mardi 22 juin 2010

Un récit de lecture : Emmanuelle Caminade et Joël Bastard

Alors, ça y est, la nouvelle tant attendue vient de tomber sur tous les telex, le monde entier bruisse de cette information qui va bouleverser nos façons de penser, notre avenir, le sens même de la vie humaine :

Emmanuelle Caminade - c'est-à-dire, une lectrice de littérature corse parmi les plus vivaces (voir son blog - L'or des livres - où vous trouverez des notes de lecture précises, enrichies d'extraits sur de nombreux auteurs, notamment corses) - Emmanuelle Caminade est de retour, et elle n'est pas contente.

Et elle l'écrit ! Et elle compte sur moi pour propager les ondes de sa saine colère ! Et elle sait combien je fais tout ce qu'on me demande de faire !

Eh bien, pour vous ce soir, en exclusivité, avant tous les autres blogs et sites littéraires corses, Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, voici de nouveau parmi nouououououous, le criiiiiiiiii du coeuoeuoeuoeuoeuoeuoeuoeuoeuoeurrrrrrrrrrrrrrrr d'Emmanueeeeeeeeeeeeeellllllllle !

(Merci infiniment à elle !)


Je reviens pour parler Littérature et plus particulièrement Poésie avec Casaluna de Joël Bastard (qui mérite bien ses majuscules !)
Je sais, François, que tu es d'une curiosité insatiable et t'intéresses à toutes les littératures relevant de l'imaginaire corse (c'est une constatation, pas une critique !)

Alors j'attaque franco - ce qui ne relève nullement chez moi de l'agressivité :
Pourquoi n'y a-t-il sur ce blog aucun billet consacré à Casaluna ?
Parce qu'il est publié chez Gallimard ? Parce que Joël Bastard ne vit pas en Corse mais dans le Jura ou qu'il n'est corse que par sa mère ? Parce qu'il a trop de talent et pourrait faire de l'ombre ? Parce que sa gueule ne te revient pas ?
Je ne sais pas trop quelle raison idiote inventer pour expliquer cette absence inexcusable !
Car Malko Nimu t'as cité ce poète dans un commentaire de février et tu t'es déclaré curieux de le découvrir, car, surtout, je t'ai prêté ce recueil fin mai et que, vraiment, il est rapide à feuilleter...
Si tu l'as regardé et que tu n'as pas été accroché, pourquoi ne pas émettre une critique négative, toi qui les appelles sans cesse de tes voeux ?
Sinon, où est passée ta curiosité ?

Je me contente de citer un très court poème qui m'enchante, laissant aux amateurs de poésie, nombreux sur ce site, le soin d'en proposer d'autres (Malko Nimu, si vous ne voulez pas qu'on continue à s'ennuyer sur ce blog, il faut aussi y mettre du vôtre ! )

p. 87


Les mains calleuses du berger sous le jet d'une
fontaine. Bol de grès pour un sein d'eau claire.
Le poids renouvelé de l'absence à porter en
bouche. La fraîcheur du manque.



J'aime cette langue précise, concise, travaillée, certes, mais pour atteindre la simplicité de l'épure. Elle fait jaillir, avec une belle économie de moyens, une succession d'images et de sensations. Lumineuse nostalgie.


Pour prolonger cet écho de "Casaluna", voir ici le billet d'Emmanuelle Caminade sur son propre blog (avec cinq autres extraits et un commentaire !).

5 commentaires:

  1. Je ne suis pas aussi obéissant que F.X, mais lire Mlle Caminade (quel beau caractère !) par ici c'est un vrai plaisir, je vais donc me plier à son injonction amicale avec un passage, pris au hasard, du "Sentiment du lièvre" :

    "Certains arbres ne disent rien de la pluie qu'ils reçoivent. C'est une affaire de peaux !

    Les aangliers retournent les champignons sans vergogne. Je dois à mon grand-père qui parlait peu le français quelques vieux mots de cette langue qui passaient mieux accompagnés d'une régalade de cordial et d'un morceau de ficatellu.
    A la revoyure ! Nous disait-il à la fin de l'été.

    Hier un pas dans mon dos, comme ce virage qui passe en me lavant du monde. Chaque jour que je le veux, je viens là et je suis seul avec mes extensions. Au-dessus, l'arbre mort donne la taille des vivants. De ceux qui l'entourent. Epave rouillé debout parmi les siens."

    Rares sont les livres, et ils sont nombreux, dans lesquels Joel Bastard ne glisse un mot de son enfance sur l'île. Il est peut-être l'oublié du dernier recueil de textes sur l'enfance paru il y a peu. Je ne suis pas loin de croire, comme Mlle Caminade que Gallimard fait peur à nos brillantiissimes universitaires bien campés dans leur pré circulaire!

