Je tombe hier par hasard - je cherchais à la FNAC le livre de Michel-Vergé Franceschi sur "Marseille", collection Bouquins - sur un nouvel ouvrage de Thierry Ottaviani, "La Corse des écrivains" (éditions Alexandrines, visiblement spécialisées dans dans les biographies et guides littéraires). Certes ce n'est pas le premier livre qui promène son lecteur dans les différentes régions de l'île en évoquant le regard que des écrivains (depuis l'Antiquité jusqu'à aujourd'hui) ont porté sur ces coins ou sur la société corse dans son ensemble. Je reviendrai dans un autre billet sur ce qui me rend cet ouvrage agréable et ce qui au contraire me déçoit beaucoup (toujours courtoisement).
Pour l'instant, je veux citer ce passage :
"En partant de Bastia, la route mène à l'AEROPORT DE PORETTA, près de l'étang de Biguglia. Il accueille plus d'un million de passagers par an. Combien savent que c'est de ce lieu qu'Antoine de Saint-Exupéry prit son dernier vol pour le ciel ? Il était parti faire des repérages photographiques pour préparer le débarquement sur les côtes de Provence. Une stèle est visible à l'aéroport de Poretta. Elle rappelle que l'aviateur s'est envolé pour la dernière fois le 31 juillet 1944.
Certains livres du XXème siècle attribuent à Saint-Exupéry une Ode à la Corse qui compare l'île à un "galet posé sur la Méditerranée" ; mais cette paternité n'est pas prouvée."
Quelques remarques :
1. J'aimerais savoir (je vais questionner l'auteur à ce sujet) quels sont ces "livres du XXème siècle" qui attribuent ce poème à Saint-Exupéry ? (Je rappelle que l'enquête menée sur ce blog ne nous a permis que d'identifier précisément, pour l'instant, un ouvrage d'histoire, "La grande aventure des Corses" de René Sédillot, publié en 1969 : voir ici le billet qui en parle.)
2. Si "cette paternité n'est pas prouvée", est-il bien utile de citer ce texte ? Visiblement, Saint-Exupéry n'a jamais été un écrivain "de la Corse" ; un écrivain passé par la Corse (ses dernières semaines avant de mourir), oui, qui y a peut-être écrit des pages de "Citadelle" et plus certainement deux lettres retrouvées dans sa chambre après son départ définitif, mais rien sur la Corse.
Voilà l'aventure continue, je vous tiens au courant des éventuelles avancées de l'enquête, n'hésitez pas à faire part ici d'informations utiles (ou inutiles mais drôles).
Pour les fous et les vicieux, voici le lien vers tous les billets concernant Saint-Exupéry sur ce blog.
Ce blog est destiné à accueillir des points de vue (les vôtres, les miens) concernant les oeuvres corses et particulièrement la littérature corse (écrite en latin, italien, corse, français, etc.). Vous pouvez signifier des admirations aussi bien que des détestations (toujours courtoisement). Ecrivez-moi : f.renucci@free.fr Pour plus de précisions : voir l'article "Take 1" du 24 janvier 2009 !
jeudi 28 mars 2013
mercredi 27 mars 2013
Explications...
Comme il apparaît que le précédent billet intitulé "Un premier écho des conférences et débats du Salon du livre de Paris 2013" proposait un compte rendu comportant bien trop d'erreurs de transcription des paroles prononcées samedi dernier, je l'ai supprimé.
Je suis bien désolé de cet incident.
Je me suis rendu coupable de bien des maladresses similaires par le passé, et on a même pu m'en faire grief, supposant chez moi des volontés occultes et malveillantes... alors pourquoi continuer ? A vrai dire, je ne sais pas, je sais seulement que je n'arrive pas à arrêter d'essayer de faire de ce blog un espace d'échanges. Mais ou bien cet objectif est ridicule (mais pourquoi ?), ou bien je suis la mauvaise personne pour tenter ce genre de chose (dès lors, dites-moi où l'on peut trouver un espace ayant le même objectif... afin que j'évite de le souiller...).
Bon je dois être définitivement perdu pour la patrie, je vais continuer à essayer de ne pas trop me tromper, mais je jure que si quelqu'un prend la relève, je ferme ce blog définitivement et j'enlève tous les billets encore disponibles sur le net, cela évitera de froisser qui que ce soit.
AJOUT DU 28 MARS 2013 : Veuillez m'excuser mais je ne publierai pas de commentaires revenant sur cette affaire, même si je les lis, et certains avec beaucoup de plaisir. Par contre, je publierai tout récit de lecture et tout commentaire sur ces nouveaux billets, dans la mesure où les propos ne sortent pas des limites de la courtoisie (certains s'étonnent que je ne publie pas leurs avis alors qu'ils contiennent des attaques personnelles). Je demanderai aussi à toutes les personnes concernées d'essayer de ne pas considérer les avis et critiques comme des actes malveillants. Je répète donc ici que je ne fermerai pas ce blog tant qu'il n'y aura pas d'autre lieu dévolu aux discussions autour de la littérature corse (il y a nombre de blogs, sites et même forums passionnants qui proposent des avis sur des livres et des spectacles mais ne sollicitent pas des discussions). Le jour où ce lieu existera, j'applaudirai et je souhaiterai bonne chance à leurs animateurs ; car je crois toujours à la nécessité impérative d'un espace public d'échanges de points de vue et d'expériences de lectures.
Je suis bien désolé de cet incident.
Je me suis rendu coupable de bien des maladresses similaires par le passé, et on a même pu m'en faire grief, supposant chez moi des volontés occultes et malveillantes... alors pourquoi continuer ? A vrai dire, je ne sais pas, je sais seulement que je n'arrive pas à arrêter d'essayer de faire de ce blog un espace d'échanges. Mais ou bien cet objectif est ridicule (mais pourquoi ?), ou bien je suis la mauvaise personne pour tenter ce genre de chose (dès lors, dites-moi où l'on peut trouver un espace ayant le même objectif... afin que j'évite de le souiller...).
Bon je dois être définitivement perdu pour la patrie, je vais continuer à essayer de ne pas trop me tromper, mais je jure que si quelqu'un prend la relève, je ferme ce blog définitivement et j'enlève tous les billets encore disponibles sur le net, cela évitera de froisser qui que ce soit.
