Sous la pression amicale d'un internaute commentateur (voir billet précédent), je cède à la nécessité de faire de la littérature corse avec les Grands de ce monde.
Les mois de juillet et d'août ne me permettront pas d'alimenter ce blog au même rythme que depuis cinq mois, j'en suis bien désolé. Je serai toutefois très attentif à dialoguer avec tous ceux qui laisseront un commentaire ou qui m'enverront leur "récit de lecture" (en corse ou en français) via mon mail personnel (f.renucci@free.fr). Quant aux billets que je placerai cet été, ils auront essentiellement cette forme : un extrait de texte, quelques mots avant et/ou après afin d'évoquer ce texte, très rapidement. Il s'agit pour moi de la quintessence de ce blog : la mise en commun des passages des oeuvres corses qui hantent nos esprits (j'y reviens, ces "fantômes imprécis" dont parle Pierre Bayard).
Je commence ici avec un texte dont je me souviens depuis longtemps, une intervention écrite, une lettre. Celle que Jean-Charles Thomas, (Monseigneur), a envoyée en août 1975, lors des événements d'Aleria, à Valéry Giscard d'Estaing (alors Président de la République française), quand il était lui-même Evêque de l'Eglise de Corse entre 1974 et 1986. On trouve cette lettre intégralement citée dans le livre de Jacques Roi, "Violence ou dissuasion. L'exemple de la Corse", édition Beauchesne, 1986.
Monsieur le Président,
C'est parce que la situation est et apparaît maintenant extrêmement grave que je me permets de vous adresser ces lignes en mon nom personnel et sans titre que celui d'un homme de bonne volonté qui s'efforce de comprendre, aimer et servir la Corse en la parcourant chaque semaine pour qu'elle vive selon l'Evangile de Jésus.
Hier fut tragique ; demain peut l'être encore plus.
Hier, tout est allé très vite ; demain probablement aussi. Chacun s'efforce de mettre en relief les racines profondes du présent. Et elles existent, certes, matérielles, économiques, juridiques, politiques, sociales, et cela depuis des années. Des remèdes sont périodiquement décidés, partiellement appliqués : beaucoup ont trouvé leur place dans la récente charte économique dont la majeure partie de la Corse souhaite la mise en oeuvre complète et sans retard.
Mais, non moins évident, non moins profond et non moins unanime, il existe un problème de psychologie qui touche à l'âme du peuple corse. De ce problème, il faut tenir compte en toute décision. De ce problème, il faut trouver une juste solution.
Pour peu qu'on vive en Corse et avec des Corses, on saisit et comprend que la Corse n'est pas seulement un département français parmi d'autres. Elle l'est. Mais en même temps, et je crois, prioritairement, elle est aussi une autre réalité : une histoire corse, une communauté populaire corse, un style, un ensemble d'aspirations humaines et d'habitudes. Avant d'être département français, la Corse est psychologiquement la CORSE. Il en fut ainsi historiquement : il en est ainsi aujourd'hui : il ne peut en être autrement demain : pas un Corse ne l'accepterait !
Or, de cela qui sous-tend les réactions de chaque habitant de la Corse, il est urgent aussi de tenir compte. Comment ?
Sans doute en innovant dans le style des rapports entre le Gouvernement français et la Corse. Si les décisions importantes doivent être prises d'abord à Paris (et je ne suis pas certain que ce soit toujours la meilleure solution, surtout dans les heures difficiles), elles ne peuvent l'être sans que les Corses ne soient présents et associés largement par les élus locaux, les responsables d'organisation sociaux, professionnels, économiques, etc., de type régional ou départemental et même certains de ceux qui ont pris récemment et à visage découvert, le parti du désespoir dont les conséquences furent dramatiques. A situation exceptionnelle, pourquoi ne pas chercher un remède exceptionnel, imprévu par les textes et inhabituel ? Sans entraver les actions nécessaires et plus lentes de la justice, c'est la dialogue direct, l'appel à ceux qui ont vécu le drame, à ceux qui peuvent aussi parler au nom de leur peuple qui doit être lancé afin qu'ils s'expriment librement, soient entendus et respectés, en toute décision, dans leur identité et leurs aspirations qui ne se réduisent jamais aux domaines matériels et économiques, mais conformément à leur génie et à leur histoire, donneront grande place au psychologique, à l'humain et au communautaire.
