samedi 1 octobre 2011

Lecture en cours et arrêt buffet ("Old is beautiful", François de Negroni)

Une double vérité pour commencer, parce que j'ai envie de la dire (je ne les dis pas toutes tout le temps, mes vérités...).

J'ai reçu "Old is beautiful" dans ma boîte aux lettres ; quel plaisir de recevoir des livres, encore plus des livres publiés par des éditeurs corses (car ils sont bien trop chers pour mon budget, moi qui voudrais les acheter tous ! Sujet de discussion : tant qu'il n'y aura pas une politique de publication en livre de poche, la littérature corse ne décollera pas ; comment faire acheter un bouquin entre 15 et 20 euros à une classe de 34 élèves de seconde ?).

Alors, que dois-je faire ? Dois-je lire le livre ? En parler dans un billet ? En dire du bien ? Il y a cinq cas de figure :
- le livre me plaît, j'ai envie d'en parler, j'ai le temps de le faire comme je l'entends, je le fais.
- le livre me plaît, j'aimerais bien en parler, je n'ai pas le temps de le faire comme je l'entends, je ne le fais pas.
- le livre ne me plaît pas, j'ai envie d'en parler, j'ai le temps, je le fais.
- le livre ne me plaît pas, j'ai envie de dire pourquoi, je n'ai pas le temps, je ne le fais pas.
- le livre ne me plaît pas, je n'ai pas envie d'en parler, je n'en parle pas.

Vous voyez deux éléments importants dans cette liste : le facteur temps est déterminant (une absence de parole ne préjuge donc pas de mon opinion sur tel livre reçu dans ma boîte aux lettres : très sérieusement, il y a des livres que j'adore et dont je n'ai pas encore parlé) ; les circonstances de ma rencontre avec tel livre n'entrent pas en ligne de compte (le fait de m'envoyer un livre ne m'oblige pas à en parler, et encore moins à en dire du bien, pour remercier poliment l'auteur ou l'éditeur ; car ce qui est préjudiciable, selon moi, c'est l'absence d'échange honnête de paroles sincères).

Bon, il reste une hypothèse que je n'ai pas encore réalisée : le livre me plaît, j'ai le temps d'en parler mais... je n'ai pas envie d'en parler... (Cette proposition me paraît même de la plus extrême barbarie, bien qu'elle constitue en fait la pratique générale !!...)

Ouf, quelle longue introduction pour simplement signifier que j'ai un peu de temps devant moi et que je désire l'occuper à le perdre devant mon ordinateur à :
- évoquer ma lecture en cours (j'en suis à la page 116) de l'essai-pamphlet-récit autobiographique "Old is beautiful" (Editions Materia scritta, 2011) de François de Negroni (dont je n'ai rien lu d'autre ; mais ce livre me donne la furieuse envie de retrouver mon exemplaire de son édition de "Lettre à Pascal Paoli" de Frédéric de Neuhoff (même éditeur, 2005).
- citer deux ou trois passages qui me semblent éclairants, et, pour l'un d'entre eux, magnifique (le genre de passage qui me donne envie d'interrompre ma lecture pour le taper sur mon clavier et le donner à lire à tous ; d'où ce billet).

Donc, d'abord évoquer ma lecture.

Ce n'est pas le genre de livre que j'ai de prime abord envie de lire : une description de la ville-bordel de Pattaya en Thaïlande servant de dénonciation de l'hypocrisie humanitaire. Les écrits qui tirent vers le pamphlet ne m'attirent pas du tout non plus. C'est pour moi une littérature de combat qui me semble s'autodétruire au fur et à mesure de ma lecture, au lieu de proposer un nouveau plan imaginaire, une respiration pour mieux retourner vers le monde. Voilà pour mes a priori. Et c'est vrai que par moments, je trouve la charge un peu redondante, le style parfois un peu lourd et les jeux de mots peu réussis ("Belle du senior", je souris, mais bon, ou encore "La réalité dépasse l'affliction", etc.).

