samedi 12 mai 2012

"Ce que l'on met dans un poème...", poésie d'Agostini

Je reçois - comme bien d'autres, j'imagine - un mail d'alerte du blog "Gattivi ochja" du poète Stefanu Cesari, et que lis-je ? :

un poème de Jean-François Agostini (extrait de son dernier recueil, "Généalogie de l'algue", éditions Jacques Brémond ! Traduit en corse par Stefanu Cesari... je vous laisse aller là-bas, bonne lecture.

Ici, je me contenterai de reporter dans un billet le premier poème de ce recueil (dont je possède un exemplaire).

Parce que j'aime la forme inventée et pratiquée avec constance par JF Agostini,

ces variations infinies d'une sensibilité aux aguets (en fin de journée, puisque c'est le moment de l'écriture pour lui, comme il le dit dans un entretien télévisé),
cette science du blanc et du silence, du rythme rompu, du rejet,
cette volonté de lyrisme impersonnel,
ce dialogue amusé avec les autres poètes (Baudelaire et Queneau),
ce goût des paradoxes et des lieux communs (régénérés),
ce mariage de l'Esprit et du prosaïque,
de l'explicite et du sous-entendu,
mine de rien, etc... Tiens, "Mine de rien", ce pourrait être le titre de ce poème, qui est comme un art poétique (et qui met l'accent dans les derniers mots sur ce que nous ne lirons pas, ne ferons qu'imaginer, ce qui a été "biffé" ; je trouve cela beau, de faire voir et entendre la matière muette et invisible dont se nourrit le poème, non ?).

Bon, je n'ai plus le temps, je reviendrai, et maintenant la parole au poète, au poème je veux dire, non au poème lu, au poème que nous lisons :


Ce que l'on met dans un poème                 n'est que la
courte traversée d'un instant             aussi long qu'une
vie   Des  mots  comme  des  fascines  que  l'on tresse
sur le blanc pour durer dans l'après                  et tenir
le terreau des émotions                      (qu'on ne cultive
pas)            - des herbes folles et des fleurs inconnues
aux senteurs de l'enfance y foisonnent           La mort
au bout de chaque vers                    sans rime ni rejet


Ce que l'on met dans un poème                une syllabe
d'un     r     augmentée  pour  tout  dire  d'un  peu  de
rien                            L'univers sur une bille de bic à
quatre couleurs 
                               Le rouge           pour biffer l'ajout

3 commentaires:

  1. Un début de discussion, sur Facebook: https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=349598675094887&id=731168989&notif_t=share_comment

    Dite a vostra !

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  2. Un écho à ce recueil par Angèle Paoli, sur son site Terres de femmes : http://terresdefemmes.blogs.com/mon_weblog/2012/04/jean-fran%C3%A7ois-agostini-g%C3%A9n%C3%A9alogie-de-lalgue.html

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  3. Un écho, venant de Jean-François Agostini lui-même :

    "Je livre effectivement une sorte d'art poétique et je dialogue avec d'autres, Nerval, Sacré, Rouzeau, Mallarmé, Baudelaire mais aussi, Fusina, Dimeglio, Cesari, Antoniotti-Rodriguez et quelques amis plasticiens.
    Une précision toutefois concernant "cette volonté de lyrisme impersonnel," j'imagine que vous faites allusion à l'emploi du pronom indéfini on, qui est plutôt la volonté de se trouver compris dans un tout en notre "séjour" sur terre. Le je lyrique est bien présent mais diffus, "enchâssé".
    Mon prochain livre, qui paraîtra début juin, achèvera un cycle initié avec "Era ora". 36 photographies en noir et blanc, accompagnées de 36 poèmes. Un zoom sur mon microcosme estival."

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