AJOUT DU 28 MARS 2013 : Veuillez m'excuser mais je ne publierai pas de commentaires revenant sur cette affaire, même si je les lis, et certains avec beaucoup de plaisir. Par contre, je publierai tout récit de lecture et tout commentaire sur ces nouveaux billets, dans la mesure où les propos ne sortent pas des limites de la courtoisie (certains s'étonnent que je ne publie pas leurs avis alors qu'ils contiennent des attaques personnelles). Je demanderai aussi à toutes les personnes concernées d'essayer de ne pas considérer les avis et critiques comme des actes malveillants. Je répète donc ici que je ne fermerai pas ce blog tant qu'il n'y aura pas d'autre lieu dévolu aux discussions autour de la littérature corse (il y a nombre de blogs, sites et même forums passionnants qui proposent des avis sur des livres et des spectacles mais ne sollicitent pas des discussions). Le jour où ce lieu existera, j'applaudirai et je souhaiterai bonne chance à leurs animateurs ; car je crois toujours à la nécessité impérative d'un espace public d'échanges de points de vue et d'expériences de lectures.
lundi 25 mars 2013
"La femme sans tête", d'Antoine Albertini
J'étais au courant de la sortie de ce "roman" par la presse, les blogs et Facebook sur Internet. J'avais lu l'interview très intéressante de l'auteur sur Corsicapolar, car elle montre bien ce que l'auteur a voulu faire (et éviter).
Puis j'ai acheté l'ouvrage (librairie Goulard, Aix), et je l'ai ouvert : la lecture du premier chapitre, je dois le dire, ne m'a pas engagé à poursuivre, cette histoire de vieux patriarche au bord de la mort, entouré de ses trois enfants, réclamant contre toute attente d'être enterré dans telle tombe du caveau, normalement prévue pour une autre personne m'a donné une impression de déjà lu, comme une séquence de début de feuilleton télévisé. J'ai lu deux ou trois fois cette entrée en matière et puis j'ai reposé le livre.
Hier, je l'ai repris, et ouvert au hasard. J'ai lu les premières pages de la deuxième partie (il y en a sept, plus un épilogue) qui concernent un pêcheur du sud de la Corse, nommé Rocchi, un tueur de jeunes gens. Afin de caractériser sa famille, ses névroses et les morts violentes qui la frappent, l'auteur mentionne le fait qu'une malédiction frapperait les Rocchi depuis qu'un ancêtre, pêcheur lui aussi, aurait attrappé et décapité une tortue dont il se serait servi comme berceau pour ses douze enfants...
Je résume le coeur de l'histoire, afin de ne pas trop se perdre. En 1979, en Corse, une jeune femme et son jeune fils disparaissent sans laisser aucune trace, puis en 1988 on retrouve le corps de la femme, terriblement battu et décapité, dans un caveau d'un petit village du Cap corse. Un gendarme hors-pair enquête alors durant de longues années pour retrouver le ou les assassins. Un journaliste (nommé Sébastien, me semble-t-il) reprend l'enquête à partir de 2006.
Cela m'a frappé, cette anecdote de la tortue. Une image puissante, comme dans un conte horrifique ; une légende propice à toutes les métamorphoses. J'eus alors une très forte envie de reprendre le livre au début, ce que j'ai fait hier soir. J'ai fini ma lecture à 2 h 30 cette nuit. J'étais captivé, j'ai souligné des passages, j'ai écrit des notes dans la marge. Et je me suis dit : voilà un ouvrage puissant. Certes je trouve que l'auteur retient un peu son écriture, comme s'il ne voulait pas se perdre en voulant trop en faire, ce qui aurait été un risque avec une histoire aussi riche et horrible. Certes parfois je trouve qu'il y a trop de savoir-faire journalistique dans les portraits rapides de certains personnages ou dans le choix de quelques détails significatifs pour fixer certaines scènes dans l'esprit du lecteur. Mais cela ne m'a pas empêché d'être d"abord embarqué dans le livre, puis littéralement passionné, même lorsque les événements de l'enquête deviennent presque incroyables. Au cours du livre, le lecteur que je fus s'est identifié avec ce gendarme et ce journaliste : je voulais savoir, savoir qui avait tué ces deux innocents.
Je ne dévoile rien du livre (impossible si l'on veut en profiter pleinement ; cependant, je le ferai plus tard, dans un autre billet, car ce livre peut se relire, ce qui est une bonne chose, non ?).
Je veux simplement insister sur deux sentiments qui me rendent cet ouvrage précieux :
- ce que j'appelle "littérature corse" s'enrichit pour moi d'un maître livre dans un nouveau genre, celui de l'enquête fictionnelle. Je ressens très fortement le besoin depuis longtemps d'ouvrages aussi culottés, courageux, offrant un regard personnel, critique sur la réalité insulaire. Ce qui est très beau (et pas du tout annoncé en quatrième de couverture), c'est que le livre est en fait l'entremêlement de deux histoires, deux paroles : le récit de l'enquête du gendarme (à travers son regard, à la troisième personne), entre 1979 et 1994 (je crois) et le récit de l'enquête du journaliste, qui évoque son enfance à la première personne (il avait 11 ans lors de la découverte du cadavre décapité et martyrisé), son père, son obsession, sa carrière professionnelle. (Tiens, un nouvel exemple de personnage journaliste dans cette littérature : je me souviens de Leo dans "Ecce Leo" de Flavia Accorsi et du journaliste dans "Une affaire insulaire" de Jean-Baptiste Predali ; vous en voyez d'autres ? à comparer, peut-être...) Ce double regard, permanent, permet de multiplier les facettes du mystère, et un peu comme dans "Trois balles perdues" de Sylvana Périgot, nous assistons petit à petit à un transfert d'obsession et de malheur : une succession d'abandons, sauf que dans le cas du journaliste, l'écriture mène jusqu'à un livre publié... En ce qui concerne le gendarme, lui aussi écrit en fait, mais ses fiches cartonnées ou ses carnets sont couverts de listes et de codes, c'est une écriture privée, et qui doit conduire au mutisme. Pour sortir du silence et de l'oubli, il faut prendre la parole publiquement et proposer une oeuvre. C'est ce que fait Antoine Albertini.