Mais il y a une astuce dans ce livre : un entremêlement que je trouve très réussi entre un propos très informé, virulent, donc constamment vivant, tout de même, et un récit autobiographique dans lequel l'auteur/juge devient un personnage, objet de contradictions (entre désirs et auto-dépréciation). L'analyse pamphlétaire devient humaine (beaucoup d'humour, de petites scènes, de choses vues), le récit ne cherche pas l'émotion facile puisqu'il reste aussi un exemple parmi d'autres de ce que peuvent vivre les consommateurs de sexe dans cette bonne ville de Pattaya.
Je lis donc l'ensemble avec intérêt, je découvre le fonctionnement historique et actuel de la "plus grande ville-bordel du monde", et je me dis que la critique de l'humanitaire censé aider les prostituées à sortir de l'enfer de la prostitution est somme toute pertinente.
Evitons tout de suite de laisser penser aux lecteurs de ce billet que l'auteur viendrait justifier l'existence d'une telle activité (je cite un premier passage qui met les choses au clair) :

"L'humanité sera plus humaine le jour où aura disparu jusqu'au souvenir de ce que fut la prostitution - en cette société future dont le bagne ne prendra plus au peuple ses fils, ni le lupanar ses filles. Assurément. Mais bien davantage encore quand auront à jamais été oubliées, surmontées, dénoncées, jugées déshonorantes, les bassesses cauteleuses, la suffisance glacée, les trucages minables, de celles et de ceux qui s'en veulent les exterminateurs." (page 102)

La citation en italique est tirée du roman "Claude Gueux" (1834) de Victore Hugo (encore un texte, grand classique au collège aujourd'hui, qu'il faudrait que je lise). Les "exterminateurs" sont les humanitaires.

De même, le livre, s'il fait le procès de l'humanitaire (acte néocolonialiste, hypocrite, malhonnête, et surtout inefficace), n'en appelle pas pour autant à se désintéresser de la condition humaine particulière que l'on peut rencontrer en Thaïlande ou dans les autres lieux du monde où se développe le tourisme sexuel.

À preuve cette page (qui commence par évoquer l'engagement au Darfour de l'acteur américain George Clooney, notamment via certains épisodes de la série télévisée "Urgences") :

"Constatons enfin que les héros cathodiques des épopées urgentistes, sur lesquels s'investit le maximum de capital émotionnel, renvoient à une très ancienne tradition secouriste internationale. Cette tradition, qu'elle procède de conventions et de protocoles ratifiés par les nations (et généralement circonscrites aux conflits) ou qu'elle soit l'émanation de mouvements confessionnels, se confond, dans la réalité factuelle et sémantique, avec l'humanitaire moderne. Elle lui sert même de caution, d'oriflamme. Mais, au-delà de la division technique du travail, elle s'en différencie profondément, tant par ses enjeux que par son projet. Dans un cas, il s'agit de traiter un problème, puis de repartir. Dans l'autre, de s'installer autour d'un plan d'assistance à moyen ou long terme, avec pour objectif confusément identifié de gérer la faillite des politiques de développement et le démantèlement des services publics, de suppléer au désengagement des nantis de la terre, de pallier la paupérisation générée par les programmes d'ajustement structurel et autres cures de caches enragées imposées par la tutelle des organismes internationaux. Les humanitaires, crédules ou cyniques, restent au mieux otages, au pire complices, d'une logique socio-économique régressive, d'abord dure aux faibles. À force de masquer l'injustice derrière la détresse, ils en viennent à proposer des normes toujours minimales d'une vie qui n'est que survie." (Pages 114 et 115)

Voilà qui est clairement énoncé, et peut susciter le débat, puisque l'ouvrage est polémique.

Mais bien sûr, bien sûr, nous sommes ici sur un blog consacré à la littérature corse... Alors pourquoi évoquer ce livre ici ?

Eh bien pour deux raisons (et aussi peut-être une troisième), et ensuite je finirai ce billet en citant un long passage du livre (le passage qui m'a définitivement convaincu de prendre le temps de ce billet) :

1) Ce livre est publié par les éditions insulaires Materia scritta, dont le catalogue me passionne. Certes il n'y a que 9 titres pour l'instant et je n'en ai lu que 4 (bientôt 5). Mais les maquettes sont belles, le papier aussi, la mise en page (parfois quelques coquilles dans le texte, mais je n'en ai pas encore repéré dans "Old is beautiful"). Et les sujets abordés sont aussi variés que les genres qui les accueillent : pamphlets donc, édition critique de lettre historique, chroniques radiophoniques, roman, journal, articles d'intervention, traduction de poème allemand, etc... Bref une édition corse éclectique, soucieuse de qualité.

