie, Monchoachi, Joy Bernabé, Georges Castéra fils, Ernest Mirville, Aline Chanol, Jean Mapou, Ernest Pépin, Joël Beuze et Roger Parsemain vont prouver qu'on peut reprendre flamme sous l'étouffoir du génie césairien. La littérature créolophone s'affirmera encore grâce à Roger Valy, Maurice Orel, Serge Restog, Térèz Léotin, Marcel Lebielle, Jeanine Lafontaine, Téogène Alyénus et Max Rippon. Le conflit linguistique triséculaire entre français et créole semble trouver une amorce de résolution voulue problématique. L'attention sur le réel antillo-guyanais, la quête identitaire créole se sont désormais inscrites dans la complexité.
Maintenant, nous nous savons Créoles.
Ni Français, ni Européens, ni Africains, ni Asiatiques, ni Levantins, mais un mélange mouvant, toujours mouvant, dont le point de départ est un abîme et dont l'évolution demeure imprévisible. De par le monde, ce processus que nous vivons depuis plus de trois siècles se répand, s'accélère : peuples, langues, histoires, cultures, nations se touchent et se traversent par une infinité de réseaux que les drapeaux ignorent. La littérature voit converger ses diversités folles. Le monde se met à résonner de sa totalité dans chacun de ses lieux particuliers. Il nous faut désormais tenter de l'appréhender, loin du risque appauvrissant de l'Universalité, dans la richesse éclatée, mais harmonieuse, d'une Diversalité.

Et c'est bien grâce à la littérature que nous pourrons, par explorations concentriques, espérer trouver la trace qui mène, en haut du morne, au fond de la ravine, en bordage des villes, à la Créolité,

Créolité ouverte au mitan de nous-mêmes
comme une croisée d'essor,
pour mille tracées nouvelles
couvrant la Terre vécue
parmi d'autres errances...


(l'image)

samedi 26 mars 2011

Un compte rendu ailleurs qu'ici : "Poussière d'août"

Hier soir, l'Amicale corse d'Aix et l'association Corsica Calling proposaient de regarder le documentaire d'André Mariaggi, "Poussière d'août". Belle soirée en présence des "personnages" du film. Et un essai de compte rendu partiel et subjectif par moi-même sur le blog Corsica Calling.

Il y est question d'intime, d'imprévu, de liberté et de courage... et il aurait même pu être question d'Apocalypse now !

Bonne lecture, une discussion est toujours possible.

mercredi 23 mars 2011

Mise au point plus un extrait de "Ombre di guerra" (JYA)


Bon, je discute, avec les uns, les autres, ici, là, au téléphone, par mail, autour d'une table, d'un verre, gentiment ou moins gentiment... bref, je discute. Qu'en ressort-il ?

La nécessité d'une mise au point :

1. ce blog accueille toutes les prises de parole autour des oeuvres corses. Par exemple, si vous aimez la littérature politique, la littérature gastronomique, la littérature scientifique, etc... eh bien, vous pouvez en parler ici ! Par "littérature", j'entends toute oeuvre de l'esprit utilisant une langue pour s'exprimer. Et par "oeuvre", tout travail destiné à rencontrer nos sens et notre réflexion. Ne nous limitons pas à une vision étroite de la littérature (symbolisée par la fiction, et plus encore par le roman), comme j'ai pu le laisser penser ici. Nous avons justement le désir d'accueillir des formes et des propos inouïs. Avis aux créateurs et à ceux qui aiment leurs créations !

2. ce blog ne se veut pas l'unique temple où l'on révère et révèle la seule bonne littérature corse... Il y a bien des façons de faire, bien d'autres lieux, bien d'autres moyens de s'exprimer sur ce sujet. Ce que je pense et ressent ne se veut pas une norme ou une prescription comminatoire. Et ma fréquentation d'une oeuvre s'est toujours trouvée enrichie par la discussion avec des personnes qui ont des avis différents. Donc, aucune prétention de ma part à vouloir régenter quoi que ce soit. Il est hors de question pour moi de dire définitivement et sans contestation ce qui est bon et ce qui ne l'est pas.

3. cependant, ce blog réclame la possibilité d'exprimer des goûts, des analyses, des jugements et des avis (à propos des oeuvres corses) de la façon la plus libre qui soit. Et professe qu'il est agréable et nécessaire de discuter de ces goûts, analyses, jugements et avis.

Maintenant que cela est dit, passons à la réalité des oeuvres.

