dimanche 18 octobre 2009

Un récit de lecture : Jérôme Ferrari et "Murtoriu"

Voici - merci beaucoup à Jérôme Ferrari - de la littérature corse en train de se faire !...

Il s'agit d'un extrait de la traduction, que J.F. est en train d'écrire, du dernier roman de Marcu Biancarelli, "Murtoriu" (que je n'ai toujours pas lu !).


C'est donc un récit de lecture particulier que nous avons là et qui rejoint les commentaires de Norbert Paganelli quant à sa traduction d'"Hallali" d'Angèle Paoli : voir ici, ici et ici.

Lecture, traduction, commentaire : éléments presque indémélâbles pour tout lecteur de littérature, non ?

Voici donc le récit de lecture (qui comporte un appel à proposer d'autres versions de traduction pour certains passages, avis aux amateurs et aux commentateurs !) :


Voici le texte original de l’extrait de Murtoriu que j’ai choisi et sa traduction :

A so vechja mamma era posta à pusà annantu à u zuddu, piddendu u friscu è appruntendu calchì poru pà fà una suppa. Passendu hà basgiatu i capiddi di a vechja, po’ s’hè infrugnatu in casa è hà presu una vesta. Hà circu in un baullu uni pochi d’affari di militaru ch’iddu t’avia, una mostra in argentu, una midadda, una cultedda, u tabaccu, du’ o trè scartafàcciuli è i pochi solda chì li firmaiani, hà lampatu tuttu st’affari in i bunetti ‘lla vesta. Po’ hè risurtitu cussì sùbitu, ripassendu a mani in i capiddi sciolti di a so mamma. Quidda l’hà fighjulatu senza una parolla, senza u mìnimu quistiunamentu. Dopu hà presu u violu di l’Affaccatoghju, hè ghjuntu à a liccia maiò, è quì si hè firmatu un’ ùltima volta à pusà annantu à u cantonu chì subranaia u pasciali, è da dund’iddu vidia sin’à l’ìsuli è a Sardegna. Avali vidi, vidi i stesi di u cantu ‘llu mari, i stagni infesti, i pochi fumi di i dibbieri. Vidi i chjosa abbandunati è l’arghji chì sò invaditi da i pori salvàtichi. Vidi i casi di u pasciali cù i so balcona chjusi. Vidi u fiumu in ghjò è a passarella ch’hè cascata in acqua. Vidi i costi di Rosumarinu cù ‘ssa machja zippa ch’ùn hà ancu finitu di dirascà. Vidi u violu in ghjò è dui ziteddi scalzi chì voltani nimu sà da induva, i ziteddi affaccani è li passani accantu, li surridini, vidi i so denta neri è i so ochja infribbati, vidi u lutu chì l’affascia da capu à pedi. Ci hè una sarrenda cù trè capri intravati è una sgiucca malata, liata à un àrburi, a sgiucca hè cascata in tarra è ùn si ridrizza più. Vidi a pantaniccia dund’iddi bolani i muschi à u puzzu ‘llu Vispaghju. Vidi i cantunicci russi picciati da l’ùltimi raghji di soli, cù ‘ssi butissi neri chì escini da ugni inzìcula à a malavia. Ci hè un vechju chì marchja zuppicchendu in u pasciali è chì si strascina unu stagnalonu d’acqua. Li pari di veda com’è un fandoniu chì camparia solu è dannatu trà ‘ssi casi curci è disartati è i cantunicci affuchenti. Vidi ‘ssu locu senza distinu, vidi u disertu, vidi ‘ssi stesi invaditi di zinzali è di malatia, è senti i trosta di i cannunati, torra una volta, vidi l’òmini chì coddani à l’assaltu, vidi l’addisperu scemu annantu à i facci, vidi ‘ssu sangu chì schizza da tutti i parti, è si vidi iddu, ghjàcaru di guerra, a sciuma in bucca è l’ochja chì li sò sciuti da u capu, infialzendu à colpi di bainetta, imbrucchendu è strippendu, è senti i moghja di suffrenza, i stridi di scimizia annant’à u campu di battaglia. È senti una campana, in u luntanu, culà in i bassuri, chì sona à murtoriu.

Sa vieille mère était assise sur le seuil, elle prenait le frais en préparant des poireaux pour la soupe. En passant, il a déposé un baiser sur les cheveux de la vieille, et puis il est entré dans la maison et a pris sa veste. Il a ouvert un coffre pour y chercher deux ou trois choses qu’il avait ramenées de la guerre, une montre en argent, une médaille, un couteau, du tabac, deux ou trois mouchoirs et le peu d’argent qu’il lui restait, il a mis tout ça dans ses poches. Et puis il est ressorti aussitôt et il a passé la main dans les cheveux dénouées de sa mère. Elle l’a regardé sans rien dire, sans l’ombre d’une interrogation. Il a tout de suite pris le sentier du belvédère, il est arrivé près du grand chêne et, une dernière fois, il s’est assis là, sur le rocher qui surplombait le hameau et d’où l’on voyait les îles et la Sardaigne. Il voit tout, maintenant, il voit les plaines qui s’étendent vers la mer, les étangs insalubres, les rares fumées qui s’élèvent des tas de mauvaise herbe. Il voit les champs abandonnés et les aires de battage que les poireaux sauvages ont envahies. Il voit les maisons aux fenêtres closes. Il voit la rivière, plus bas, et la passerelle qui s’est effondrée dans l’eau. Il voit les côtes de Rosumarinu avec ce maquis épais qu’il n’a pas encore fini de débroussailler. Il voit deux enfants qui reviennent on ne sait d’où monter par le sentier, les enfants le rejoignent et passent près de lui, ils lui sourient, il voit leurs dents noires et leurs yeux pleins de fièvre, il voit la carapace de crasse qui les recouvre. Il y a un enclos avec trois chèvres entravées et une autre, malade, attachée à un arbre, qui est tombée par terre sans pouvoir se relever. Il voit les mouches voler dans la boue, au puits du Vispaghju. Il voit les rochers rouges qu’éclairent les derniers rayons du soleil, avec les buissons noirs jaillissant de chaque fissure comme une lèpre. Il y a un vieux qui marche dans le hameau et qui traîne un seau d’eau en boitant. Il lui semble voir un fantôme condamné à vivre, damné et solitaire, entre les pauvres maisons désertées et la roche étouffante. Il voit ce lieu sans destin, il voit le désert, il voit ces étendues de terre livrées aux moustiques et à la malaria, et il entend encore une fois gronder les canons, il voit les hommes monter à l’assaut, il voit le désespoir infini sur leurs visages, il voit le sang qui gicle partout, et il se voit lui, chien de guerre, l’écume aux lèvres et les yeux exorbités, avançant à coups de baïonnette, dans les chairs et les entrailles, et il entend les cris de souffrance, les hurlements de folie sur le champ de bataille. Et il entend une cloche, là-bas dans la vallée, qui sonne le glas.