    Ce que j'aime dans ces poèmes en prose c'est le sentiment de marcher et de découvrir en même temps que l'auteur ce qu'il reste de beauté en ce monde, même si parfois il faut user des artifices de la mémoire.
    Seule la vraie poésie sait dire cela.

    Malko Nimu

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  2. @ Malko Nimu

    Détrompez-vous, FXR n'a rien d'obéissant ! Il n'en fait qu'à sa tête et s'arrange toujours pour noyer le poisson . Sa ronflante introduction ne me leurre pas et je n'aime pas qu'il me mette ainsi en avant pour mieux s'esquiver...
    Et merci pour cet extrait qui m'incite à commander le livre ( ce qui était déjà dans mes projets ...)

    @ FXR

    François, je t'ai posé une double question à laquelle tu te gardes bien de répondre :
    « Si tu l'as regardé et que tu n'as pas été accroché, pourquoi ne pas émettre une critique négative, toi qui les appelles sans cesse de tes voeux ? Sinon, où est passée ta curiosité ? »
    Alors, T'AIMES OU T'AIMES PAS ?
    ( je n'ose envisager la possibilité que tu aies perdu mon livre !)

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  3. Non, bien sûr, Emmanuelle, je n'ai pas perdu "ton" livre (qui est aussi celui de Monsieur Bastard et, en ce moment, le "mien"...).
    Bon, j'arrête de plaisanter, il ne faut pas que cela dure trop longtemps...

    "Casaluna", je le feuillette depuis que tu me l'as passé. Je ne l'ai pas encore lu (d'une lecture qui irait de la première à la dernière page). Je n'ai fait que picorer quelques poèmes par-ci par-là.
    Je dois l'avouer : je n'ai pas encore trouvé la force d'être à la hauteur de ce livre, qui réclame temps et attention (pour moi).
    Mais cela va venir !
    Le peu que j'en ai lu a provoqué en moi deux émotions : un grand plaisir ; une certaine déception. Je ne saurais encore dire trop pourquoi, mais je pense maintenant que la raison principale est ma défaut d'attention.
    Il me semble que ce genre d'ouvrage poétique (comme le "Genitori" de Stefanu Cesari, que j'ai lu, et dont je garde - finalement, après plusieurs lectures, et j'en parlerai un de ces jours, sûrement - un excellent souvenir, et l'envie d'y revenir, après un temps d'attente), ce genre d'ouvrage poétique réclame une participation exceptionnelle de la part du lecteur, pour pouvoir donner toute sa mesure, pour pouvoir déployer toutes ses constellations dans l'esprit et le coeur du lecteur.
    Donc : oui, a priori, j'adore tout ouvrage du genre de "Casaluna" (et donc j'adore "Casaluna"), et oui, a posteriori, j'aime beaucoup ce livre, et oui, lorsque j'aurai fait l'effort d'accéder au rythme profond du livre, j'adulerai cet ouvrage (j'en suis sûr, mais est-ce que ce sera bien le cas ?)...

    Pour ne pas conclure, cette discussion trouve un écho sur Facebook, avec Yves Thomas et un billet d'Angèle Paoli sur Terres de femmes :

    - http://www.facebook.com/profile.php?id=731168989&v=wall&story_fbid=137429349606206

    Merci encore Emmanuelle !

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  4. @ François

    C'est vrai que je m'approprie les livres d'une manière éhontée !
    Si parfois je peux consentir un petit effort pour rentrer dans une fiction ( ce qui fut le cas pour Manière du même Joël Bastard ) , je ne le conçois guère pour la poésie. Car c'est un langage à part qui fait saisir immédiatement et globalement sans qu'il soit besoin , ni même possible, de tout expliciter.
    « La participation exceptionnelle du lecteur », c'est pour moi le critère-même de la rencontre littéraire , je ne suis pas sûre que cela puisse s'obtenir par l'attention ou l'effort. Se renforcer, sans doute, mais pas s'initier.

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  5. Je comprends FXR, il faut être disponible pour une rencontre avec un livre, de même qu'avec une personne. Parfois on reste à la porte du livre et puis un jour (ou pas) on y entre, on en épouse le rythme, on entre en harmonie. Je ne sais pas si c'est une question d'attention, mais c'est peut-être tout simplement le moment, parce qu'on est dans le bon état d'esprit.
    En tout cas, cela vaut le coup d'essayer pour Joël Bastard. J'ai vraiment aimé les textes que j'ai pu lire, d'abord sur le site d'Angèle Paoli, bien précieux, ensuite dans le projet "Nu(e)". C'est comme une méditation, toujours en mouvement... N'oubliez pas que le numéro 44 de la revue "NU(e)", coordonné par Jean-François Agostini, publie les textes de 15 poètes corses, dont Joël Bastard.

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