Voici, dans ce billet, une modalité d'accès à une oeuvre littéraire corse qui est quelque peu originale. Je n'ai pas encore acheté "Ombre di guerra" de Jean-Yves Acquaviva (éditions Albiana, 2011). J'en ai très envie (puisque j'ai déjà lu les créations de cet auteur sur "Tarrori è fantasia" et qu'après l'avoir rencontré, j'ai plus encore envie de lire ce qu'il a dans la tête). Peut-être serai-je déçu ? (Aïe, aïe... voici un cas d'école : comment se dire entre personnes qui s'apprécient que l'oeuvre de l'autre ne lui paraît pas bonne, voire franchement ratée (jugement tout subjectif et discutable, bien sûr) ? Et surtout comment le dire publiquement, sur le champ littéraire, sans que cela n'apparaisse comme un duel à mort ? Répondre à ces deux questions me paraît fondamental si nous désirons vraiment une scène littéraire corse vivante, non ?)

Où en étais-je ? Ah oui, je n'ai pas encore acheté le roman de JYA. Que fais-je ? Eh bien je lui demande d'envoyer un extrait à publier sur ce blog ! Et il le fait ! Et je l'en remercie vivement !

Et je lis : les premiers paragraphes me font peur (encore une histoire d'enfance avec des galopins traînant leur ennui ?), puis je trouve que l'anecdote racontée m'amène ailleurs, vers un inattendu paradis (il suffisait d'aller, après un détour, dans la maison d'à côté), un paradis qui crée sa propre temporalité, qui vous bouscule dans tous vos désirs, à ne plus savoir ce que l'on désire vraiment. Cela m'a fait penser à la nouvelle "A lenza di u maestru" de Leonu Alessandri (voir ici). Et aussi à des textes comme ceux de Marcu Biancarelli ("U portafogliu" in "Stremu meridianu") ou Rinatu Coti ("La mère et l'enfant").

Le moment que j'ai préféré ? L'étrange sourire de celui qui mange tranquillement ses pêches (e parsiche) face aux enfants échappés contemplant rire aux lèvres le beau poisson qui s'agite au bout de la ligne... Encore une scène de pêche (ici dans tous les sens du terme ! : voir celles dans "Murtoriu" et dans la nouvelle "Piscadori" dans "Prighjuneri", oeuvres de Marcu Biancarelli) qui vient enrichir la thèse sur laquelle je travaille en ce moment : "De la pêche et de la diversité de ses traitements comme critère infaillible de bonne santé d'une littérature"...

Au bout du compte, j'ai lu avec plaisir cet extrait de roman, il faut maintenant s'atteler au reste du livre, je sais. Car la fin m'a tout de même un peu déçu : je pensais qu'ils finiraient tous par partager une cigarette, avant de replonger dans le silence et de retrouver le rythme normal des journées...

Bonne lecture, n'hésitez pas à laisser vos avis :

XI

E PARSICHE È E SIGARETTE

Sicondu ùn vidia in u so amicu c’à un giuvanottu cum’è ellu. N’avianu fattu talmente inseme. È, avà in ‘ssu mumentu cusì intintu di tristezza è di malincunia li vinia à mente ogni ricordu cumunu. U primu era quellu di ‘ssu ghjornu d’estate quandu s’eranu fatti piglià fumendu, da Zia Catalina una vichjetta di u paese.

Tandu, cù u so amicacciu si ricuglianu i mocculi in pianu è si piattavanu per fumà li. Quellu ghjornu di lugliu Sicondu avia arrubbatu, in u pacchettu di u so ziu Pasquinu, una sigaretta sana. A si passavanu, l’anasavanu cum’è s’ellu era qualchi dulciume ch’elli avianu da magnà cù tamanta ingurdizia. È Gino l’avia accesa, tiratu addossu è data à Sicondu chì n’avia fattu u tantu. È tocca è fila, cusì, sin’à brusgià si e dite. Stavanu à l’appumessa, daretu à un scogliu è eranu talmente chjappi c’ùn avianu micca intesu à Zia Catalina chì s’avvicinava. Era cullata à piglià un pocu d’acqua à a surgente è avà era custì di punta à elli è i vardava cù un sguardu chì avaria santavugliatu i più curagiosi. Zia Catalina ùn sapia mancu chì dì, è di tutta manera ùn avaria avutu tempu à ùn dì nulla. I dui zitellacci eranu scappati di corsa sarrata è si ne falavanu versi u paese senza tuccà tarra.
Ghjugnendu vicinu à a casa s’eranu piattati, si dumandavanu cumu fà per sorte si di ‘ss’imbrogliu. À ‘ssu mumentu passava Ziu Francescu, u vicinu, cù una piscaghjola in manu.
« O zì, duve avviate » ?
- Vogu à fà mi una piscata, vulete vene ? »