Ce texte est merveilleux. Je suis extrêmement sensible à ce portrait d’un monde rural détruit par la guerre. J’y suis plus que sensible : j’ai le sentiment qu’on me parle de quelque chose dont j’ai fait l’expérience intime et qui s’est effacé de ma mémoire ; j’ai le sentiment que ce texte éveille une réminiscence et rend disponible un savoir que j’avais perdu. Je crois que le secret de la beauté de ces lignes, c’est le sens du détail dont elles témoignent. Il n’est question que de petites choses, des fêlures minuscules dont la convergence suggère l’étendue de la catastrophe. Il ne s’agit plus d’un monde. Ce sont des limbes. Rien n’y est spectaculaire mais tout est exsangue et vaguement menaçant. C’est un tableau de l’enfer qui me semble bien plus touchant et convaincant que s’il y était question de bûchers et de chairs brûlées. C’est un enfer où les hommes ont perdu leur énergie vitale et la force de se plaindre, un enfer silencieux où il revient aux buissons et aux mouches de signaler la présence irréversible du mal. Et c’est étrangement beau.
Les corsophones pourront me reprocher mes infidélités de traduction. La question était : à quoi doit-on rester fidèle ? J’ai voulu être fidèle à l’atmosphère que je viens de décrire et c’était impossible si je me tenais à une traduction plus littérale. Par ailleurs, si quelqu’un a une idée géniale à me proposer pour « i pochi fumi di i dibbieri » ou « cù ‘ssi butissi neri chì escini da ugni inzìcula à a malavia », je vous jure que je suis preneur ! Tous les choix de traduction sont discutables et j’en discuterai ici avec le plus grand plaisir. Il y a tellement de traductions possibles et c’est quand on prend la mesure de ces possibilités qu’on se dit que, vraiment, un texte est un objet infini.

31 commentaires:

  1. "à a malavia" pour moi serait plutôt le sens de " inutilement, en pure perte, pour rien...." (Mais Marcu , lui, doit savoir si cela correspond à ce qu'il veut dire) Je ne sais pas si la lèpre rend cette idée d'inutilité, de ruine, de dérive : c'est une infection, qui est encore une forme de vie biologique active, or il s'agit de ruine, d'abandon, de mort, d'absurdité ...Mais enfin, ce ne sont que des réflexions, car c'est une belle trouvaille en tout cas; je ne me permettrais pas de critiquer la traduction (je n'en ai pas vraiment de pratique).

    On voit bien dans cette seule expression l'image du pays à la dérive, privé de ses forces vives, abandonné, ruiné, et dont le destin semble s'être arrêté, ou être livré désormais au hasard de forces incontrôlées.

    C'est un texte profondément bouleversant, comme tu le dis il met à jour ce que nous ressentons: c'est qu'à partir de ce moment le noir du deuil a commencé à dominer, c'est " la fin de la vie et le début de la survivance" pour plagier le fameux (et falsifié) "discours de Seattle", concernant les Indiens.
    L'intérêt c'est aussi la mise en parallèle avec la déshérence de la société d'aujourd'hui à travers le personnage contemporain du libraire-écrivain, mal dans sa peau et dans son époque, qui porte le même nom que le soldat de la grande guerre "rentré" dans un chez lui qui n'existe plus, ou qu'il voit avec des yeux différents. Le seul "salut" possible, pour les deux, sera le même ...

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  2. C'est un beau texte qui m'évoque certains tableaux de J. Bosch ou de Bruegel l'Ancien par la multitude et la minutie des détails, souvent effrayants, peuplant toute l'épaisseur de l'espace.
    J'aime beaucoup l'effet de contraste entre ce rocher surplombant ( près du ciel)d'où l'on voyait (autrefois) les îles et la Sardaigne et d'où, cette dernière fois, le personnage ne contemple plus qu'un paysage de désolation. Comme une vision prémonitoire.
    A première lecture , je n'étais pas convaincue par la répétition systématique de vidi/il voit que je ressentais comme une rupture m'empêchant, justement, de balayer du regard l'ensemble du panorama. Mais, une fois la succession d'images "infernales" enregistrée, cette répétition me semble résonner plutôt comme une sorte d'incantation maléfique.