Comme tous, je peux me tromper. Avec la plupart, je suis dans la situation de l'homme démuni de moyens pour agir et profondément solidaire de ce que nous vivons actuellement en Corse. Veuillez accueillir ces lignes comme un appel réfléchi, médité, et j'ajoute longuement prié devant Dieu à qui je demande d'aider la Corse, et tous ceux qui veulent la comprendre, l'aimer, la servir, pour qu'elle maîtrise ses tendances trop passionnées et fasse dominer ses aspirations et ses qualités les meilleures.
Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, l'expression de ma très déférente considération et l'assurance de ma prière pour que Dieu vous soit en aide.
Jean-Charles Thomas
Evêque de l'Eglise de Corse
Ce blog est destiné à accueillir des points de vue (les vôtres, les miens) concernant les oeuvres corses et particulièrement la littérature corse (écrite en latin, italien, corse, français, etc.). Vous pouvez signifier des admirations aussi bien que des détestations (toujours courtoisement). Ecrivez-moi : f.renucci@free.fr Pour plus de précisions : voir l'article "Take 1" du 24 janvier 2009 !
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'Ssu Monsignori Thomas, era un tippettu. Piccatu ch'ùn fussi statu più intesu, è più prisenti in Corsica pà a seguita.
RépondreSupprimerMB
Un sò micca s'elli sò intesi i veschi (oghje ghjè Munsignore Brunin chì riagisce faccia à l'assassinii), ma hè veru chì issa lettera pare una parolla misurata è forta. Mi piace a so attitudine : "démuni", "solidaire"...
RépondreSupprimerBella lettera, umana è bè in u rollu ch'ellu duveria avè un "religiosu" per mè. (religere=lià)
RépondreSupprimerDisgraziatamente u putere francese cecu è cioncu da una parte è una certa vuluntà di sceglie " u fucile" ind'è uni pochi di i militanti corsi da l'altra parte si sò rispostu unu à l'altru è i messagi di saviezza si sà ch'elli ùn si sentenu mai in situazione simule...
Sè pigliu u Paese di Galle, per un dettu, chì hà una vera autunumia è a coofficialità di a so lingua, chì vidimu?
- Un Statu (u Reame Unitu) chì ricunnosce a "Nazione" gallese è a specificità di i prublemi di u Paese à parte da l'anni 1950
- Azzione determinate ma "citatine" da a parte di u populu gallesi per uttene i so diritti . Hè cusì chì ancu cù a "Donna di Ferru" Maggy Thatcher, anu uttinutu diritti particulari è una televisione "naziunale" tutta in gallese (15 ore à ghjornu in gallese, fundate nantu à una ecunumia di creazione audiuvisiva è micca antu à a raduzzione di serie americane).
Hè vera chì per l'Irlanda, hè statu propiu un'antra musica...
Bellu esempiu quellu di Paese di Galle, sò d'accordu cùn tè. Ci vole à vede u travagliu bellissimu di a rivista numerica Transcript (era u direttore u Gallese Diarmuid Johnson) :
RépondreSupprimerhttp://www.transcript-review.org/
è quì per un cartulare speciale Literatura gallese :
http://www.transcript-review.org/fr/issue/transcript-14-15--galles-
ed una prisentazione di issu paese da Diarmuid Johnson :
http://www.transcript-review.org/fr/issue/transcript-14-15--galles-/bienvenue-au-pays-de-galles
ed un antru numeru di issa rivista à propositu di issu paese è di i so scrittori :
http://www.transcript-review.org/fr/issue/transcript-4/le-pays-de-galles
è quì, u numeru nant'à a Corsica :
http://www.transcript-review.org/fr/issue/transcript-17--la-corse-