Sicondu è Gino, senza mancu pinsà chì i soii s’avianu da impinserisce, avianu dettu di sì è eranu partuti appressu à Francescu.
Mentre chì l’omu piscava, i dui amichi stavanu, daretu à ellu, in cucculipì, senza fà rimore è pinsavanu à ciò chì l’aspittava quandu elli avianu da vultà in casa. Di sicuru Catalina avia digià contu tuttu à e so mamme… Ma un antru affare li strignia u corpu, una cosa ancu più forte c’à u pinseru di fà si liticà. Quandu elli si n’eranu andati cù Ziu Francescu eranu quasi miziornu, è avà eranu trè ore ch’elli viaghjavanu indu u fiume. Iè, tutt’à dui avianu a fame, una fame di i cani. U latte è u pane di a mane ùn eranu più c’à un vechju ricordu in fondu à i so stomachi. Ogni tantu ciuttavanu u so capu indu l’acqua per addibbulisce u calore chì li facia bolle u ciarbellu quasi à svene si.
Ùn pudianu dì nulla à Francescu è, di tutta manera quellu, ùn avia nulla à dà li à magnà è ùn saria statu sicuramente micca cuntentu di sente chì i zitelli eranu partuti senza avisà à nimu.
Stavanu muti è pinsavanu chì era forse quessa a paga di a so malfatta.

« Ô zitè quì ci n’hè una grossa, quale hè chì a vole caccià ? »

A voce di Francescu l’avia tolti di e so pinsate è stavanu, mezu imbafati, senza risponde.

« Aiò, unu a vole caccià o nò… ? »
- « Iè, iè date quì ».

Avà Sicondu tinia a piscaghjola cù tutta a forza ch’ellu pudia aduprà è tirava. A pescia era in aria, sbattulava in tutti i sensi è i zitelli a vardavanu ridendu.

« Vardate què, tamanta ch’ella … »

S’era piantatu di parlà, di l’altra parte di u pozzu ci era Pasquinu, u fratellu di Maria, chì stava à fighjà li cù un surisu stranu in bocca. Nu a so manu manca, u ziu di Sicondu tinia trè parsiche. Trè frutti magnifichi, rossi è gialli, impiuti di u sole chì l’avia fatti maturà. Videndu li, i zitelli sintianu u so corpu strigne si ancu di più. L’omu s’era messu à pusà nant’à un scogliu è pianu, pianu si ne sbuchjava una. Sicondu avia spostu a piscaghjola è u vardava fà dumandendu si s’è u so ziu sapia ch’ellu ùn era micca ghjuntu in casa à miziornu. Forse ùn avia micca trovu à Catalina, forse era vinutu à sin’à quì per fà si dui passi, forse… Avà Pasquinu tagliava a parsica à fette fine è à fur di misura e si magnava. Ùn vulianu dumandà nulla à l’omu ma soca i so ochji avianu parlatu per elli.

-« E vulete quesse ? »

Avia dettu Pasquinu cù a so manu tesa versi i dui zitelli. Eranu à pena menu inchieti, ma ùn si vulianu micca avvicinà troppu.

-« Iè… lampa le »

Mentre chì i criaturi mursicavanu indu i frutti cum’è s’elli ùn avianu nè magnatu nè betu dapoi trè ghjorni, Pasquinu s’era avvicinatu è a si discurria cù Francescu. Sicondu era assirinatu, di sicuru u so ziu ùn sapia nulla o qualchisia l’avia sicuramente vistu andà si ne cù Ziu Francescu è nimu ùn si saria imprimuratu di a so assenza nè di quella di Gino. A sera à cena, Sicondu è Gino avianu magnatu, cum’è à spessu, cù Pasquinu è a so moglia Saveria. Ùn avianu figlioli è i zitelli si sintianu ind’è elli cum’è in casa soia, forse ancu megliu c’à in casa soia. È si n’eranu sciaccatu quantu elli ne pudianu tene è po, sazii ch’elli eranu ùn pinsavanu mancu più à a so scappata di a mane. Fattu cena, cum’é sempre, Pasquinu s’era accesu una sigaretta. Saveria, videndu lu fà, avia dettu :
- « Dà li ne una ancu à elli… »

I dui amichi eranu piantati di rispirà, avianu calatu l’ochji è aspittavanu. Ma, cum’è elli ùn sintianu nulla avianu pisatu u capu versi Pasquinu è eranu turnatu à vede à nant’à a so faccia ‘ssu surisu stranu ch’elli avianu scupartu nanzu indu u fiume. Eranu stati zitti è ùn s’era mai più parlatu di ciò ch’era stalvatu quellu ghjornu.



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mardi 22 mars 2011

Infos

"Rapido le zoo..." (c'est Clint Eastwood qui parle, mais dans quel film ?)

- Je viens de mettre en ligne le compte rendu de la soirée poétique co-organisée par l'Amicale corse d'Aix et l'association Corsica Calling, avec Angèle Paoli, Yves Thomas et Guidu Antonietti : voir ici.