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  3. Jérôme Ferrari18 octobre 2009 à 20:24

    Francesca,
    J'espérais un commentaire, alors merci ! Cette histoire de malavia m'a gâché mon après-midi. Dans le contexte, je le comprenais plutôt comme "n'importe comment" "de manière absurde, anarchique" - ce qui est proche de "en pure perte" Etant données nos compétences respectives en corse, je suis sûr que c'est toi qui as raison. Mais le problème de traduction demeure : je n'ai réussi à obtenir en français que des phrases grotesques - ce qui prouve en passant que la prose de Marco n'est en rien un calque du français. Alors j'ai eu cette idée de lèpre, pour parler d'une nature qui, livrée à elle-même, redevient hostile et malfaisante, une nature dont la profusion même est mauvaise parce qu'elle est indomptée. Donc, pour moi, la vie démesurée de la nature est le signe de la mort de l'activité humaine qui n'est plus là pour la maîtriser. Je me rappelle qu'une fille de mon village, quand j'avais vingt ans, était fascinée par la beauté de la plaine orientale, ce qui me paraissait incompréhensible. Et j'ai compris que pour elle, la beauté, c'était la culture, l'ordre imposé à la nature sauvage. Les temps changent.
    Une autre idée me vient. A la mort active du combat, répond la mort sournoise des campagnes désertes, qui en est à la fois l'opposé et la conséquence.
    Pour finir, cette traduction est là pour être critiquée et discutée. Donc permets-toi, Francesca, permets-toi ! Nous sommes entre gens de bonne compagnie et, quand c'est le cas, la critique est souhaitable parce qu'il ne fait pas de doute qu'elle est saine et ne porte que sur ce qui est en question.
    Merci encore.

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  4. C'est effectivement un très beau texte (mais je me souviens qu'il y en a beaucoup d'autres dans le livre). Je l'ai ressenti moi-aussi comme un tableau quand je l'ai lu, dans la mesure où le personnage regarde et est par conséquent plutôt passif, car pour le livre dans son ensemble je le trouve très "cinématographique" (je l'avais déjà dit d'ailleurs sur le forum de Marcu je crois).
    On s'y croirait, sans pour autant que la description ne soit si longue ou pesante.

    Contrairement à E. Caminade, je n'ai pas ressenti de rupture à cause de la répétition (mais peut-être parce qu'en lisant dans ma tête, j'enchaînais les phrases assez vite ?). Pour moi, cette répétition replace le personage au centre de son monde et elle nous dit ce qu'il pense en voyant tout ça : il aurait pu avoir le même spectacle sous les yeux sans rien en retenir, ou en relevant d'autres faits. Là on sait ce qui retient son attention.
    J'aime beaucoup aussi le parallèle avec la guerre de 14-18 qui se fait jour peu à peu au fil du livre.

    Pour moi la traduction de Jérôme Ferrari produit le même effet et suscite le même sentiment que le texte original, ce qui est à mes yeux l'essentiel d'une traduction littéraire.
    Et l'on ne voit nullement qu'il s'agit d'un texte traduit, il pourrait très bien s'agir d'un texte écrit directement en français.

    Eiustessu

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  5. La notion d'absurdité est présente aussi dans cette expression "à a malavia". Ta vision me semble la bonne, c'est exactement cela, tout redevient sauvage, incontôlé, hostile, du fait de la faiblesse de la présence humaine (d'où l'idée de maladie, cela pourrait être un cancer, mais lèpre sonne mieux!). Je ne vois pas mieux à proposer...C'est vrai, cette image de mort lente, passive, qui renvoie à la fin du texte à la mort au combat...Et à la mort intérieure de celui qui a connu l'horreur, qui a dû se transformer en tueur sans pitié(la cruauté est décrite sans concession dans une scène hallucinante, à la Cormac Mac Carthy : c'est pourquoi dans le passage "infialzendu (...), strippendu, etc... j'irais plus carrément dans la traduction, tu es elliptique, tu adoucis presque, tu embellis).

    Peut-être que c'est cette mort intérieure du personnage qui colore tout le reste de mort, car il ne voit peut-être plus la vie qui existe encore (dans le sourire des enfants, il ne voit que les dents noires...)


    On touche du doigt les affres du traducteur et on apprécie mieux ce travail que tu as déjà réalisé sur les ouvrages précédents...J'avoue ne pas lire la traduction en général mais le peu que j'ai vu me semble très fidèle, moi aussi je pense que le plus important est de rendre l'atmosphère, de transposer le style et non de "coller" au texte.

    "dibbiera" c'est l'écobuage, (la fumée de rares écobuages?) : il s'agit plutôt de brûler les terrains pour les préparer à la culture que de brûler des tas de mauvaises herbes après démaquisage, non?

    le "hameau" indique-t-il assez qu'il s'agit du lieu où se trouvent les bergeries et les cabanes saisonnières, mais bon, je n'ai "pas mieux", peut-être "Aux bergeries". À un autre passage, tu l'as carrément sauté le "pasciaii"...(i casi di u pasciali, les maisons de bergers ?)

    Heu... devant la difficulté de la tâche tout ce que j'ai à dire, en définitive, c'est BRAVO et bon courage!!

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  6. Un commentaire de Norbert Paganelli :

    Pour répondre à la sollicitation de Jérome, voici une tentative...

    "Il voit les chaos de granit rougoyants, brûlés par les derniers rayons de soleil,avec ces enchevêtrements de buissons noirs qui poussent, tant bien que mal, dans chaque entaille"

    le texte est effectivement empreint d'une gravité rustique que la description du lieu vient renforcer. personnelemnt je ne m'éatis jamais poser la question de la traduction de " à malavia" que j'emploie sans aucune difficulté, en particulier dans "campa à malavia"...ce qui me semble pouvoir se rendre par "tant bien que mal".
    19 octobre 2009 18:22

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  7. Jérôme Ferrari19 octobre 2009 à 20:01