2) Ce livre est écrit par un Corse regardant le monde. Sans en faire trop sur ses origines et son identité ou sur ce que celles-ci auraient pu lui permettre de comprendre du monde, l'auteur ne s'en cache pas et les mentionne comme un fait parmi d'autres, utile à la compréhension de son regard personnel et de la situation collective qu'il décrit.

3) Mais ça me revient... Pattaya, Pattaya... j'ai déjà vu ce nom-là dans un poème corse... Incroyable, mais oui bien sûr, c'est dans le premier recueil de poèmes de Marie-Jean Vinciguerra, "A Siam" (1965) ! Et c'est ce poème que Xavier Casanova mit en valeur dans un des billets de son blog "Isularama" (voir ici) !! Pattaya, nouveau carrefour fondamental de l'imaginaire corse... eh oui.

Et donc j'en viens pour finir à la citation d'un passage que j'ai trouvé vraiment emballant par son écriture, un mélange de considérations générales, de regard distancé, de critique acerbe et amère avec le récit d'une errance personnelle, commencée il y a bien longtemps en fait, à la recherche de la gogo girl "Yatrung", à Pattaya. Passage qui m'a fait penser au travail d'écriture d'un Jérôme Ferrari, chez qui les personnages mêlent naturellement expérience insulaire et expérience du monde. Passage qui m'a transmis des émotions (j'ai eu l'impression d'y être), a enrichi mon imaginaire (de la figure du sociologue désabusé camouflé en triste touriste sexuel, ou l'inverse) :

"Mon grand-père, monté de Bastia à Paris, n'en avait pas pour autant jeté aux oubliettes les rigoureux principes éducatifs toujours en vigueur dans sa classe sociale. Il eut la sagesse d'emmener son fils unique, mon futur géniteur, se déniaiser au bordel le jour anniversaire de ses seize ans. Un établissement tenu par un membre hâbleur et marginalisé de la parentèle, d'ailleurs fort injustement biffé des généalogies officielles.
Je n'ai pas bénéficié d'une si prometteuse initiation. Les temps et le milieu corse étaient différents. Et surtout, les dettes de jeu et autres catastrophes financières orchestrées par ledit grand-père avaient, par ricochet et de manière conjuratoire, induit au sein de sa descendance une austérité et un rigorisme qui rompaient fâcheusement avec une tradition de ripailles, de ribaudes et de flambe, vieille de huit siècles. Ce furent donc les petites anglaises.

Je vais quand même découvrir très jeune la prostitution, en Afrique, où le néo-colonialisme m'a envoyé professer. Ces aventures exotiques, bien peu crapuleuses, ne suscitent alors guère d'émoi, si ce n'est le haut-le-coeur banal des éternels cagots, la commisération de chrétiens de gauche très émoustillés ou le sourd ressentiment des petits bourgeois français effarouchés et racistes de la bonne société coopérante. Tout cela se déroule dans un climat d'apesanteur historique, sans débats intérieurs ni masochistes repentances.

Symptôme de misère sexuelle, de carence affective ? Allons donc. Nos amantes restées au pays nous pleurent, nous écrivent, nous visitent parfois. Nos étudiantes, la fine fleur occidentalisée de la nomenklatura locale, nous draguent de manière éhontée : il n'y a qu'à choisir. Quant à l'inévitable femme blanche, mariée, délaissée et en mal d'aventure, elle cherche pathétiquement à éveiller en nous une fatuité à la conquérir.
Violence faite à la femme ? Irrespect envers sa dignité ? Oppression machiste ? Relation coloniale ? Ridicule. Nous sommes d'aimables fils de famille, qui ont choisi de préférer la justice à leurs mères. Et aussi des tiers-mondistes affûtés. Nous ne confondons pas les combats centraux et les luttes périphériques, les rapports d'exploitation - y compris, bien sûr, le proxénétisme - et ce commerce des corps, libre, informel, rarement sordide, plutôt ludique.
En vertu de quelles convenances, de quelle rigueur, de quelle supériorité, devrions-nous obérer nos attirances, discriminer nos affinités ?
J'insiste. Le discours moral et sociétal n'a pas pris le pas sur le politique. La sexualité n'est pas sacralisée, comme aujourd'hui, jusqu'à accabler de honte ceux qui - acheteurs, vendeurs - en monétisent ouvertement l'usage. Le fantasme du méchant-esclavagiste-qui-dévoile-et-pille-la-détresse-humaine ne tient pas encore lieu de pensée unique.