- une réaction de Xavier Casanova au billet proposant à chacun de donner sa liste des 10 livres corses "importants" de ces dernières décennies : voir ici.

dimanche 20 mars 2011

"Langue corse et noms de lieux", (Jean Chiorboli), lu par Madame Kessler


Reçu hier en mains propres (alors que dans les locaux de l'Amicale corse d'Aix, la soirée poétique et numérique printanière avec Angèle Paoli, Yves Thomas et Guidu Antonietti touchait à sa fin - j'y reviendrai dans un compte rendu que je publierai sur le blog 'Corsica Calling), reçu donc hier en mains propres par Madame Kessler elle-même ces quelques mots précieux.

Ils évoquent un ouvrage de Jean Chiorboli, linguiste bien connu, professeur à l'Université de Corse (signalons la publication récente d'un "Langue corse pour les nuls") à propos de la toponymie insulaire. (On peut consulter quelques pages sur l'onomastique adressées à ses étudiants, sur le site du CCU, Interromania, pages intitulées "Glanures/Spicculere".)

L'ouvrage, "Langue corse et noms de lieux", a été publié chez Albiana, en 2008.

Voici donc la transcription des mots de Madame Kessler (merci infiniment !!) :

Ce livre est un "guide pour l'interprétation correcte des noms de lieux".
- O Signori, chì bellu libru, ma cusì difficiule, chì ci spiega i nomi di i lochi corsi ; spiega da induve sti nomi sò vinuti : u latinu, u talianu... ; spmiega come elli si scrivenu, come elli si sùo trasfurmati à l'usu di i parlati diffarenti !!
Eiu, aghju po straziatu !!! Ma aghju truvatu, pagina 52, da chì fà sdrughje u me core !!! U nome di a furesta d'Aïtone : a me minnana hè nata in Aïtone, è mi parlava sempre di "sapins" è micca di "pins" !
Chiorboli dice che stu nome veni di u latinu "Abete (sapin) Abetone" chì hè duvintatu Aïtone. Aghju, in casa, un libru di 1870 è si vede una stampa di a furesta d'Aïtone chì era una furesta di "sapins" è micca di "pins".


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mardi 15 mars 2011

VERS LA FIN DEFINITIVE DE LA GREVE ?... OUI !


Oui,

les deux précédents billets ("Paulu Miniconi canta "Furtuna fù falsa" et "FOLIE") auguraient déjà de la fin de cette très fameuse grève qui agite la vie littéraire mondiale-corse, si si, ne dites pas le contraire. (Vous ne voyez vraiment pas de quoi je veux parler ? Alors, voyez ici :
- ici
- ainsi que mon entretien avec Norbert Paganelli, sur Invistita (il faut descendre l'écran)
Le 23 février à 11 h 57, j'ajoutai une condition à la fin de cette grève : "je ne briserai cette grève que lorsque les collaborateurs littéraires de Corse-Matin/Corse Votre Hebdo et de Corsica organiseront d'une façon ou d'une autre un débat où chacun désignera les 10 meilleurs livres corses (quelle que soit la langue d'écriture et quel que soit l'éditeur) des vingt dernières années (depuis la publication de "A Funtana d'Altea") !!! L'appel est lancé à la face du monde !!!" Cette demande, je l'avais faite aux très honorables messieurs Fusina Jacques, Biancarelli Marcu, Vinciguerra Marie-Jean présents lors du débat sur la critique à la Librairie Le Point de Rencontre, le 22 février au soir.

Et que vient-il de se passer ce soir, mardi 15 mars 2011 ? Que vient-il de se passer ? Hein ?

Marcu Biancarelli publie sa liste, commentée, sur son blog (après, ou avant, publication du texte dans La Corse/Votre Hebdo ? je ne sais pas... le savez-vous ?) : cliquez ici pour les découvrir !

La liste en accéléré :
- Pascal Marchetti, "Une mémoire pour la Corse"
- Ghjacumu Thiers, "A Funtana d'Altea"
- Ghjacumu Fusina, "E Sette Chjappelle"
- Jacky Biancarelli, "A Tempara 'lli ghjorna"
- Flavia Accorsi, "Ecce Leo"
- Jérôme Ferrari, "Dans le secret"
- Paulu Desanti, "L'ultimi mumenta d'Alzheimer"
- Marceddu Jureczek, "Caotidianu"
- Pierre-Joseph Ferrali, "Davanti à u focu chì more"
et pour la dixième référence, le choix entre :
- Paul-Michel Villa, "La Maison des Viale"
- Nicolas Giudici, "Le crépuscule des Corses"
- Marie Ferranti, "Les femmes de San Stefano"

Ed avà, aghju da risponde à Marcu Biancarelli : a greva hè finita ! Yeeeeepeeeeeee !....