    Merci à Norbert Paganelli ; l'écart entre des traductions également possibles et fidèles est un vrai régal - et c'est pourquoi j'aime beaucoup lire des traductions différentes d'auteurs étrangers.
    J'ai discuté ce matin même avec Paul Desanti devant le Fesch (à l'inter-cours, bien sûr, nous sommes des fonctionnaires consciencieux !) de ce damné "malavia." Paul y voyait plutôt une histoire de mauvaise pente. Personne ne le rend de la même manière en français alors que tout le monde, bien sûr, l'emploie en corse à bon escient et sans problème. La raison me paraît simple : il n'y a pas de correspondant exact en français. Il faut donc décider, plus ou moins arbitrairement, en fonction du contexte. D'autant que, le terme étant appliqué à des plantes sauvages, il me semble que nous avons affaire à une métaphore.
    @ Francesca : "écobuage", très fidèle, m'a semblé impossible. Il y a ce que ça dit et aussi ce que ça connote. C'est un mot affreusement technique. Toujours la question de la fidélité. Fidélité à quoi ? Pour la violence de l'assaut, je vais effectivement essayer de trouver quelque chose de plus brutal.
    @Emmanuelle : Bonjour ! Et je suis très heureux que vous puissiez profiter du texte en corse.

    A tous : n'hésitez pas à m'envoyer d'autres suggestions. Je trouve la traduction littéraire vraiment passionnante… et avec un peu de chance, je vais réussir à vous faire faire le boulot en ligne et à ma place !

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  8. bonsoir , si vous permettez quelques mots sur ce texte.
    quel contraste entre l'apparente quietude du récit, construit comme " le dormeur du val" , et la dureté de l'évocation . ces mots qui instaure un lancinant mal etre , qui vous prennent aux tripes.
    quelle force que ce texte porte en soi.
    et ce "vidi" , récurent, qui énonce , enumère . ce "il voit" qui pointe en fait tout ce qui a disparu, qui n'est plus , qui fait le lien entre ce qui était, ce présent glauque comme un champ de bataille un lendemain d'assaut , et ces souvenirs qui l'assaillent brutalement dans une rupture. a rumpitura cher à marcu .
    beaucoup de chair dans ce texte.
    une remarque sémantique sur la traduction, magnifique aussi et qui a su rendre tout l'esprit du texte : je rejoins norbert paganelli pour"tant bien que mal" , meme ces buisson malingre ont du mal à survivre ,ce qui rajoute à l'état d'abandon et de dénuement . neanmoins le terme de "lepre" ne trahit pas à mon sens
    par ailleurs "scartafacciuli " signifient plus "papiers" que "mouchoirs"
    un regret que , comme dit francesca , tu edulcores un peu les termes tres fort de "infialzendu" strippendu" imbrucchendu".
    voila en quelques lignes mes impressions sur ce texte que j'ai mis en parallèle avec ce documentaire de fr3 " vint'anni sottu terra" ou l'on voit des vieux paisibles , calmes , raconter les horreurs de la guerre.

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  9. Je devrais fermer ma gueule et attendre la fin du travail pour la ramener, mais puisque l'extrait est publique je n'y tiens plus : superbe traduction o Jérôme. J'en ai eu la chair de poule en lisant la version française. Pour moi il y a là un excellent parti pris et lorsque c'est inévitable, voir même lorsque le rendu en mot à mot en français est possible mais pas aussi fort qu'en corse, il ne faut pas hésiter une seconde à s'éloigner à bonne distance du texte original.

    Détails techniques : écobuage est évidemment à banir et la solution de Jérôme me convient bien.

    Pasciali : chez nous il s'agit bien du hameau, et pas de quelque chose qui se rattache aux bergeries (stabbia). à pascia ùn ci sò micca chè i capri o i pecuri, i vacchi dinò pascini,è u pasciali hè simpliciamenti u paisolu di i campagnoli, for di paesu.

    I costi di Rosumarinu : quand tu m'as demandé au téléphone, Jérôme, j'étais un peu ailleurs, et je n'avais pas le texte original en tête. Pour moi "i costi" c'est pas les "côtes" dans le sens de "bord de mer", mais plutôt les "pentes" ou les "versants". Même si Rosumarinu est bien censé être en bord de mer.

    Malavia : lèpre. Excellent ! C'est exactement là où pour moi il est démontré la nécessité d'avoir un traducteur qui soit en même temps un auteur.

    Bon, je me retire parce que je veux surtout pas influer sur votre débat. ça me passionne d'y assiter en spectateur, vraiment.

    MB

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  10. Ah oui, scartafacciuli c'est des papiers bien sûr.

    MB

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  11. bonsoir, permettez moi quelques mots sur ce texte.
    quel contraste entre l'apparente quietude du récit, construit comme "le dormeur du val" et la dureté qu'il sous tend .
    s'installe ,lancinant , un mal etre qui vous prend aus tripes .
    impression renforcé encore par la récurence du "vidi".
    ce "il voit" qui énonce ,énumère , mais qui point en fait ce qui a été et qui n'est plus.
    ce "il voit" qui fait le lien entre un passé disparu, un présent glauque comme un champ de bataille un lendemain d'assaut, et la rupture de ses souvenirs qui l'assaillent .
    la rupture , a rumpitura si chere a marcu biancarelli.
    ce texte me renvoie à un reportage de fr3 "vint'anni sottu terra" ou l'on voit des vieux calmes , placides , raconter les horreurs de la guerre de 14-18.
    la force de ce texte réside dans la méticulosité de "l'inventaire" , un descriptif précis , réaliste qui, par contraste encore, installe avec un fort pouvoir suggestif l'atmosphere qui transpire , suinte et nous envahit.

    quelques sémantiques remarques:
    scartafacciuli tiennent plus de "papiers " (lettres....) que de mouchoirs
    je rejoins norbert paganelli sur le " tant bien que mal" qui illustre la décrépitude de l'endroit puisque meme des buissons malingres ont du mal à y survivre.
    le terme de lepre me semble impropre employé comme il est. néanmoins on dit bien par exemple "une façade lepreuse.
    le "écobuage " bien que juste est effectivement trop technique et presque anachronique;
    un regret, comme a dit francesca ,que les termes de "infialzendu" "imbrucchendu" et "strippendu " aient été edulcorés par la traduction.