Cela se passait hier, et pendant longtemps, insoucieux de mon image, je ne m'étais pas couché de plus bonne heure qu'alors. Mais cette nuit à Pattaya, où, depuis une trentaine de jours, j'explorais ad nauseam le filon humanitaire de l'indignation, il ne m'insupportait pas outre mesure d'être devenu le malpropre de mon étude, un infect consommateur, un maniaque qui traquait vainement sa gogo girl envolée. Mieux, j'en tirais un soupçon de présomption. S'impliquer aussi indécemment confère, à n'en point douter, un sérieux avantage épistémologique. Il devait être environ deux heures du matin. Je regagnais mon hôtel. J'étais passablement torché, fatigué d'exister, en mode d'animation machinale. Vide et mou, je me faufilais entre des paquets de chairs préemptées, avinées, mais toujours conquérantes.

Après ma fastidieuse séquence de guet au Candyshop, j'avais un peu flâné dans le secteur, au beau milieu des fêtards. Partout clignotaient en boucle des néons rouge et or : Hot Girls, New Living Dolls, Heaven Above, etc., et je ne cessais d'être rameuté par les invites aiguës de filles à demi-nues qui pointaient devant leurs bars, d'être assailli aussi, en surimpression, par des flashes éphémères... Quand je pénètre au Blue Electric, je tombe aussitôt sur Yatrung : elle vient d'achever son tour de danse et me virgule un sourire à quatre-vingt baths, le prix du bon de sortie.

Mon éristique compatriote corse m'avait bien proposé - mais plutôt me pendre ! - de passer à son club de pétanque ; s'y réunissaient, autour de quelques bouteilles de champagne, les pires raclures de l'expatriation française, escortées de leurs régulières, d'anciennes putes locales assez tapées qui jouaient désormais les rombières et servaient de prête-noms... Je l'emmène chez un journaliste anglais dont la compagne thaïlandaise est cadre bancaire. Celle-ci la snobe méchamment. Sur la route du retour, Yatrung me livre résignée ce constat sociologique littéralement renversant : "She is a woman and I am a lady".

Un cornac se frayait difficilement un passage avec son éléphanteau, au grand bonheur des touristes. Moyennant quelques pièces, ils étaient invités à lui donner une friandise, qu'il cueillait délicatement de sa trompe. Le pachyderme et moi avions échangé un regard triste. Nous voyons un documentaire animalier... Le crocodile brise les jarrets arrière d'un zèbre d'un coup de queue fulgurant et dévore gloutonnement ses viscères. Elle pleure en silence.

Au sud de Walking Street, je m'étais arrêté pour dîner : le restaurant, italo-thaï, dégorgeait de couples mixtes, poids lourd contre poids plume, chacun pétrissant consciencieusement les cuisses de sa chacune, dans le plus pur style pattayais... Nous soupons, face à face ; elle se régale de calamars grillés et me parle de sa soeur aînée, Pon, une guenon en hiver, actuellement à Helsinki, chez son boy-friend. Elle-même a passé trois mois à Foix, l'an dernier, invitée par un riche et brave godelureau allumé ici. Le type pensait lui ouvrir les chemins de la liberté : elle conserve de ce séjour des souvenirs de goulag.

Et puis la rue, à nouveau, le choc des lumières et des stridences, les évocations volatiles. De guerre lasse, cédant aux incitations canailles d'un rabatteur, j'étais entré dans un gogo, afin d'entamer poétiquement ce premier janvier. Le Nui's Club, pourquoi pas ? Rideau : au centre de la piste trônait une baignoire dans laquelle deux putes poussives, ruisselantes de mousse savonneuse, simulaient de lesbiennes effusions... À la piscine de l'hôtel, la poignée de musculeux, fous de leurs corps, qui bronzent du matin au soir, ne prennent pas la peine de la mater quand elle sort de l'eau - la chasse ouvre au crépuscule.

Un Japonais explosé balançait par poignées des billets et riait à gorge déployée au spectacle des filles à quatre pattes criant et se disputant pour les ramasser... Quand elle gagne aux cartes, elle jubile de toutes ses dents, et range son butin avec une virtuosité de caissière, en constituant des petits paquets de montants homogènes, maintenus par un billet plié en deux.