Mais... il faut maintenant que Ghjacumu Fusina et Marie-Jean Vinciguerra nous donnent leur propre liste ! (Et que bien d'autres - vous-même ? - le fassent aussi !) Ce serait génial !

Avec la liste énoncée par Okuba Kentaro le 21 novembre 2010, nous nous approchons des conditions favorables à une discussion des uns avec les autres.

Pour mémoire, la liste d'Okuba Kentaro (qui certes ne répondait pas exactement à la même demande) :
La terre des Seigneurs, Gabriel Xavier Cullioli, DCL
Le berger des morts, Jean-Claude Rogliano, Belfond

Mazzeri, Finzioni e signadonna, Dorothy Carrington, Piazzola

Le crépuscule des Corses, Nicolas Giudici, Grasset

Ecrire en corse, Jacques Fusina, Klincksieck

Codex Corsicae, Xavier Casanova, Albiana

Nimu, Jean-Pierre Santini, Albiana

Le sentier lumineux, Andria Costa, Albiana

La veuve de l'écrivain, Marie-Jean Vinciguerra, DCL

Malmaison, Paul Milleliri, Albiana

Pace è salute, Paul Milleliri, Albiana

Les saints et les morts, Jean-Louis Tourné, Albiana

Une affaire insulaire, Jean-Baptiste Predali, Actes sud
Cosu nostru, jean-Pierre Arrio, Albiana

Pulitichella, Petr'anto Scolca, Albiana
La madonna di Polsi, Jean-Pierre Orsi, Ancre latine

Les rochers rouges, Arcange Morelli, Albiana

La maison des Viale, Paul-Michel Villa, Piazzola

Rebelles, André Mastor, Albiana

Vir nemoris, Giuseppe Ottaviano Nobili-Savelli, Albiana

Tamo-samo, Jean-Paul Ceccaldi, journal de la Corse

ce n'est qu'un début, etc.

FOLIE


Lu ceci hier (ou avant-hier ?), suis resté estomaqué par la folie des propos.

La traduction proposée (car le texte a été écrit en grec) me semble rendre à ces paroles célèbres toute leur inconcevable folie, les montrer pour ce qu'elles voulaient être : proprement scandaleuses.

Celui qui dit cela est proprement à enfermer, non ?

C'est sous la recommandation d'un poète corse que je lus ce texte (et que je commandai fissa à la librairie Goulard), dans cette traduction spécifique (celle de Bernard Pautrat) qui selon lui use de tournures parfois proches du corse, traduction qui violente les usages habituels de la syntaxe et du vocabulaire français.

Et c'est donc comme un exemple de littérature corse du futur que je continue à le lire.

Folie pour folie.

Voilà ce que j'aime lire dans la littérature corse, l'inconcevable, le fou, l'inouï, la beauté inédite.

Cet extrait pour donner à entendre la chose (vous reconnaîtrez, sûrement ; respirez à fond et accrochez-vous aux branches, c'est sublime - non ?) :

J'ai manifesté ton nom aux hommes que tu m'as donnés du sein du monde. Ils étaient à toi et tu me les as donnés et ils ont observé ta parole. Maintenant ils ont reconnu que tout ce que tu m'as donné vient de toi ; que les dits que tu m'as donnés je les leur ai donnés, et ils les ont reçus et ils ont reconnu vraiment que je venais d'auprès de toi ; et que tu m'avais envoyé, ils l'ont cru. Moi, c'est pour eux que je prie, ce n'est pas pour le monde que je prie mais pour ceux que tu m'as donnés, parce qu'ils sont à toi, et tout ce qui est à moi est à toi et ce qui est à toi à moi, et je suis glorifié en eux. Et je ne suis plus dans le monde, et eux sont dans le monde, et moi je viens à toi. Père saint, garde-les en ton nom que tu m'as donné, pour qu'ils soient tout un comme nous. Quand j'étais avec eux je les gardais en ton nom que tu m'as donné, et j'ai veillé, et aucun d'entre eux ne s'est perdu sinon le fils de la perdition, pour que s'accomplît l'écriture. Et maintenant je viens vers toi, et ces choses je les dis dans le monde pour qu'ils aient la joie, la mienne, complétée en eux. Je leur ai donné ta parole et le monde les a haïs, parce qu'ils ne sont pas du monde de même que moi je ne suis pas du monde. Je ne te prie pas de les ôter du monde, mais de les garder du mauvais. Ils ne sont pas du monde de même que moi je ne suis pas du monde. Sanctifie-les dans la vérité ; ta parole est vérité. De même que tu m'as envoyé au monde, je les ai moi aussi envoyés au monde ; et c'est pour eux que je me sanctifie moi-même, pour qu'ils soient eux aussi sanctifiés en vérité.
Et ce n'est pas seulement sur eux que je prie, c'est aussi sur ceux qui croiront en moi à cause de leur parole, pour qu'ils soient tous tout un, comme toi, père, en moi et moi en toi, pour qu'eux aussi soient en nous, pour que le monde croie que tu m'as envoyé. Et moi, la gloire que tu m'as donnée je la leur ai donnée, pour qu'ils soient tout un comme nous tout un ; moi en eux et toi en moi, pour qu'ils soient accomplis en un, pour que le monde reconnaisse que c'est toi qui m'as envoyé et que tu les as aimés comme tu m'as aimé. Père, cela que tu m'as donné, je veux qu'ils soient eux aussi où je suis, avec moi, qu'ils voient la gloire, la mienne, que tu m'as donnée parce que tu m'as aimé avant la fondation du monde. Père juste, le monde ne t'a pas reconnu mais moi je t'ai connu, et eux ont reconnu que tu m'as envoyé ; et je leur ai fait connaître ton nom et je le leur ferai reconnaître, pour que l'amour dont tu m'as aimé soit en eux et moi aussi en eux.