- en fait, le livre est une double enquête qui puise son énergie dans une matière fascinante et écoeurante : la mort. La Corse est de nouveau ici, "l'île des morts", l'île des tombeaux et des caveaux, l'île des morts violentes. Certes. Mais cette fois-ci le crime passe l'imagination et heurte les mentalités : un enfant a disparu (certainement assassiné), sa mère a été battue d'une façon innommable avant d'être décapitée (le chapitre avec le médecin légiste est insoutenable). L'enfer a été vécu par des innocents. C'est impensable, et pourtant cela fut. Et tout le monde a cherché à masquer la vérité, puis à oublier même les mensonges. C'est ce gouffre de l'oubli que le journaliste ne peut accepter, en l'occurrence ce sera dans le domaine des crimes que son travail de résurrection se fera, mais nous pourrions imaginer bien d'autres applications d'une telle attitude. D'où l'attention aux détails. L'auteur écrit, page 105 : "le crime et son essence profonde, perceptible dans les parfums, les odeurs, les regards et les silences de ceux qu'il unit dans la nuit froide..." Il donne à voir cette union improbable (unis dans le crime et la mort, bourreaux et victimes, témoins et enquêteurs, obsédés et indifférents). Page 96 : "Le corps du gosse est là, tout près, qui attend qu'on le tire du purgatoire de l'oubli." L'absence de cet enfant viendra hanter l'esprit du journaliste dès sa propre enfance : écrire revient à donner un corps à cet enfant martyr disparu et oublié. Le livre est un tombeau, l'idée n'est pas nouvelle, mais en l'occurrence cela fonctionne comme un révélateur d'une société insulaire décidément bien trop accueillante aux forces de la mort (comme le cancer charognard qui mange tranquillement le patriarche du début du livre, qui ne se plaindra jamais). Le livre tire aussi sa force, je trouve, d'un travail poétique remarquable : l'idée de la disparition, de l'évanouissement, de l'effondrement se concrétise en une série d'images et de scènes, très variées, tout au long du livre. Et notamment (je finirai ce premier billet avec cela), à la page 28, lorsque le gendarme parvient dans le cimetière juste après la découverte du cadavre :
"Le soleil s'obscurcit. Serrier s'arrête un instant de faire les cent pas et la scène du cimetière, la foule massée derrière le mur d'enceinte, les silhouettes spectrales des experts de la gendarmerie, la cacophonie lumineuse scintillant sur les plaques de marbre noir, tout cela se confond dans une image réduite à deux dimensions, une anfractuosité dans l'espace et dans le temps au creux de laquelle il se tient immobile, les yeux fermés, surpris de vaciller et de sentir ses jambes fléchir imperceptiblement sous son poids."
L'auteur (comme le croque-mort dans "Ghjuventù, ghjuventù" de Marceddu Jureczek ?) va redonner toutes ses dimensions, et sa vie - une vie factice -, à ce que la mort, et les meurtriers, auraient voulu réduire à une "anfractuosité" (autre façon de nommer l'Enfer, où les corps et les esprits sont martyrisés, moqués, puis oubliés).
P.S. : Il faut que je remette la main sur "Caveau de famille" d'Elisabeth Milleliri, une autre journaliste qui avait elle aussi écrit un roman à partir des événements qui mirent fin à la vie de Marcelle et Yann Nicolas (Gabrielle et Yann Nicollet, dans le roman d'Albertini). Il faudrait comparer les deux ouvrages.
Puis j'ai acheté l'ouvrage (librairie Goulard, Aix), et je l'ai ouvert : la lecture du premier chapitre, je dois le dire, ne m'a pas engagé à poursuivre, cette histoire de vieux patriarche au bord de la mort, entouré de ses trois enfants, réclamant contre toute attente d'être enterré dans telle tombe du caveau, normalement prévue pour une autre personne m'a donné une impression de déjà lu, comme une séquence de début de feuilleton télévisé. J'ai lu deux ou trois fois cette entrée en matière et puis j'ai reposé le livre.
Hier, je l'ai repris, et ouvert au hasard. J'ai lu les premières pages de la deuxième partie (il y en a sept, plus un épilogue) qui concernent un pêcheur du sud de la Corse, nommé Rocchi, un tueur de jeunes gens. Afin de caractériser sa famille, ses névroses et les morts violentes qui la frappent, l'auteur mentionne le fait qu'une malédiction frapperait les Rocchi depuis qu'un ancêtre, pêcheur lui aussi, aurait attrappé et décapité une tortue dont il se serait servi comme berceau pour ses douze enfants...
Je résume le coeur de l'histoire, afin de ne pas trop se perdre. En 1979, en Corse, une jeune femme et son jeune fils disparaissent sans laisser aucune trace, puis en 1988 on retrouve le corps de la femme, terriblement battu et décapité, dans un caveau d'un petit village du Cap corse. Un gendarme hors-pair enquête alors durant de longues années pour retrouver le ou les assassins. Un journaliste (nommé Sébastien, me semble-t-il) reprend l'enquête à partir de 2006.
Cela m'a frappé, cette anecdote de la tortue. Une image puissante, comme dans un conte horrifique ; une légende propice à toutes les métamorphoses. J'eus alors une très forte envie de reprendre le livre au début, ce que j'ai fait hier soir. J'ai fini ma lecture à 2 h 30 cette nuit. J'étais captivé, j'ai souligné des passages, j'ai écrit des notes dans la marge. Et je me suis dit : voilà un ouvrage puissant. Certes je trouve que l'auteur retient un peu son écriture, comme s'il ne voulait pas se perdre en voulant trop en faire, ce qui aurait été un risque avec une histoire aussi riche et horrible. Certes parfois je trouve qu'il y a trop de savoir-faire journalistique dans les portraits rapides de certains personnages ou dans le choix de quelques détails significatifs pour fixer certaines scènes dans l'esprit du lecteur. Mais cela ne m'a pas empêché d'être d"abord embarqué dans le livre, puis littéralement passionné, même lorsque les événements de l'enquête deviennent presque incroyables. Au cours du livre, le lecteur que je fus s'est identifié avec ce gendarme et ce journaliste : je voulais savoir, savoir qui avait tué ces deux innocents.
Je ne dévoile rien du livre (impossible si l'on veut en profiter pleinement ; cependant, je le ferai plus tard, dans un autre billet, car ce livre peut se relire, ce qui est une bonne chose, non ?).