    vraiment un texte superbe que la traduction n'a pas altéré et lui a gardé sa force.
    j'espere avoir contribuer à nourrir un peu la reflexion

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  12. Jérôme Ferrari19 octobre 2009 à 22:31

    Je ne suis pas d'accord avec zirlafiara : scartaffaciuli ne "signifie pas plus" papiers que mouchoirs comme vous le prétendez ! ça signifie carrément papiers et pas du tout mouchoir ! Mais merci pour l'élégance de la formulation. François-Xavier, peux-tu corriger s'il te plaît ? Pour Rosamarinu, il faut que je réfléchisse encore à une bonne formulation.
    Pour les verbes "imbruccà" et "strippà", le problème est encore que leurs correspondants français sont hideux et, dans le contexte, à mon sens, grotesques, vulgaires, presque comiques. C'est tout ce halo invisible que traînent les mots autour d'eux et qui varie terriblement d'une langue à l'autre qu'il faut prendre en compte.
    Merci pour ton appréciation, Marco. Merci à tous. Je le répète, c'est vraiment intéressant de discuter de tout ça.

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  13. Zirlafiara,
    j'ai publié vos deux messages, bien que quasiment similaires (vous deviez penser que le premier message ne m'était pas parvenu ?). Merci de ces envois, qui contribuent effectivement à la réflexion.
    A bientôt.

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  14. D'accord qu'écobuage est affreux comme mot,et je comprends que Jérôme ne l'utilise pas, mais il n'est pas anachronique, ce seraient plutôt les tas d'herbes sèches qui le seraient car à l'époque, il s'agissait bien, il me semble, de défricher les terrains par le feu et de les fertiliser par la même occasion, ce qu'on appelle aussi "brûlis" ou "brûlage" ...Aujourd'hui, c'est par erreur que l'on parle d'écobuage pour le brûlage de tas d'herbes après débroussaillement à la débroussailleuse -))
    Mais cela n'empêche pas que Jérôme se bat pour "rendre" quelque chose d'authentique et de beau , et qu'il trouve les solutions. Si de plus elles conviennent à l'auteur (ce qui me paraît essentiel), que demande le peuple? LOL

    Enfin, méfions-nous toujours et encore de la polynomie (pasciale/i ne semble pas avoir exactement le même sens au Nord et au Sud, ou bien c'est moi qui me trompais)
    Ici, je dois vous livrer un sentiment personnel peut-être absurde : le mot "hameau" me paraît abstrait, "étranger" dans le contexte corse, ce mot ne me parle pas, ne me donne pas d'image. Presque je garderais "pasciali" tel quel en italique...J'avais eu ce même sentiment d'étrangeté dans une traduction de Stremu meridianu, je crois, "elles sentent le hameau"...Mais enfin, je sais, poser des problèmes ne sert à rien si on ne trouve pas la solution alors tant pis, va pour hameau...

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  15. Jérôme Ferrari20 octobre 2009 à 07:28

    Francesca,
    Si anachronisme il y a, il faut effectivement trouver une autre solution. Aurais-tu la gentillesse de me confirmer que ton intuition est juste ? Je ne sais pas où trouver le renseignement.
    Pour "hameau", je partage ce sentiment, je sens moi aussi le décalage (il y a pire : "bourg" ou "bourgade" par exemple. Mais je veux absolument traduire. Garder le mot en corse, c'est vraiment la dernière des dernières extrémités et c'est toujours un constat d'échec. Surtout dans une traduction du corse : ça régionalise le texte, ça compromet sa dignité, pour des raisons purement sociolinguistiques, et je veux l'éviter à tout prix.

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  16. Tout ce que je peux dire c'est: merci, Jérome, marcu, pour ce "post" qui nous permet d'appréhender la difficulté et l'art de la traduction.
    On peut facilement s'en apercevoir en lisant les textes originaux de Camilleri et en comparant les différents traducteurs... et leurs partis pris...
    si j'avais du traduire murtoriu j'aurai écrit : "anarchiquement" ou "de manière desordonnée" pour les buissons. Inveci chì a traduzzione "lèpre" schiatta cum'è un'evidenza !
    je pense aussi que parfois le mot corse quand il n'a pas de traduction exacte en français ou renvoit à une réalité qui n'est pas notre, peut être gardé: pasciali, par exemple: ce n'est ni vraiment un hameau, ni une ferme (au sens français du terme: ensemble de batiments agricoles d'une seule famille)ni en l'occurence une bergerie... Mais c'est pour appuyer mon propos que je le cite, et non pour cet exemple particulier.
    JPA

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  17. Je comprends ce que dit Francesca pour "hameau", mais le problème posé n'est pas ici celui du mot à mon sens, mais de la langue tout simplement. Il est évident que les réalités sociologiques de la Corse rurale d'avant 14 auront toujours du mal à correspondre en tout avec une langue qui ne les a pas portées. Donc on est bien obligé d'accepter que la littérature est d'abord littérature, et pas forcément fidèle en tout à l'anthropologie. Donc on peut tourner et virer, la notion en français qui me parait tout de même la plus proche de "pasciali", dans le sud de la Corse, c'est bien "hameau", même si le mot ne plait pas forcément.

    Mais on peut en parler à l'infini, et tout le monde aura raison, non ? Le mieux est peut-être de ne jamais traduire un texte, mais alors très vite on va se retrouver dans les débats sur identitarisme et enfermement. Mais non, je blague (putain on peut plus rien dire !).