Assis au fond de la salle, la mine renfrognée, vide, j'avais liquidé whisky sur whisky, en parcourant un livre de Jacques Rancière, décourageant ainsi imparablement les tentatives corruptrices et les languissants "darling" de ces demoiselles... Interdit d'utiliser, dans le cadre de nos rapports bilatéraux, l'espéranto rongé de la galanterie internationale ; je lui donne des : "Tirak", elle me répond du tac au tac : "Ti tengu caru".

Dès que l'occasion se présente, elle aime aussi placer : "On y va ?", unique trophée linguistique rapporté de son échappée ariégeoise... Oui, il était grand temps que je m'extirpe de ce grouillant fatras, qui se dérobait lentement à ma perception, où m'envahissait le caractère absolu de l'absurde. J'avais déguerpi comme un crabe à reculons.
Et maintenant donc, je remontais Walking Street à petits pas, coincé dans la foule compacte, avec le seul objectif de parvenir jusqu'à mon lit.
Il me tardait de continuer à lire Le philosophe et ses pauvres. Un moyen sévère mais avisé de surmonter ma présente contingence, cet engluement amorphe, en me heurtant au principe de réalité prolétarien - Antoine Roquentin, jadis, pour ne pas perdre pied, faisait d'Eugénie Grandet un usage parallèle. L'existence partout, à l'infini, de trop, toujours et partout ; l'existence - qui n'est jamais bornée que par l'existence." (pages 71-76)

Magnifique, non ? De la belle littérature corse, non ?

(Je vais reprendre ma lecture ce soir ; sur ma table, je trouve aussi d'autres livres que j'ai bien envie de lire et de "chroniquer" - oui, ne prenez pas ce billet comme un article en bonne et due forme ! Car sur ce blog, chacun écrit comme il veut, il ne s'agit pas de se conformer obligatoirement à tel ou tel canon d'écriture... -, parmi ces livres, je citerai : "Première pierre" d'Annie Drimaracci (éditions Colonna), "Automnes en miettes" d'Alain di Meglio (éditions Al Manar), "L'émotion identitaire en Corse" de Philippe Pesteil (éditions L'Harmattant), "A notti aspetta" de Norbert Paganelli (éditions Colonna), "1729, les Corses se rebellent" d'Evelyne Luciani (éditions Albiana), etc. etc.

Et vous ?)

20 commentaires:

  1. Juste quelques réactions sur des points précis de ton billet :

    Si le livre reçu te plaît et que tu n'as pas le temps d'en parler, tu peux le faire passer à d'autres qui, s'il leur plaît aussi, auront le temps de le faire ( c'est un peu ainsi que j'ai découvert "Un dieu un animal"... ton blog ... et la littérature corse ! )

    Recevoir des livres d'un éditeur ou d'un auteur n'oblige en effet ni à en parler - du moins publiquement - , ni à en dire du bien. C'est une question d'honnêteté envers soi-même et envers les lecteurs de son blog et, surtout, de respect de l'auteur !

    Materia scritta, une maison d'édition corse "  soucieuse de qualité" !!!!!!
    Je ne peux pas laisser dire cela : ce n'est pas une maison d'édition sérieuse et je ne lui accorderai plus jamais confiance!
    Même si, les circonstances étant à l'époque très difficiles , j'ai réussi à obtenir un exemplaire du livre commandé par une autre voie, il reste que l'éditeur a encaissé rapidement mon chèque sans jamais m'envoyer la "marchandise" ! Et pas même, depuis, un mail d'excuse à mes nombreux mails de réclamation restés alors sans réponse.....

    Quant à l'extrait cité, il peut te faire penser à Jérôme Ferrari qui mêle souvent en effet expérience du monde – et notamment coloniale – et expérience insulaire, mais au niveau de l'écriture, ça n'a rien à voir !

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  2. Emmanuelle,
    merci pour le commentaire.
    Je comprends ta déception du fait de ta malheureuse expérience avec Materia scritta, mais je trouve tout de même qu'ils font un effort sur la forme des livres et le choix des textes publiés. Concernant la diffusion et la prise en compte du public, il me semble que c'est l'ensemble des éditeurs qui ne cherche pas à faire beaucoup d'efforts pour les attirer et fidéliser (même si le site des éditions Albiana offre de plus en plus de possibilité d'accès à leurs publications).