Je veux simplement insister sur deux sentiments qui me rendent cet ouvrage précieux :
- ce que j'appelle "littérature corse" s'enrichit pour moi d'un maître livre dans un nouveau genre, celui de l'enquête fictionnelle. Je ressens très fortement le besoin depuis longtemps d'ouvrages aussi culottés, courageux, offrant un regard personnel, critique sur la réalité insulaire. Ce qui est très beau (et pas du tout annoncé en quatrième de couverture), c'est que le livre est en fait l'entremêlement de deux histoires, deux paroles : le récit de l'enquête du gendarme (à travers son regard, à la troisième personne), entre 1979 et 1994 (je crois) et le récit de l'enquête du journaliste, qui évoque son enfance à la première personne (il avait 11 ans lors de la découverte du cadavre décapité et martyrisé), son père, son obsession, sa carrière professionnelle. (Tiens, un nouvel exemple de personnage journaliste dans cette littérature : je me souviens de Leo dans "Ecce Leo" de Flavia Accorsi et du journaliste dans "Une affaire insulaire" de Jean-Baptiste Predali ; vous en voyez d'autres ? à comparer, peut-être...) Ce double regard, permanent, permet de multiplier les facettes du mystère, et un peu comme dans "Trois balles perdues" de Sylvana Périgot, nous assistons petit à petit à un transfert d'obsession et de malheur : une succession d'abandons, sauf que dans le cas du journaliste, l'écriture mène jusqu'à un livre publié... En ce qui concerne le gendarme, lui aussi écrit en fait, mais ses fiches cartonnées ou ses carnets sont couverts de listes et de codes, c'est une écriture privée, et qui doit conduire au mutisme. Pour sortir du silence et de l'oubli, il faut prendre la parole publiquement et proposer une oeuvre. C'est ce que fait Antoine Albertini.
- en fait, le livre est une double enquête qui puise son énergie dans une matière fascinante et écoeurante : la mort. La Corse est de nouveau ici, "l'île des morts", l'île des tombeaux et des caveaux, l'île des morts violentes. Certes. Mais cette fois-ci le crime passe l'imagination et heurte les mentalités : un enfant a disparu (certainement assassiné), sa mère a été battue d'une façon innommable avant d'être décapitée (le chapitre avec le médecin légiste est insoutenable). L'enfer a été vécu par des innocents. C'est impensable, et pourtant cela fut. Et tout le monde a cherché à masquer la vérité, puis à oublier même les mensonges. C'est ce gouffre de l'oubli que le journaliste ne peut accepter, en l'occurrence ce sera dans le domaine des crimes que son travail de résurrection se fera, mais nous pourrions imaginer bien d'autres applications d'une telle attitude. D'où l'attention aux détails. L'auteur écrit, page 105 : "le crime et son essence profonde, perceptible dans les parfums, les odeurs, les regards et les silences de ceux qu'il unit dans la nuit froide..." Il donne à voir cette union improbable (unis dans le crime et la mort, bourreaux et victimes, témoins et enquêteurs, obsédés et indifférents). Page 96 : "Le corps du gosse est là, tout près, qui attend qu'on le tire du purgatoire de l'oubli." L'absence de cet enfant viendra hanter l'esprit du journaliste dès sa propre enfance : écrire revient à donner un corps à cet enfant martyr disparu et oublié. Le livre est un tombeau, l'idée n'est pas nouvelle, mais en l'occurrence cela fonctionne comme un révélateur d'une société insulaire décidément bien trop accueillante aux forces de la mort (comme le cancer charognard qui mange tranquillement le patriarche du début du livre, qui ne se plaindra jamais). Le livre tire aussi sa force, je trouve, d'un travail poétique remarquable : l'idée de la disparition, de l'évanouissement, de l'effondrement se concrétise en une série d'images et de scènes, très variées, tout au long du livre. Et notamment (je finirai ce premier billet avec cela), à la page 28, lorsque le gendarme parvient dans le cimetière juste après la découverte du cadavre :
"Le soleil s'obscurcit. Serrier s'arrête un instant de faire les cent pas et la scène du cimetière, la foule massée derrière le mur d'enceinte, les silhouettes spectrales des experts de la gendarmerie, la cacophonie lumineuse scintillant sur les plaques de marbre noir, tout cela se confond dans une image réduite à deux dimensions, une anfractuosité dans l'espace et dans le temps au creux de laquelle il se tient immobile, les yeux fermés, surpris de vaciller et de sentir ses jambes fléchir imperceptiblement sous son poids."
L'auteur (comme le croque-mort dans "Ghjuventù, ghjuventù" de Marceddu Jureczek ?) va redonner toutes ses dimensions, et sa vie - une vie factice -, à ce que la mort, et les meurtriers, auraient voulu réduire à une "anfractuosité" (autre façon de nommer l'Enfer, où les corps et les esprits sont martyrisés, moqués, puis oubliés).
P.S. : Il faut que je remette la main sur "Caveau de famille" d'Elisabeth Milleliri, une autre journaliste qui avait elle aussi écrit un roman à partir des événements qui mirent fin à la vie de Marcelle et Yann Nicolas (Gabrielle et Yann Nicollet, dans le roman d'Albertini). Il faudrait comparer les deux ouvrages.
mardi 19 mars 2013
Salon du livre de Paris 2013 : On parle de littérature corse !
C'est donc une nouvelle extraordinaire : pour la première fois (me semble-t-il, mais corrigez-moi si je me trompe), le stand de la Corse au Salon du Livre de Paris ne va pas qu'accueillir des livres et des auteurs pour des signatures (ce qui est déjà bien, évidemment), mais des débats.
J'espère que cela se renouvellera les années suivantes et que d'autres salons du livre que celui de Paris donneront lieu à ce genre de prise de parole.
Une supplique : il faudrait que ces prises de parole laissent des traces (pour qu'elles donnent lieu ensuite à des échos, reprises, discussions, etc.), par des captations vidéos, des comptes rendus écrits, disponibles sur Internet.
L'information est disponible sur le site de la Collectivité territoriale de Corse en quatre parties :
La Corse vous invite à découvrir ses livres
36 auteurs dédicacent leurs livres sur le stand de la Corse
14 maisons d'édition insulaires sur le stand de la Corse
3 conférences organisées sur les livres corses
Mais si l'on a bien sur ce site les précisions concernant le planning des signatures (noms des auteurs, horaires), il n'y en a pas concernant les conférences !!
