lundi 6 septembre 2010

Emmanuelle Caminade lit encore Joël Bastard


C'est un grand plaisir que d'accueillir ici un nouveau billet d'Emmanuelle Caminade : l'actualité corse de cette blogueuse émérite, bien connue ici et de nombreux auteurs corses, est importante.

Signalons :

- un nouveau billet sur son blog "L'or des livres" à propos d'un livre de Jean-Pierre Santini, "L'exil en soi" (éditions Clémentine) ; livre qu'Emmanuelle estime être le plus beau de cet auteur : à lire, donc, et à discuter, peut-être ! (Personnellement, je n'ai pas encore lu ce livre.)


- un billet concernant "Le sentiment du lièvre", de Joël Bastard (oui, l'auteur de "Casaluna") et je présente donc à la suite de ce billet.

- et puis aussi, lors de la manifestation "Racines de ciel" à Ajaccio, une discussion (privée) eut lieu entre Jérôme Ferrari et moi-même à propos des billets d'Emmanuelle Caminade ; J. Ferrari me fit part (voyez que je ne vous cache rien !) de son admiration pour les intuitions d'E. Caminade quant à ses romans (et notamment concernant "Où j'ai laissé mon âme", voir ici). Evidemment, vous avez compris qu'il ne s'agit pas pour moi de révéler des propos qui auraient été destinés à rester secrets... mais bien de signaler des éléments importants (non ?) de la vie littéraire corse comme elle va ! (Ah, combien de discussions privées qu'il serait si utile de rendre ainsi publiques !) Bref, assez causé, voici les propos d'Emmanuelle (merci à elle, encore) concernant "Le sentiment du lièvre" de Joël Bastard (n'hésitez pas à réagir) :

Joël Bastard : encore !

Après avoir vanté les mérites de Casaluna ( Gallimard 2007), je reviens vous parler de Joël Bastard car la lecture du "Sentiment du lièvre" n'a fait que renforcer mon enthousiasme à son propos.
 Le sentiment du lièvre est une sorte de carnet de promenade en forêt jurassienne, une succession de poèmes en prose regroupés sous dix titres magnifiques et nourris du regard d'un poète «à l'affût» qui «a marché et écrit», éclairant les passages entre le «dedenz» et le «dehors» et «retournant les mots au-delà du visible».
L'écriture de Joël Bastard me séduit par son acuité et son humilité et par sa grande puissance évocatrice. Le poète sait traduire l'harmonie cachée du monde en le regardant sous toutes ses faces et se fondre dans le spectacle de la nature en nous tendant le miroir. Sa langue précise, imagée, concise et dense, atteint souvent la clarté expressive de l'épure et a le don de me transporter en un instant.
J'aimerais citer presque tous les poèmes de ce recueil – dont plusieurs évoquent l'enfance de l'auteur en Corse – mais me limiterai à trois et ne peux que vous conseiller d'acheter le livre !

Le sentiment du lièvre, Joël Bastard, Gallimard 2005, 132 pages de bonheur...

Sans forcer la barrière

p.16

Comme un menuisier chasse le bois avec sa gouge,
Le chevreuil, la neige en plantant son sabot!
Ecrire pour avancer pays.

Au fond des empreintes la neige est bleue, qui
nous redit en marchant l'immobile, le ciel.
Retour au pré, cette aile forestière

p.41

Certains prés, vus d'ici, sont comme verticaux.
Pendus à la corde à linge. Je vois le tablier de la
fermière, plus grand que les draps verts!


Les hellébores commencent à taper du pied

p.128

Les sujets d'écriture ne manquent pas. Dans l'errance. Le froid. Et pourtant je ne vois que le bord de la route fouillée de groins et de foulées. De voies et de connaissances. Avec sur cette page terreuse une sauterelle engourdie, posée sur son flanc. Une coquille d'escargot près d'une faine de l'an passé. Rendre ce que j'écris à ce que je vois. Pour installer la sauterelle dans sa disparition sous la saignée à blanc d'un avion qui traverse la voûte avec moi. C'est vous qui lisez et c'est moi qui passe au-dessus de la sauterelle couchée dans le froid.

(A propos de la photo, trouvée sur Flickr :

Peggy Bacon in mid-air backflip, Bondi Beach, Sydney, 6/2/1937 / by Ted Hood)

1 commentaire:

  1. Heureuse de retrouver ici Joël Bastard. Pour ceux qui le souhaitent ou le peuvent, il est possible de le rencontrer à la galerie parisienne Virgile le jeudi 16 septembre 2010 à partir de 18h00 à l’occasion de la publication de son livre “Bâton rouge” aux Éditions Virgile

    GALERIE VIRGILE
    56, Rue de l’Université
    75007 Paris

    Tél. 33 (0)1 45 44 75 30

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