    Quand j'évoque un lien entre le texte "Old is beautiful" et les textes de Jérôme Ferrari, ce n'est pas à partir du style. Le livre de de Negroni n'a pas le même objectif, il s'agit d'un travail d'enquête personnelle.

    Ceci dit, j'aimerais énormément lire des livres corses qui travaillent une écriture "journalistique" originale (je pense aux "Dispatches" de Michael Herr par exemple), ce qui me fait dire que le travail de Sanguinetti dans "Pietri Bey" aurait pu être bien plus fort, et meilleur, s'il avait évité la forme romanesque traditionnelle pour inventer une forme journalistique adéquate.

    Bon, je t'envoie un carton de livres très prochainement !! (Il nous faudrait cette nom de dieu de revue littéraire corse, tu y contribuerais régulièrement, et l'affaire serait réglée !!).

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  3. MB me demande de transmettre ce message à Emmanuelle (pour cause de bugs informatiques) :

    "Il y a un malentendu Emmanuelle. Le livre qui vous est parvenu venait bien de Materia Scritta, pas de ma dotation personnelle.

    Je vous envoie un courrier pour vous expliquer cela, et je laisse ce message afin de clarifier les choses ici aussi.

    Signé : MB"

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  4. Que Materia Scritta soit une maison d'édition sérieuse ou non n'est hélas plus à l'ordre du jour, puisque cette maison a mis les clés sous la porte.

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  5. Ce message d'Emmanuelle Caminade (envoyé par erreur sur un autre billet) :

    Il y a eu visiblement un malentendu sur cette affaire et apprenant - un peu tard !- que l'exemplaire reçu m'avait été envoyé au nom de l'editeur Materia scritta , je retire donc mes propos désobligeants.
    Il reste qu'un petit mot d'excuse , même tardif, n'aurait pas été de trop mais cela rentre alors dans la politique de "fidélisation" des lecteurs et n'affecte en rien le sérieux de la maison d'édition !

    EC

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  6. Angèle, je trouve cette nouvelle bien triste, j'espère qu'elle sera infirmée dans le futur, avec une renaissance de la dite maison d'édition.

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  7. Non non non St Eloi n'est pas mort, n'en déplaise à certain(e)s, Materia Scritta et bien vivante et poursuit son rythme lent mais régulier de trois parutions par an. Pour l'année 2012 paraitrons
    1: A cuntraversa di Valdunieddu de Marcu Biancarelli, en édition bilingue, traduit par Paulu Desanti.
    2: Un texte fondamental d'un grand philosophe du XVIIIeme...
    3: Une suite de nouvelles d'un écrivain inconnu
    annoncé dans une des chroniques de Biancarelli.

    Donc une année 2012 pleine de promesses et de surprises, pas de "nouvelle bien triste", rassurez vous M. Renucci.

    Zerlini

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  8. Eh bien Monsieur Zerlini, vous me voyez on ne peut plus heureux de cette joyeuse nouvelle !!
    Tout cela est très alléchant : peut-on en savoir plus (j'aurai au moins essayé).

    Entre rumeur d'enterrement et résurrection annoncée, la littérature corse est décidément pleine de surprises... dommage que tout le monde s'en foute comme de l'an quarante !! (comme dit l'autre !).

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  9. Anne Meistersheim m'ayant dit s'être retirée du comité de direction de Materia Scritta, qui dirige maintenant cette maison d'édition ?

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  10. Quand j'ai contacté cette maison d'édition, j'ai eu au téléphone René Caumer et François de Negroni. Ils doivent normalement venir au débat "Existe-t-il un désir de littérature corse ?" le lundi 17 octobre à Corti (dans le cadre des 30 ans de l'Université, Jacques Thiers m'a demandé d'animer un des débats et j'ai invité les éditeurs insulaires à discuter de cette question avec le public).
    Amicizia
    FX

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  11. Bon, j'ai terminé depuis quelques jours déjà "Old is beautiful", je dois dire que - incroyable tout de même - j'avais arrêté ma lecture exactement avant que le livre de prenne une autre tournure et n'offre un finale très fort où histoire familiale, sociologie d'une classe sociale et confession personnelle apportent un éclairage que je trouve vraiment original sur le parcours de nombre de familles corses. Ah, cet "imaginaire de la rente" ! O combien présent dans l'imaginaire corse. Je suis bien content d'avoir lu ce livre et de le compter parmi les ovnis de cette littérature qui n'existe toujours pas.