On peut les trouver notamment sur le site Ile Noire, mais les précisions les plus complètes je viens de les recevoir dans la newsletter des éditions Albiana (merci à elles). Je me permets donc de les copier ici, afin d'y revenir lorsque les traces de ces prises de parole seront disponibles - je l'espère ! - sur la Toile :
À partir de 18 heures, même salle, une conférence organisée par le Cunsigliu scientificu di a lingua, « La Corse en toutes lettres », en présence de J.-G.Talamoni, Ghj. Thiers, Ghj. Fusina, E. Gherardi et J. Ferrari.
Lundi 25 à 16 h 15, sur le thème de L’édition des régions, une rencontre animée par Pierre-Yves Grenu (Culturebox FTV) avec Bernard Biancarelli (Albiana), Jutta Hepke (Vent d’ailleurs) Frédéric Felder (Les requins marteaux) Florent Charbonnier (Caraibéditions). Scène des auteurs, stand Z82.
J'attends avec beaucoup d'impatience et de plaisir les conférences de AM Graziani sur l'écriture de l'Histoire ces vingt dernières années (de l'Histoire de la Corse) : y aura-t-il débat autour des points de vue des historiens ?, et de Petr'Antò Scolca, écrivain, traducteur du fantastique "Pasquale Paoli, la déroute de Ponte Novu" de Guerrazzi, sur "La littérature corse, ce continent oublié" : qu'entend-il par là ? comment va-t-il la définir ? qu'entend-il par "continent" oublié ? et par continent "oublié" ? quelles raisons donnera-t-il pour expliquer cet oubli ? quels livres va-t-il mettre en évidence ? quelles perspectives va-t-il dégager du foisonnement contemporain ?
J'attends aussi beaucoup du débat "La Corse en toutes lettres".
Le public sera-t-il au rendez-vous ? Pourra-t-il poser des questions ? Le fera-t-il ?
Dans tous les cas, bravo pour ces initiatives, et longue vie à ces conférences et débats impliquant auteurs et éditeurs corses.
---------------
AJOUT DU 21 MARS :
Toujours par un mail des éditions Albiana, voici des précisions sur les trois conférences du samedi 23 mars prochain !! :
La Collectivité territoriale de Corse, l'association des éditeurs de Corse et les éditions Albiana vous invitent à assister aux trois conférences qui se tiendront successivement le samedi 23 mars de 16 h 30 à 19 h 30, salle Nota Bene, lors du Salon du livre de Paris (Porte de Versailles).
J'espère que cela se renouvellera les années suivantes et que d'autres salons du livre que celui de Paris donneront lieu à ce genre de prise de parole.
Une supplique : il faudrait que ces prises de parole laissent des traces (pour qu'elles donnent lieu ensuite à des échos, reprises, discussions, etc.), par des captations vidéos, des comptes rendus écrits, disponibles sur Internet.
L'information est disponible sur le site de la Collectivité territoriale de Corse en quatre parties :
La Corse vous invite à découvrir ses livres
36 auteurs dédicacent leurs livres sur le stand de la Corse
14 maisons d'édition insulaires sur le stand de la Corse
3 conférences organisées sur les livres corses
Mais si l'on a bien sur ce site les précisions concernant le planning des signatures (noms des auteurs, horaires), il n'y en a pas concernant les conférences !!
On peut les trouver notamment sur le site Ile Noire, mais les précisions les plus complètes je viens de les recevoir dans la newsletter des éditions Albiana (merci à elles). Je me permets donc de les copier ici, afin d'y revenir lorsque les traces de ces prises de parole seront disponibles - je l'espère ! - sur la Toile :
Samedi 23 à 16 h 30, salle Nota Bene, conférences successives de A.-M. Graziani (« L’Histoire ces vingt dernières années ») et de Petr’Antò Scolca (« La littérature corse, ce continent oublié »).
À partir de 18 heures, même salle, une conférence organisée par le Cunsigliu scientificu di a lingua, « La Corse en toutes lettres », en présence de J.-G.Talamoni, Ghj. Thiers, Ghj. Fusina, E. Gherardi et J. Ferrari.
Lundi 25 à 16 h 15, sur le thème de L’édition des régions, une rencontre animée par Pierre-Yves Grenu (Culturebox FTV) avec Bernard Biancarelli (Albiana), Jutta Hepke (Vent d’ailleurs) Frédéric Felder (Les requins marteaux) Florent Charbonnier (Caraibéditions). Scène des auteurs, stand Z82.
J'attends avec beaucoup d'impatience et de plaisir les conférences de AM Graziani sur l'écriture de l'Histoire ces vingt dernières années (de l'Histoire de la Corse) : y aura-t-il débat autour des points de vue des historiens ?, et de Petr'Antò Scolca, écrivain, traducteur du fantastique "Pasquale Paoli, la déroute de Ponte Novu" de Guerrazzi, sur "La littérature corse, ce continent oublié" : qu'entend-il par là ? comment va-t-il la définir ? qu'entend-il par "continent" oublié ? et par continent "oublié" ? quelles raisons donnera-t-il pour expliquer cet oubli ? quels livres va-t-il mettre en évidence ? quelles perspectives va-t-il dégager du foisonnement contemporain ?
J'attends aussi beaucoup du débat "La Corse en toutes lettres".
Le public sera-t-il au rendez-vous ? Pourra-t-il poser des questions ? Le fera-t-il ?
Dans tous les cas, bravo pour ces initiatives, et longue vie à ces conférences et débats impliquant auteurs et éditeurs corses.
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AJOUT DU 21 MARS :
Toujours par un mail des éditions Albiana, voici des précisions sur les trois conférences du samedi 23 mars prochain !! :
La Collectivité territoriale de Corse, l'association des éditeurs de Corse et les éditions Albiana vous invitent à assister aux trois conférences qui se tiendront successivement le samedi 23 mars de 16 h 30 à 19 h 30, salle Nota Bene, lors du Salon du livre de Paris (Porte de Versailles).
Conférences
Première conférence à 16 h 30Petr'Antò SCOLCA - « La littérature corse : ce continent ignoré ».
Deuxième conférence à 17 h 15
Antoine-Marie GRAZIANI - « Faire de l’histoire aujourd’hui en Corse : nouveaux problèmes, nouvelles approches, nouveaux objets ».
Troisème conférence à 18 heures
Jean-Guy Talamoni, Ghjacumu Thiers, Ghjacumu Fusina, Eugène Gherardi, Jérôme Ferrari - « La Corse en toutes lettres ».