    Ah pour "dibbià", je suis pas sûr qu'il s'agisse particulièrement de nettoyage par brûlis. On brûle bien sûr, mais après avoir coupé ou arraché. En fait je vois pas trop la différence entre "dibbià", "dirascà", "smachjà", "sfrascunà", etc. Tout ça me semble relever plus ou moins de la même activité, qui est particulièrement chiante. Et puis je l'ai fait suffisamment pour pouvoir la ramener sur ces épineuses questions de débroussaillages (vous avez remarqué la finesse de la tournure ? Hummm...).

    Oui, quoi d'autre ? Il me semble que le brûlage d'un morceau de terrain ça n'est pas "a dibbiera" mais "a rimunita". Voilà pour le dictionnaire encyclopédique des pratiques agricoles de la Vallée du Tradizzonu au XIVème siècle. D'autres questions ?

    MB

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  18. Veuillez me pardonner d'avoir envoyée une note emplie de fautes d'orthographe ma m'hè scappata di mani...
    Pour le treme de pasciali j'ai curieusement rencontré la difficulté cet été car une tante ne connaissait pas le terme. je lui ai donc dit spontanément : "c'est un hameau"...Sauf que le soir même je me suis ravisé car du côté de Sartène on emploie plus facilement "poghju" pour désigner un hameau et que le terme qui nous intrigue posède, à mon sens , un petit côté négatif..."Mi mi u to pasciali " Sous entendu : "Ton lieu paumé, ton trou...." Alors que "poghju ne me semble pas avoir cette connotation un peu dévalorisante. Par ailleurs, et vérification faite, il me semble qu'il y aurait peut-être deux termes voisins mais qui ne s'orthographient de la même manière. Pasciali(e) dont l'étymologie nous renvoie à "paître"et qui se prononce "pachali" et paciali qui pourrait provenir de paci (paix), qui se prononce "patchali" et qui indiquerait un endroit vraiment perdu. c'est une simple supposition....

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  19. (pour chercher la petite bête, tant pis JF fallait pas nous lancer sur ces pistes, tu connais les femmes, toujours les détails ...)

    En définitive, les tas d'herbes sèches me gênent peut-être parce que de là où il est, il n'est pas censé en avoir la vision fine, et si on se réfère à la "beauté" c'est moins beau que "dibbieri" (pour l'anachronisme seul un spécialiste pourrait confirmer mon intuition, d'ailleurs Marcu a raison peu importe, on n'est pas dans l'anthropologie, je répondais seulement à une remarque de Zirlafiara)
    Pourquoi ne pas parler de "brûlages" qui recouvrent les deux possibilités ... tiens, "rimunita", connais pas, un nouveau mot dans mon classeur polynomique (à moins que ce ne soit de l'ignorance de ma propre variété) LOL

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  20. Comme j'ai l'impression qu'un message a sauté je vais essayer de redire ce que j'y disais :

    Ce débat est très intéressant, merci à Jérôme de l'avoir suscité et à Marcu d'y participer, même si nous ne sommes pas toujours à la hauteur -))Il nous éclaire sur la difficulté de l'art de la traduction littéraire:

    1/ La Fidélité : à quoi , demande Jérôme (tout en y répondant). Il privilégie le sens, la symbolique, l'âme du texte, sa cohérence, plutôt que le littéral : je suppose que c'est ce que fait tout bon traducteur littéraire.

    2 / La dimension esthétique : Marcu l'a fait remarquer, JF est un auteur, c'est une chance (peut-être une nécessité?). Ainsi il "recrée" avec son art d'écrivain en français, de là l'émotion de Marcu qui en fait redécouvre son oeuvre parce qu'il y a une nouvelle oeuvre, vraie/fausse jumelle de la première...Alors, on revient à la fidélité : la traduction doit parfois choisir entre être belle et fidèle, en "collant" trop elle trahit plus qu'en s'éloignant, lorsqu'elle trahit l'esthétique, le style

    3/ La transposition : nous, qui ne sommes pas le public-cible, nous devons accepter la transposition dans le contexte culturel français (ou autre)
    M'en fous, je lis pas la traduction française LOL

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  21. Cet extrait est à rapprocher du très beau film du jeune réalisateur Corse dont on parle trop peu , Gabriel le Bomin, original et inclassable pour moi, qui traite des traumatismes psychiques de la guerre :
    "Les fragments d'Antonin" : Antonin n'est indemne que physiquement après son retour de la Grande Guerre, il est brisé par ce qu'il a vécu, il souffre de troubles obsessionnels (cinq prénoms, cinq gestes, cinq événements) : il est hanté!

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  22. L'extrait choisi contient, par "le sens du détail" la force de fairesentir "l'irrésistible présence [du mal] (cf JF)".

    Effectivement il y a une deux principales forces dans ce texte.

    Et l'une porte l'autre.

    La première force, c'est la transmission du jaillissement du "il y a" (cf de l'Existence à l'existant, E.Levinas)

    Cette force se déploie par le recours aux détails.
    Et c'est en ce que le détail est un élément circonscrit qu'il permet un dépassement, vers l'universel.

    De la même manière qu'au théâtre, le véritable acteur ne touche pas à l'universel en reproduisant une situation telle qu'on se l'imagine, mais en revivant un moment privé, donc qui lui est singulier.

    Le moment privé, c'est ce que Lee Strasberg, transmet à l'actors studio. C'est en puisant dans ce qu'un individu a de plus singulier dans le vécu d'une situation, qu'on parvient à faire ressentir au public l'universalité d'un vécu particulier.

    Le présent extrait déploie une double force.

    La première c'est donc la force du "il y a", l'irréductible présence, la seconde, portée par la première, c'est la notion de valorisation de notre patrimoine immatériel.

    Sur la difficulté et les implications d'une bonne traduction, je rejoins Francesca, c'est d'ailleurs en ce sens que le traducteur se voit certaines fois reconnaître un statut de co-auteur.