    Et vous ?

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  12. Je trouve aussi que la fin de ce livre constitue une quintessence littéraire corse et regrette que M. de Negroni ne se lance dans le genre littéraire, son humour, sa finesse et sa culture politique apporteraient des éléments probants à cette "littérature qui n'existe pas".
    Un lecteur

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  13. J'aime beaucoup Jérôme Ferrari, je le défendais bec et ongle au temps de son premier livre, quand tout le monde se bouchait le nez. Et depuis, je n'ai cessé de l'admirer. Mais est-ce lui rendre service que d'en faire le véritable dieu des lettres corses ? Lorsque Renucci ose suggérer qu'il pourrait y avoir des correspondances entre tel passage d'"Old is Beautiful" et l'écriture du Maître, Emmanuelle Caminade s'étrangle d'indignation. Quoi, avoir le culot de comparer l'incomparable Ferrari avec ce plaisantin ! Renucci est même obligé de battre en retraite...Jérôme, prend garde, ils vont t'embaumer tout vif.

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  14. Anonyme 05:55,
    merci pour le commentaire.
    Je vois peu d'écart entre "défendre bec et ongle", "admirer" et "adorer un dieu". Vous participez aussi, un petit peu, à l'embaumement du Grand Ecrivain.
    Evidemment, mon propos n'est d'embaumer personne ; mais de voir ce qu'il y a de vif et de vivifiant dans certains livres de la littérature corse, et d'en parler avec d'autres lecteurs. Des auteurs insulaires qui développent une oeuvre de très grande qualité il n'y en a pas non plus des sommes astronomiques, vous serez peut-être d'accord avec moi (ou pas) ? Il me semble donc inévitable que les mêmes titres de livre reviennent souvent ; d'autant plus que - je le répète ici - personnellement je suis un simple lecteur, je ne suis pas un critique "professionnel", je suis loin d'avoir tout lu et je n'ai pas donc de regard global sur tout cela ; c'est pourquoi j'ai ouvert ce blog à tout lecteur qui voudrait prendre la parole ; c'est collectivement que la littérature se construit.

    Quant au fait de battre en retraite : j'ai indiqué dans mon billet ce qui me plaisait moins dans le style de François de Negroni et j'ai bien insisté que ma pente naturelle ne me portait pas à forcément apprécier les pamphlets ; ma lecture n'est donc certainement pas la meilleure pour donner une idée exacte de ce livre. Et je n'ai fait que redire cela en discutant avec Emmanuelle Caminade. Je suis sûr que vous, vous pouvez exprimer deux idées extrêmement importantes pour la suite de la discussion :

    1 - racontez comment vous défendiez JF dès "Variétés de la mort" ; cela me passionnerait d'apprendre cela, sincèrement.
    2 - dites-nous comment vous parleriez aujourd'hui de ses livres ainsi que de ceux de François de Negroni de telle sorte qu'on évite de les embaumer.

    A très bientôt j'espère.

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  15. @Anonyme 7 octobre 05.55

    Quand j'écris « ça n'a rien à voir !  » je ne m'étrangle pas d'indignation, je m'étonne simplement de voir comparer ce qui pour moi ne peut l'être, à savoir une écriture romanesque littéraire et ( au vu des seuls extraits donnés) une écriture journalistique à tonalité pamphlétaire. ( Le point d'exclamation marque tout autant la surprise que l'exaspération ...)

    Sinon, n'étant en aucun cas adepte du culte de la personnalité, je préfère parler de livres que d'écrivains et vous pouvez , Anonyme 0555, être rassuré sur le sort de Jérôme Ferrari : quand un écrivain voit ses livres susciter de nombreuses interprétations et des relectures , c'est la vie qui s'empare de la littérature et non un écrivain qu'on embaume.

    On aimerait connaître vos propres lectures des livres de cet écrivain , mais aussi des livres des autres écrivains corses que vous semblez avoir peur de voir étouffer mais vous ne nous livrez que de vagues appréciations idolâtres : «  aimer, admirer , défendre bec et ongles ... »

    PS:
    Je vous signale qu'à défaut de parler du livre de François de Negroni que je n'ai pas lu, j'ai rendu compte de livres de nombreux écrivains corses , et souvent de livres qui , en Corse, avaient peu -ou pas – été chroniqués .