Deuxième conférence à 17 h 15
Antoine-Marie GRAZIANI - « Faire de l’histoire aujourd’hui en Corse : nouveaux problèmes, nouvelles approches, nouveaux objets ».
Troisème conférence à 18 heures
Jean-Guy Talamoni, Ghjacumu Thiers, Ghjacumu Fusina, Eugène Gherardi, Jérôme Ferrari - « La Corse en toutes lettres ».
vendredi 15 mars 2013
De la lecture (dans "Dora Bruder")
Puisque ce blog est aussi un lieu où l'on évoque ce que c'est que lire, en général, il y a longtemps que je voulais citer ces pages - extraites de "Dora Bruder", de Patrick Modiano (où l'auteur raconte son enquête sur une jeune fille juive disparue à Paris en 1941). Où l'on voit comment les "histoires" (où des "situations", ou des choses encore plus ténues) nous hantent, peu importent qu'elles soient réelles ou fictives, et forment en nous des ensembles complexes, des énigmes que l'on chérit.
"J'ai écrit ces pages en novembre 1996. Les journées sont souvent pluvieuses. Demain nous entrerons dans le mois de décembre et cinquante-cinq ans auront passé depuis la fugue de Dora. La nuit tombe tôt et cela vaut mieux : elle efface la grisaille et la monotonie de ces jours de pluie où l'on se demande s'il fait vraiment jour et si l'on ne traverse pas un état intermédiaire, une sorte d'éclipse morne, qui se prolonge jusqu'à la fin de l'après-midi. Alors, les lampadaires, les vitrines, les cafés s'allument, l'air du soir est plus vif, le contour des choses plus net, il y a des embouteillages aux carrefours, les gens se pressent dans les rues. Et au milieu de toutes ces lumières et de cette agitation, j'ai peine à croire que je suis dans la même ville que celle où se trouvaient Dora Bruder et ses parents, et aussi mon père quand il avait vingt ans de moins que moi. J'ai l'impression d'être tout seul à faire le lien entre le Paris de ce temps-là et celui d'aujourd'hui, le seul à me souvenir de tous ces détails. Par moments, le lien s'amenuise et risque de se rompre, d'autres soirs la ville d'hier m'apparaît en reflets furtifs derrière celle d'aujourd'hui.
J'ai relu les livres cinquième et sixième des Misérables. Victor Hugo y décrit la traversée nocturne de Paris que font Cosette et Jean Valjean, traqués par Javert, depuis le quartier de la barrière Saint-Jacques jusqu'au Petit Picpus. On peut suivre sur un plan une partie de leur itinéraire. Ils approchent de la Seine. Cosette commence à se fatiguer. Jean Valjean la porte dans ses bras. Ils longent le Jardin des Plantes par les rues basses, ils arrivent sur le quai. Ils traversent le pont d'Austerlitz. À peine Jean Valjean a-t-il mis le pied sur la rive droite qu'il croit que des ombres s'engagent sur le pont. La seule manière de leur échapper - pense-t-il - c'est de suivre la petite rue du Chemin-Vert-Saint-Antoine.
Et soudain, on éprouve une sensation de vertige, comme si Cosette et Jean Valjean, pour échapper à Javert et à ses policiers, basculaient dans le vide : jusque-là, ils traversaient les vraies rues du Paris réel, et brusquement ils sont projetés dans le quartier d'un Paris imaginaire que Victor Hugo nomme le Petit Picpus. Cette sensation d'étrangeté est la même que celle qui vous prend lorsque vous marchez en rêve dans un quartier inconnu. Au réveil, vous réalisez peu à peu que les rues de ce quartier étaient décalquées sur celles qui vous sont familières le jour.
Et voici ce qui me trouble : au terme de leur fuite, à travers ce quartier dont Hugo a inventé la topographie et les noms de rues, Cosette et Jean Valjean échappent de justesse à une patrouille de police en se laissant glisser derrière un mur. Ils se retrouvent dans un "jardin fort vaste et d'un aspect singulier : un de ces jardins tristes qui semblent faits pour être regardés l'hiver et la nuit". C'est le jardin d'un couvent où ils se cacheront tous les deux et que Victor Hugo situe exactement au 62 de la rue du Petit-Picpus, la même adresse que le pensionnat du Saint-Coeur-de-Marie où était Dora Bruder.
"À l'époque où se passe cette histoire - écrit Hugo - un pensionnat était joint au couvent (...). Ces jeunes filles (...) étaient vêtues de bleu avec un bonnet blanc (...). Il y avait dans cette enceinte du Petit Picpus trois bâtiments parfaitement distincts, le grand couvent qui abritait les religieuses, le pensionnat où logeaient les élèves, et enfin ce qu'on appelait "le petit couvent"."
Et, après avoir fait une description minutieuse des lieux, il écrit encore : "Nous n'avons pu passer devant cette maison extraordinaire, inconnue, obscure, sans y entrer et sans y faire entrer les esprits qui nous accompagnent et qui nous écoutent raconter, pour l'utilité de quelques-uns peut-être, l'histoire mélancolique de Jean Valjean."
samedi 9 mars 2013
"Plaisirs de la parole"... : un tour sur l'internet culturel et littéraire corse
Bien, bien, bien...
Les choses ne sont pas faciles, nous le savons, mais ça n'empêche pas de gambader.
Quoi dire ? Ceci, par exemple :
1. Quand est-ce que je vais enfin lire "L'ultimu" de Jean-Pierre Santini ? Depuis le temps qu'il est chez moi, gros ouvrage, il faut avoir un peu de temps pour se lancer dedans. J'en ai bien envie, et cela viendra. Il faut dire que je suis arrêté par la lecture des premières pages, je trouve que ça manque d'allant (les premières pages), et je crains que le tout ne soit indigeste. Pourtant l'oeuvre se présente avec une ambition extraordinaire, c'est une somme, et cette ambition-là me plaît beaucoup. Allez, je me le promets, j'aurai lu "L'ultimu" avant cet automne. Je dis cela parce que j'admire la constance avec laquelle Xavier Casanova évoque cet ouvrage (et le suivant, "Commando FLNC") sur son blog "Isularama". Sa façon de faire me passionne, et l'envie qu'il manifeste de regarder l'oeuvre entière de Santini comme une des plus importantes produites dans l'île. Voir son dernier billet, qui fait un rapprochement entre JPSantini et Romain Gary (rapprochement trop allusif, j'aimerai qu'il développe).