(l'image)

lundi 14 mars 2011

Paulu Miniconi canta "Furtuna fù falsa"


Tranche de vie d'un lecteur/auditeur/spectateur d'oeuvres corses au XXIème siècle...

(C'est bien de cela qu'il s'agit sur ce blog depuis le début... Tiens, c'est la fin de la grève ? Je vous entends déjà : il dit n'importe quoi, il nous ennuie avec ses humeurs, ses emportements et ses revirements ! Mais vous n'avez encore rien vu ! Si vous saviez !! Oui, il fallait s'y attendre, de nouvelles prises de parole de ma part viendront, à leur rythme, comme cela viendra, sans réflexion poussée, sans légitimité aucune, hirsutes, idiotes, bienveillantes et radicales ; ce blog continuera d'accueillir avec un immense plaisir et beaucoup de gratitude vos prises de parole, dans leur plus grande diversité, à propos de toutes les oeuvres artistiques corses dont vous voudrez parler... le seul critère étant d'accepter d'être discuté : les dernières semaines et les dernières discussions que j'ai eues ont fini de me convaincre que la vie littéraire et artistique corse mourra de ne pas être discutée, réellement discutée ; pardonnez ce ton apocalyptique mais il faut bien accepter les conséquences des tremblements mouillés des atomes nippons... ; ah, et puis, vous avez raison, je confonds ma propre finitude avec celle de l'objet qui nous intéresse ici (car moi aussi, en vérité, je mourrai un jour, si si, et je vous quitterai, mais ne soyez pas triste, car vous accéderez, si vous croyez, à la droite de la Littérature corse) ! Allora, strada dritta è core in fronte !

Où en étais-je ?

Bastia, Librairie Le Point de Rencontre, fin de soirée après le débat (sur "la critique") et les petits fours, je récupère, laissé là pour moi (merci infiniment), le disque de Paul Miniconi, "Elisiri di vita" (ce disque est introuvable : oh l'inaccessibilité des oeuvres corses !).

Lucciana, le lendemain. J'écoute le disque. Les trente premières secondes de chaque morceau. Pas la patience (pas tout de suite) de laisser défiler le disque en entier (plus tard oui). Dix chansons : "Lamentu di l'essari soli", "Acquisognu", "Elisiri", "Sò mossu", "L'ultimu viaghju", "Futurna fù falsa", "Ossessioni", "U scambiu", "Rè di fiore", "O fratè".

Je me disais, feuilletant le livret : voyons, ils sont tous là, ceux des Cantelli - Petru Gambini, F. Antonpietri, P. Cesari - et aussi un texte de Marcu Biancarelli... ce sera une variation sur "Cunniscenza di u corpu umanu" (le deuxième album des Cantelli) ?

J'écoute, oui certaines chansons dans le style de l'ancien groupe. Ils font tous de la musique en solo maintenant (il faut que j'écoute les disques d'Antonpietri et de Cesari, enfin, il faut que je les cherche d'abord).

A la première écoute, je trouve la voix belle mais parfois mal assurée, cela me gêne. Le son n'est pas très chaud, très rond. Je fais effort. Et je m'arrête sur trois chansons (car les autres ne m'accrochent pas vraiment, à part peut-être "U rè di fiore"), mes préférées, celles que j'écoute en boucle : ""Sò mossu" (drôle et noire vision d'une vie vide, entre village désert et milieu culturel oppressant, emplie d'une violence vaine et autodestructrice), "L'ultimu viaghju" (le texte de M. Biancarelli qui fait parler un personnage en perdition de Dostoïevski, Stepan Trofimovitch, des fameux "Démons" - le grand livre russe de la littérature corse...) et surtout, surtout,

"Furtuna fù falsa"... (c'est fou les trois chansons sont les unes à côté des autres ; il faut que je vérifie si je n'aime pas systématiquement les chansons 4, 5 et 6 de tous les albums que je connais, moi...)