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  23. Pour poursuivre sur le sens du détail, cet extrait me fait aussi penser à la lettre Lord Chandos, de Hugo Von Hofmannsthal.
    Le sens du détail qui mène à l'irréductible présence, au "il y a" :

    « Un arrosoir, une herse abandonnée dans les champs, un chien au soleil, un pauvre cimetière, un estropié, une petite maison de paysan, peuvent devenir les réceptacles de la révélation.

    Tous ces objets et mille autres semblables, sur lesquels l’oeil glisse habituellement avec une indifférence qui va de soi, peuvent subitement, à un moment que je ne saurais mesurer, se marquer pour moi d’une empreinte si auguste et si touchante, que tous les mots me paraissent trop pauvres pour l’exprimer. »

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  24. Merci à tous (Francesca, Zirlafiara, Emmanuelle, Jérôme, Marcu, Norbert, JPA, MSM et les autres qui viendront) pour cette discussion.

    Je trouve que c'est un plaisir vertigineux de voir combien quelques mots, patiemment assemblés, patiemment traduits, patiemment discutés, peuvent être la matière de nos imaginaires.


    la référence à Lee Strasberg me fait penser qu'il faudra bien un jour que les grands textes de la littérature corse se fassent aussi connaître par des adaptations cinématographiques...

    Pour (ne pas) terminer, je reprends ici les termes d'un mail que j'avais envoyé à Jérôme Ferrari :

    "Jérôme, merci infiniment pour cet envoi, je l'ai trouvé très beau et
    passionnant. (Maintenant me revient en mémoire, en écho au texte de MB, le début
    de "Dans le secret" : ce cauchemar de sang qui gicle dans la terre ; et la
    "glèbe saignante" dont parle Anne-Xavier Albertini dans "Le bar à tisanes"... ;
    voilà une figure de notre imaginaire : la terre gorgée de sang)".

    Histoire de finir dans la joie !

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  25. Oui les adaptations des oeuvres de notre littérature au cinéma viendront, c'est dans l'ordre des choses.

    La langue véhicule de création, la langue véhicule de transmission, l'adaptation comme forme de création, c'est avec toutes ces données qu'il faut composer.

    Je pense qu'il est aussi essentiel, du point de vue de la liberté culturelle de l'individu, de lui laisser le choix de pouvoir regarder un film dans la langue de son choix, y compris si ce film n'émane pas d'une création dans cette langue mais d'une adaptation.

    En ce sens, j'ai obtenu l'accord de plusieurs cinéastes pour traduire et duffuser leurs oeuvres en langue dite minoritaire.

    S'agit-il du moins offrant?

    Non, il s'agit de respecter l'article 6 de la déclaration de l'UNESCO (voir ci-dessous et permettre une production équitable)

    Adapter les oeuvres de la littérature corse au cinéma?
    Sans doute, ce n'est pas une logique antagoniste à la première démarche, c'est son corrélat.

    La langue, support et véhicule de création :

    Les oeuvres de notre littérature, adaptées au cinéma s'exporteront, dans d'autres langues, mais également dans la nôtre, présente dans chaque DVD.

    Ci-dessous la production équitable, lancée dans les mêmes temps que le concept du cinémantiel (contraction du cinéma et de l'évènementiel) par ma société.

    La production équitable

    Votre soutien est essentiel. Vous seuls pouvez permettre une autre voie d’expression, une autre voie de production. Vous seuls pouvez lier le cinéma au surgissement d’un évènement.

    Cet évènement, quel est-il ?

    Une production équitable, c’est-à-dire conforme à l’article 6 de la déclaration de l’UNESCO relative à la diversité culturelle.

    « Tout en assurant la libre circulation des idées par le mot et par l'image, il faut veiller à ce que toutes les cultures puissent s'exprimer et se faire connaître. La liberté d'expression, le pluralisme des médias, le multilinguisme, l'égalité d'accès aux expressions artistiques, la possibilité, pour toutes les cultures, d'être présentes dans les moyens d'expression et de diffusion, sont les garants de la diversité culturelle. »

    Nous avons choisi d’agir en faveur d’une production équitable.

    Grâce à votre soutien, nous pourrons développer l’employabilité locale.

    Vous permettez, par votre soutien, la création d’emplois :

    -Traduction
    -Doublage (acteurs, techniciens)

    Vous permettez, par votre parrainage, la pratique d’une langue.

    La difficulté des langues minoritaires est double, l’usage en a été perdu et les anciennes générations ne maîtrisent pas toujours ce qu’elles souhaiteraient transmettre à leur descendance
    Les conditions de diffusion font défaut, ce qui réduit leur apprentissage.

    -La version que vous aurez permise sera diffusée sur DVD, sur tous les territoires.

    Vous permettez un souffle nouveau aux économies locales

    -Les créations émanant de « minorités culturelles » pourront inversement être adaptées, traduites et s’exporter.

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  26. MSM,
    merci pour ce commentaire.
    Peut-être que pour la clarté de votre propos, il faut que je signale que vous dirigez une entreprise de financement de films, "Prêt à tourner". Il y a une part commerciale dans votre description qui gagne à être explicite (quand vous dites "vous", il s'agit bien d'un futur client ?)
    Pourriez-vous nous indiquer plus précisément quels sont ces films qui ont été post-synchonisés en langues minoritaires ?
    Encore merci de faire état de votre expérience et de votre initiative.

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  27. Nous développons la première place virtuelle de l'entertainment qui agrège tous les services de financement, c'est la virtualisation des places de négociation des marchés des films, présents dans chaque festival.

    Nous avons donc un service Tax Shelter en Belgique qui permet à chaque société ou entité, implantée en Belgique d'investir jusqu'à 50% de son impôt sur les sociétés en investissant dans un film

    Nous développons entre autre de l'intermédiation pour du mécénat, du sponsoring, mais également du crowdfunding qui désigne le soutien des internautes.