2. Quand est-ce que je vais faire ce billet sur un petit ouvrage peut-être totalement inconnu de Jérôme Ferrari ? Le titre de l'ouvrage est : "L'art dans Le monde comme volonté et comme représentation d'Arthur Schopenhauer", édité en juillet 2011 (bientôt 2 ans !) au CNDP-CRDP. Pourquoi un billet sur ce livre ? Mais parce qu'en fait nous pourrions le lire comme un "art poétique" de Jérôme Ferrari : "Que l'art opère le dévoilement du vrai et en reçoive en retour sa puissance nous semble précisément constituer une de ces possibilités fondamentales ou suffisamment importantes, en tout cas, pour justifier que Schopenhauer soit lu avec attention", écrit-il page 12. L'essai pédagogique sur un philosophe et l'écriture romanesque seraient donc liés. D'autant que l'auteur ne se contente pas d'analyser une oeuvre de Schopenhauer, il fait aussi de nombreuses références à d'autres auteurs et artistes, postérieurs, comme Thomas Bernhard, Vassili Grossman ou Cormac McCarthy.
3. Quand est-ce que je prendrai le temps de relire "Murtoriu" (voir ici et là) ? Plus je pense à ce livre, plus je me dit que sa force souveraine vient du montage des différentes scènes, de leur agencement dans les chapitres ou d'un chapitre à l'autre. Voyons... hier je me suis souvenu que le personnage du libraire, à un moment donné, va chez le médecin... car il a une mauvaise odeur dans la bouche, on pourrait même dire que sa bouche est pourrie. Cette pourriture dans la bouche, voilà ce dont je me suis souvenu. Hier. Je trouvais cela très beau. Evidemment, on peut y voir un élément symbolique, et c'est possible, voire nécessaire. Mais c'est d'abord un élément parmi d'autres. Sa bouche est pourrie, il en souffre. Qu'est-ce qui peut sortir d'une bouche pourrie ? De la littérature.
4. Y a-t-il un étudiant qui travaille sur l'internet littéraire et culturel corse ? Oh comme j'aimerais... Quel monde passionnant à regarder vivre ! A compléter bien sûr avec une analyse du monde littéraire et culturel en général (éditeurs, librairies, manifestations, prix, signatures, académie littéraire, associations, cafés littéraires, etc.). Via Facebook (qui malgré le nombre important d'infos inutiles reste un bon moyen de recevoir celles que l'on attend), je suis au courant des nouveaux textes publiés sur "Praxis Negra" et ses livraisons du mardi et du jeudi, "Anima cappiata" (je lis toujours les textes de Sylvestre Rossi, j'aime ce ton de confidence, d'un esprit qui semble revenu de tout, et pourtant vit - et écrit - avec une certaine intensité), "Invistita", "Isularama". Pour ce qui est des textes sur "Interromania", il faut penser à aller sur le site (où l'on trouve textes, et vidéos : exemple, trois vidéos de Jean-Guy Talamoni sur la "littérature corse"). Ayant appris récemment, grâce à Xavier Casanova, l'existence du site "Blog'in giru", j'y vais maintenant régulièrement : le premier blog consacré à la recension et au commentaire des concerts, pièces de théâtre, expositions, rencontres qui ont lieu en Corse ! Billets précis et développés, personnels et souvent enthousiastes, la lecture est très agréable.
5. Bientôt, des occasions d'évoquer la littérature corse :
- le 15 mars, à la télé, sur Via Stella, une émission spéciale de "Par un dettu" de Petru Leca pour évoquer la poésie corse : avec Marcu Biancarelli, Stefanu Cesari, Petur Gambini, le saxophoniste Paul Mancini, le peintre Bernard Filippi, avec notamment présentation d'un nouveau projet alliant la poésie de M. Biancarelli et les peintures de Jérôme Luciani.
- le 19 mars, à Bastia, l'association Musanostra organise un café littéraire en corse ("literatura in caffè", induve si parla in corsu di libri scritti in corsu o micca), voir les précisions à venir sur leur forum.
- du 22 au 25 mars, c'est le Salon du livre de Paris, la Corse est présente grâce au stand financé par la CTC. Pour la première fois cette année, à ma connaissance, il y aura des débats ! Excellent ! Je n'ai pas trouvé l'info sur le site du Salon (quelqu'un a-t-il réussi ?), mais via Facebook, le site de la CTC et le site Ile Noire, voici quelques informations : samedi 24 mars, "La Corse en toutes lettres" avec Jérôme Ferrari, Jacques Fusina, Jacques Thiers, Jean-Guy Talamoni et Eugène Gherardi ; il y aura deux autres rencontres mais je ne sais pas quel jour, voir ici le lien sur le blog "Ile Noire".
- les 26, 27 et 28 avril, à Santu Petru di Tenda, l'associu Scrive in Corsu organise les Secondes journées de Littérature corse. Le thème sera Bastia dans la vie littéraire et la littérature corse.
- le 18 mai, à la bibliothèque de Bastia, Arte Mare organise la manifestation "Histoire(s) en mai", et ce sera le retour de la table ronde des blogs corses (que j'ai animée en 2010 et 2011 et que j'animerai encore cette année ; précisions sur le thème et les invités très bientôt).
- début septembre, la 5ème édition du festival littéraire "Racines de ciel" ; j'animerai pour la deuxième fois la table ronde sur "Comment fabrique-t-on une littérature (notamment corse) ?" avec quatre invités : Eugène Gherardi, Jean-Marie Klinkenberg, Constant Sbraggia et Marie-Jean Vinciguerra. La question sera : Avons-nous besoin d'"institutions littéraires" (académies, prix, etc.) pour construire une littérature ?
Les choses ne sont pas faciles, nous le savons, mais ça n'empêche pas de gambader.