J'adore cette chanson triste. La voix, à la fin du deuxième vers me fait penser à celle de Dominique A. Bon évidemment il faudrait que vous l'écoutiez, cela ressemble à un lamentu contemporain, un lamentu froid, terriblement égoïste. J'adore l'arrêt de la voix et de la musique après les vers esseulés "Li to bracci ingiru à lu me coddu" et "Dicendu isiè ùn t'inchietà". J'aime énormément la guitare sèche, seule à accompagner la voix, et ses doux arpèges (encore que, à la réécoute - mais en ce moment je ne peux pas mettre la musique trop trop fort, bébé dort - il me semble qu'il doit y avoir une autre guitare, discrète, électrique avec un jeu de bottleneck, non ?). Et aussi la voix chevrotante, je l'aime (et pourtant je connais quelqu'un qui ne la supporte pas ! Mais bon, il faut dire aussi que j'aime beaucoup Véronique Sanson, on ne se refait pas). Et enfin le premier couplet m'a fait penser à une chanson de Philippe Léotard (je vous laisse trouver laquelle) qui dit :

"On pense à oublier sa veste
On oublie de penser au reste"

"Furtuna fù falsa", c'est une chanson d'amour raté, refusé, tranquillement refusé (la présence métaphorique du cheval vous parlera peut-être plus qu'à moi ; je me souviens pourtant de ce cheval sellé dans le jardin de l'avenue Jules Ferry, à Aix, et ma fille me disant : "Papa, viens voir, un zèbre !"... le jeune homme corse comme exemple de zèbre, un sacré zèbre, mais jusqu'à quand ? ; stérilité, stérilité... un thème important dans la création corse et dans la vie créative corse, aussi, non ? Enfin, sur tout ce que je viens de dire (je vous avais prévenu, c'est presque toujours n'importe quoi) vous avez peut-être un avis différent ?

Voici le texte (de Paul Miniconi, ainsi que la musique) (pendant ce temps-là, j'appuie à nouveau sur le bouton avec le triangle, et je tape sur "repeat") :

Ùn si sminteca
Ùn si sminteca mai nudda

Ùn si ramenta

Ùn si ramenta mai tuttu


Ne lu to visu

Chì l'aghju scuntratu un ghjornu

Chì era la to prumessa
A to prumessa incavalcata


Li to bracci ingiru à lu me coddu


Funi lampati

À l'usu di una pastoghja

Ai pruvatu

Di fammi sottumissioni


To pastoghja l'aghju sfatta

A pena ch'idda hè ghjunta l'alba

Senza avè nissun paura

Di fammi ripiglià


Dicendu isiè ùn t'inchietà


Aghju da vultà

Aghju da vultà

(Nous sommes loin du "Anu da vultà "des Muvrini, il faut bien un jour évoquer les sentiments humains quotidiens...)

(l'image)

samedi 12 mars 2011

Il n'y a pas qu'en Corse que...

A Aix(-en-Provence) aussi :

Rencontre avec Angèle Paoli, Yves Thomas et Guidu Antonietti. Soyez nombreux et venez avec vos questions !

C'est par ici que cela se passera.

samedi 5 mars 2011

Actions du mois de mars 2011, en Corse : on relaie !

Je vous souhaite nombreux et enthousiastes pour assister et participer aux actions culturelles suivantes qui auront lieu en Corse au cours de ce mois de mars 2011, à Aiacciu, Bastia et Corti ! Actions absolument remarquables par leur richesse (au croisement des langues et des cultures), leur originalité, leur aspect collectif aussi, convoquant tous les arts et tous les types de relations au public (c'est-à-dire, nous). J'espère qu'il y aura des TRACES de tout cela ! (Si vous désirez des précisions, je peux envoyer par mail les documents qui détaillent les manifestations "Bleu Conrad" et "Turchinu Maiò", n'hésitez pas).