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  16. Emmanuelle,
    lorsque je lis je fais des liens (certainement parfois impertinents) entre des livres qui me présentent des figures. Que ce soit via une écriture romanesque littéraire ou via une écriture journalistique pamphlétaire, ces livres provoquent des chocs, des collisions d'images ; et je suis fasciné par cette mise en scène - variée - de la figure du Corse parti loin, notamment vers l'Asie, l'Océan Indien, etc... Voilà ce que je voulais dire, je ne veux pas tout mélanger ou tout mettre sur le même niveau de réussite d'écriture.
    Dans tous les cas "Old is beuatiful" m'a beaucoup apporté, comme les livres de Ferrari, et bien d'autres (pour ne pas oublier les autres).

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  17. Emmanuelle Caminade, au lieu de délivrer son pathos en grosses tartines, devrait s'interroger sur ses réactions et méditer sur le phénomène suivant : le statut médiatique ou mondain d'un écrivain insulaire change profondément lorsqu'il est reconnu et choyé par l'establishment culturel français. C'est ce qui est arrivé à Jérôme Ferrari. Cela n'enlève évidemment rien à son talent, mieux, c'en est la consécration. Mais cela modifie la façon dont il est perçu en Corse et peut affecter les catégories critiques des plus futées. Syndrome de surcompensation collective, jalousie, etc., poussent vers des formes d’idolâtrie ou de rejet. Comme l'écrivait Gilles Zerlini à propos de la remise du prix du livre corse à Jérôme Ferrari : "Voilà bien les Français. Ils tournent à tout vent".
    William Shakespeare Richard VI, acte III, 3, la Pucelle"
    Quant à parler d'"écriture journalistique" pour François de Negroni, formule oh combien péjorative dans la bouche de notre passionaria, c'est tout simplement ridicule pour quiconque a lu ses ouvrages (mais même le passage en question). Ouais!
    Colombini

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  18. Anonyme 0555, ne vous montrez pas malhonnête en déformant des propos pourtant prudents et en me prêtant des pensées totalement infondées:

    1)J'ai bien précisé que c'était au vu des seuls extraits donnés par FXR que je percevais l'écriture de F. de Negroni comme "journalistique à tonalité pamphlétaire", ce qui ne me déplaît pas forcément d'ailleurs ( que savez-vous de mes goûts ? ), et non comme une écriture romanesque littéraire.
    2) Et je me suis bien gardée de porter un quelconque jugement de valeur sur un écrivain dont je n'ai lu aucun livre ( ce que j'ai également précisé en PS). Ce serait à mes yeux le comble de la bêtise !

    Quant à savoir si je rends compte des livres ( de ceux de JF, je suppose ?) en étalant MON pathos, vous êtes libre de le penser. Et mes tartines sont grosses, ça je le reconnais volontiers : que voulez-vous, je suis d'une nature généreuse !

    Il ne me semble pas par ailleurs qu'avant d'avoir été reconnu et choyé par l'establishment continental, JF l'ait été par l'establishment insulaire, mais je peux me tromper...

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  19. l'establishment littéraire insulaire? existe-t-il au moins?

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  20. Qu'entend-on par "establishment" ? Un groupe de personnes qui a un monopole du discours sur la littérature (dans les médias, les jurys des prix) ?

    Il me semble qu'on peut trouver au contraire bien des avis différents sur la littérature corse, ce qu'elle est, ses qualités, ce qu'elle devrait être ou faire.

    Si on parle du fait que les prix littéraires corses et les articles de presse n'ont pas souligné l'importance de l'oeuvre de Jérôme Ferrari AVANT qu'elle soit reconnue hors de l'île, il me semble que c'est une vérité.

    Comment l'expliquer ? Phénomène de génération ? Réaction négative à des écrits provocateurs ?

    Une autre question, intéressante selon moi, est celle de l'état actuel du discours sur la littérature corse (ou en Corse). Les prises de parole sont multiples et variées, et jouent chacune leur rôle de mise en valeur, de prescription, d'animation de la littérature. Au lieu d'un establishment, nous avons besoin d'un lieu commun où de réelles discussions puissent s'engager.

    Ce lieu n'existe pas encore, me semble-t-il. Et si c'était le cas, nous aurions pu voir que les livres de JF ont trouvé un grand écho positif parmi les lecteurs de l'île, très vite (mais peut-être que je me fais des idées...).

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