Quoi dire ? Ceci, par exemple :
1. Quand est-ce que je vais enfin lire "L'ultimu" de Jean-Pierre Santini ? Depuis le temps qu'il est chez moi, gros ouvrage, il faut avoir un peu de temps pour se lancer dedans. J'en ai bien envie, et cela viendra. Il faut dire que je suis arrêté par la lecture des premières pages, je trouve que ça manque d'allant (les premières pages), et je crains que le tout ne soit indigeste. Pourtant l'oeuvre se présente avec une ambition extraordinaire, c'est une somme, et cette ambition-là me plaît beaucoup. Allez, je me le promets, j'aurai lu "L'ultimu" avant cet automne. Je dis cela parce que j'admire la constance avec laquelle Xavier Casanova évoque cet ouvrage (et le suivant, "Commando FLNC") sur son blog "Isularama". Sa façon de faire me passionne, et l'envie qu'il manifeste de regarder l'oeuvre entière de Santini comme une des plus importantes produites dans l'île. Voir son dernier billet, qui fait un rapprochement entre JPSantini et Romain Gary (rapprochement trop allusif, j'aimerai qu'il développe).
2. Quand est-ce que je vais faire ce billet sur un petit ouvrage peut-être totalement inconnu de Jérôme Ferrari ? Le titre de l'ouvrage est : "L'art dans Le monde comme volonté et comme représentation d'Arthur Schopenhauer", édité en juillet 2011 (bientôt 2 ans !) au CNDP-CRDP. Pourquoi un billet sur ce livre ? Mais parce qu'en fait nous pourrions le lire comme un "art poétique" de Jérôme Ferrari : "Que l'art opère le dévoilement du vrai et en reçoive en retour sa puissance nous semble précisément constituer une de ces possibilités fondamentales ou suffisamment importantes, en tout cas, pour justifier que Schopenhauer soit lu avec attention", écrit-il page 12. L'essai pédagogique sur un philosophe et l'écriture romanesque seraient donc liés. D'autant que l'auteur ne se contente pas d'analyser une oeuvre de Schopenhauer, il fait aussi de nombreuses références à d'autres auteurs et artistes, postérieurs, comme Thomas Bernhard, Vassili Grossman ou Cormac McCarthy.
3. Quand est-ce que je prendrai le temps de relire "Murtoriu" (voir ici et là) ? Plus je pense à ce livre, plus je me dit que sa force souveraine vient du montage des différentes scènes, de leur agencement dans les chapitres ou d'un chapitre à l'autre. Voyons... hier je me suis souvenu que le personnage du libraire, à un moment donné, va chez le médecin... car il a une mauvaise odeur dans la bouche, on pourrait même dire que sa bouche est pourrie. Cette pourriture dans la bouche, voilà ce dont je me suis souvenu. Hier. Je trouvais cela très beau. Evidemment, on peut y voir un élément symbolique, et c'est possible, voire nécessaire. Mais c'est d'abord un élément parmi d'autres. Sa bouche est pourrie, il en souffre. Qu'est-ce qui peut sortir d'une bouche pourrie ? De la littérature.
4. Y a-t-il un étudiant qui travaille sur l'internet littéraire et culturel corse ? Oh comme j'aimerais... Quel monde passionnant à regarder vivre ! A compléter bien sûr avec une analyse du monde littéraire et culturel en général (éditeurs, librairies, manifestations, prix, signatures, académie littéraire, associations, cafés littéraires, etc.). Via Facebook (qui malgré le nombre important d'infos inutiles reste un bon moyen de recevoir celles que l'on attend), je suis au courant des nouveaux textes publiés sur "Praxis Negra" et ses livraisons du mardi et du jeudi, "Anima cappiata" (je lis toujours les textes de Sylvestre Rossi, j'aime ce ton de confidence, d'un esprit qui semble revenu de tout, et pourtant vit - et écrit - avec une certaine intensité), "Invistita", "Isularama". Pour ce qui est des textes sur "Interromania", il faut penser à aller sur le site (où l'on trouve textes, et vidéos : exemple, trois vidéos de Jean-Guy Talamoni sur la "littérature corse"). Ayant appris récemment, grâce à Xavier Casanova, l'existence du site "Blog'in giru", j'y vais maintenant régulièrement : le premier blog consacré à la recension et au commentaire des concerts, pièces de théâtre, expositions, rencontres qui ont lieu en Corse ! Billets précis et développés, personnels et souvent enthousiastes, la lecture est très agréable.
5. Bientôt, des occasions d'évoquer la littérature corse :
- le 15 mars, à la télé, sur Via Stella, une émission spéciale de "Par un dettu" de Petru Leca pour évoquer la poésie corse : avec Marcu Biancarelli, Stefanu Cesari, Petur Gambini, le saxophoniste Paul Mancini, le peintre Bernard Filippi, avec notamment présentation d'un nouveau projet alliant la poésie de M. Biancarelli et les peintures de Jérôme Luciani.
- le 19 mars, à Bastia, l'association Musanostra organise un café littéraire en corse ("literatura in caffè", induve si parla in corsu di libri scritti in corsu o micca), voir les précisions à venir sur leur forum.
- du 22 au 25 mars, c'est le Salon du livre de Paris, la Corse est présente grâce au stand financé par la CTC. Pour la première fois cette année, à ma connaissance, il y aura des débats ! Excellent ! Je n'ai pas trouvé l'info sur le site du Salon (quelqu'un a-t-il réussi ?), mais via Facebook, le site de la CTC et le site Ile Noire, voici quelques informations : samedi 24 mars, "La Corse en toutes lettres" avec Jérôme Ferrari, Jacques Fusina, Jacques Thiers, Jean-Guy Talamoni et Eugène Gherardi ; il y aura deux autres rencontres mais je ne sais pas quel jour, voir ici le lien sur le blog "Ile Noire".
- les 26, 27 et 28 avril, à Santu Petru di Tenda, l'associu Scrive in Corsu organise les Secondes journées de Littérature corse. Le thème sera Bastia dans la vie littéraire et la littérature corse.
- le 18 mai, à la bibliothèque de Bastia, Arte Mare organise la manifestation "Histoire(s) en mai", et ce sera le retour de la table ronde des blogs corses (que j'ai animée en 2010 et 2011 et que j'animerai encore cette année ; précisions sur le thème et les invités très bientôt).
- début septembre, la 5ème édition du festival littéraire "Racines de ciel" ; j'animerai pour la deuxième fois la table ronde sur "Comment fabrique-t-on une littérature (notamment corse) ?" avec quatre invités : Eugène Gherardi, Jean-Marie Klinkenberg, Constant Sbraggia et Marie-Jean Vinciguerra. La question sera : Avons-nous besoin d'"institutions littéraires" (académies, prix, etc.) pour construire une littérature ?
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