1) "BLEU CONRAD, UN BLEU PAS TOUT A FAIT COMME LES AUTRES"
(A l'Espace Diamant, Ajaccio, du 9 au 16 mars) :

Mercredi 9 mars :
18h : Conférence de Neda Soltani /
La symbolique féminine dans l’œuvre
de Joseph Conrad
21h : Projection du film «Gabrielle» de Patrice Chéreau

Jeudi 10 mars :
18h : Vernissage
Exposition photographique
de Maddalena Rodriguez-Antoniotti / A livre ouvert
Peinture - Installation d’Akenaton / Chien méchant

Vendredi 11 mars :
20h30 : Lecture Spectacle / Bleu Conrad

Samedi 12 mars :
14h : Projection du film «Peyrol le boucanier»
de Terence Young
16h30 : Rencontre / Ne pas effacer le bleu
20h30 : Lecture Spectacle / Bleu Conrad

Lundi 14 mars :
18h : Conférence d’André Green /
Joseph Conrad : Le premier commandement
21h : Projection du film «L’Agent secret»
de Christopher Hampton

Mardi 15 mars :
18h : Conférence de Maddalena Rodriguez-Antoniotti /
Le séjour de Joseph Conrad à Ajaccio ou comment
Napoléon revient au galop
21h : Projection du film «Les Duellistes» de Ridley Scott

Mercredi 16 mars :
18h : Conférence de Kenneth White / Nomades
intellectuels en Corse : Rousseau, Boswell, Conrad
Renseignement et Billetterie Espace Diamant 04 95 50 40 80

2) "PIERRES ANONYMES/PETRE SENZA NOME"
(A Batia, médiathèque de la bibliothèque, le 15 mars 2011, à 18 h)

A l’initiative de l’Operata culturale, 32 auteurs se sont prêtés au jeu du cadavre exquis, auquel les surréalistes ont donné ses lettres de noblesse. Le résultat, aussi surprenant qu’inattendu, où les voix en français ou corse se fondent les unes dans les autres, au point de confondre le lecteur. Et pourtant, suivant la règle du jeu, nul n’avait connaissance de ce qu’avait écrit l’autre, à l’exception des deux derniers vers, sur lesquels il devait enchaîner son propre poème, et ainsi de suite pour chacun.

Ce poème collectif achevé, il a été édité en 2010 par A Fior di Carta et sera donc présenté officiellement au Printemps des Poètes 2011, le mardi 15 mars à 18h, à la médiathèque de la bibliothèque de Bastia.

La lecture en sera faite par Béatrice Castoriano, Elisabeth Dominici, Franck Dzikowski, Jean-Claude Gassmann, Ivia Medori, Cécile Trojani, Jéromine Vivarelli-Mari,
avec la complicité musicale de Celia Picciochi au violon et de Jacky Le Menn à la guitare et à l’accordéon.


3) "TURCHINU MAIÒ"

Dimanche 20 mars
22 h : Soirée d’ouverture
Théâtre en chantier
Les Sirènes de Jacques Thiers
Lecture de l’adaptation de "Antigone au temps présent" de Michèle Acquaviva Pache
par Ysabelle Lacamp et Mychèle Leca

Lundi 21 mars
14 h : Ouverture, projection de séquences du film La Lézarde de Gérard Leca.
Master Classes
14 h 30 : Philippe Adrien avec la complicité de Jean-Pierre Giudicelli.
16 h : Denis Deprez parle de son projet LITA.
Débats
18 h : Module théâtre : La Traversée du miroir : filtre ou révélateur ?
animé par Jean-Pierre Giudicelli,
avec Philippe Adrien, Patricia Gattacceca, Jacques Thiers
19 h : Module graphisme : Défricher le réel, déchiffrer l’invisible
animé par Catherine Thiers,
avec Denis Deprez, Rosa Alice Branco, Sonia Moretti, Jaume Pont.
22 h : Fusion/Profusion
Lecture de poèmes par Lucia Santucci, Rosa Alice Branco, Patricia Gattacceca,
Sonia Moretti, Alain Di Meglio, Drazen Katunaric, Jaume Pont, Jacques Thiers ....

Mardi 22 mars
Master Classes
14 h : Pierre Charvet, avec la complicité de Robert Colonna d’Istria.
15 h : Pierre Gayte, avec la complicité de Robert Colonna d’Istria.
16 h : Hippolyte Romain, avec la complicité d’Ysabelle Lacamp et Robert Colonna d’Istria.
Débats
18 h : Module musique : Du chant des sens au mystère de l’infini
animé par Robert Colonna d’Istria,
avec Pierre Charvet, Patricia Gattacceca, Alain di Meglio.
19 h : Module image : L’art poétique : les divines correspondances,
animé par Robert Colonna d’Istria,
avec Hippolyte Romain, Pierre Gayte, Lucia Santucci, Drazen Katunaric.
22 h : Clôture du colloque
Projection du film Théorème de Pasolini

jeudi 3 mars 2011

Un regard d'Emmanuelle Caminade sur les "Carnets de marche" d'Angèle Paoli

Un simple lien, vers le billet placé sur le très riche blog, "L'or des livres", pour lire un point de vue mitigé sur cet ouvrage, que j'aime beaucoup, personnellement. De quoi discuter, donc. Bonne lecture.

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