    L'économie du cinéma ayant ceci de particulier que le cinéma est un "bien d'expérience" (cf Karpik l'économie des singularités) nous nous avons un positionnement très différent des actuelles plateformes qui parlent d'investissement et de retour sur investissement tablant sans doute sur une connaissance approximative des internautes, mais c'est un autre débat.

    Rien ne garantit un retour sur investissement au cinéma. Aucun producteur ne peut vous affirmer le contraire. Un nouveau film est toujours une nouvelle aventure, avec ses surprises et ses risques.

    C'est pourquoi nous choisissons de privilégier l'investissement de compétences.

    Nous tablons sur la rencontre. Les internautes qui soutiennent les films intègrent un club où ils sont amenés à rencontrer les équipes de films autour de soirées, de week end)

    Ils contribuent à la période la plus risquée et fragile de la période de production : le développement qui inclut la phase d'écriture, de traduction, de négociation et représentation dans les festivals et marchés du film.

    C'est notre concept : le cinémantiel : financement de la phase de développement par l'organisation d'évènements.

    Pour le détail des films en cours...step by step ou un temps pour tout comme le veut l'ecclesiastique.

    Nous communiquerons prochainement dessus.
    Je peux juste vous dire qu'il y aura 2 films de nationalité anglaise, un film de nationalité marocaine, un film de nationalité française, un film de nationalité espagnole.

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  28. MSM,
    merci encore de ces précisions.
    Je pense maintenant que vos prochains commentaires sur ce blog reviendront vers le sujet qui nous occupe : la littérature corse (et d'autres arts, certes). Les internautes intéressés par votre proposition auront tout loisir d'en discuter avec vous sur votre site "Prêt à tourner.com".
    Et surtout ne vous froissez pas à cause de ma réponse ; il s'agit simplement pour moi de trouver un équilibre entre ce qui peut intéresser à la fois le sujet et les lecteurs de ce blog et les sujets annexes, limitrophes, voire hors-sujet.
    Merci encore et à bientôt.

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  29. Oui bien sûr.
    C'est en ce sens que je n'avais d'ailleurs pas, de mon fait, cité le site en question.
    A bientôt

    msm

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  30. Vous m'aviez demandé une précision.
    Il est clair qu'en lieu et place d'une précision, j'ai insisté sur un autre point, sans en expliciter la transition.
    Je vais donc m'attacher à une plus grande clarté.

    Derrière votre revendication de littérature corse, il y a 3 axes sous jacents :

    -la création (support linguistique, le style)

    -la diffusion (les moyens associés)

    -la représentativité (l'image associée à la création corse, indissociable de l'image associée à la Corse en Général, et c'est sur ce point fondamental qu'il est possible et nécessaire d'agir, sans isoler les disciplines)

    Et c'est sur ce dernier point qu'est le plus fortement concentré le problème.

    Le cinéma en tant que Média et l'édition en tant que réseau de distribution sont mis en en parallèle, sur la question de la représentativité, en tant que modede diffusion.

    Parler de cinéma, dans le cas qui nous occupe, ne revient nullement à s'éloigner du sujet qui est celui d'une littérature corse.

    Cela revient à recentrer le sujet sur la représentativité de la Corse à travers sa littérature, et inversement, l'absence ou le défaut de représentativité de sa littérature "à cause" de l'image qui est associée à la Corse.

    Il ne s'agit pas de divaguer sur la culture en général, mais bien de comprendre l'implication sous-jacente.

    Au plan juridique, films et livres, sont "des oeuvres de l'esprit".
    Au plan économique, film et livres sont des "biens singuliers"

    Qu'est-ce que cela signifie?

    Tout simplement que la question de la représentativité tient à celle de l'équité, au sens aristotélicien.

    La question qui nous occupe, est celle d'une équité en terme de diffusion, au plan médiatique, au plan de la distribution, au plan de la visibilité.

    En ce sens Rawls n'est pas inutile.

    Votre questionnement est indissociable de l'économie ou de la politique. (Qu'est-ce qu'une idée déconnectée de l'action? C'est une pathologie contemporaine de dissocier les deux. "La philosophie commence vraiment quand on a refermé ses livres" dixit Patrice Laurau) Que l'on songe à Jaurès ou à Blum).

    L'action politique devrait précisément établir des mécanismes correcteurs en vue d'une équité en terme de visibilité dans un monde idéal.

    Si tel n'est pas le cas, c'est bien le rôle du citoyen et de l'entrepreneur d'innover en vue de sa réalisation (cf Arendt).

    Le reste "n'est que littérature" (rire)

    Et pour la présentation des profils :
    "Nous avons pour incommensurable handicap" d'être 3 littéraires, tournés vers l'action. Mon associé est Normalien de la rue d'ULM et diplômé d'un MBA, notre directrice éditoriale est éditée chez Actes Sud et elle-même lectrice chez XO éditions...nous aimons certes la littrature, mais ce qui nous intéresse ce n'est pas de cloisonner les disciplines mais d'AGIR pour une équité effective et non théorique.

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  31. MSM,
    tout à fait d'accord avec vous sur la nécessité d'unir la réflexion et l'action, ainsi que les arts.

    Je conçois ce blog (comme les autres lieux numériques et papiers) comme un acte dont on doit attendre des effets concrets (certes insuffisants).

    Ce qui m'intéresse c'est d'inclure le mieux possible les "récepteurs" (entendus au sens d'"amateurs" comme chez Bernard Stiegler) dans les processus que vous appelez "diffusion" et "représentativité". Mais tous les acteurs de la chaîne des oeuvres sont importants.

    Bon courage pour la suite ! A bientôt et encore merci pour cette poursuite du dialogue.

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