Encore une fois, sur ce navire...
Je vais me répéter, je sais, mais le projet que porte ce blog est d'une importance capitale (au moins à mes yeux, ce qui n'est déjà pas si mal dans le monde d'incertitudes et de doutes qui est le nôtre en ce moment !).
Il s'agit de ne pas avoir peur (et de croire un tant soit peu à l'intérêt) de raconter ses lectures réelles (d'ouvrages de littérature corse). Bien évidemment, les lectures de textes que l'on a aimé, que l'on aime toujours, que l'on relit, qu'on aimerait engager bien d'autres à lire et relire sont privilégiées, mais on ne s'interdit surtout pas de manifester des appréciations moins positives, neutres, indifférentes et même très négatives. De même, vous pouvez vous contenter de proposer une citation, plus ou moins longue, et guère présentée ou commentée, comme je vais le faire ici. Bref, j'arrête là le laïus.
J'ai donc attendu trois mois et le 61ème billet pour dévoiler le texte caché. Celui auquel on a accès uniquement parce qu'on manifeste une attention de chaque instant, comme le "morceau caché" de certains CD de musique qu'il faut écouter jusqu'au bout, après plusieurs minutes de silence.
Jouons un peu : nous allons faire comme si les 60 premiers billets de ce blog, et tous leurs commentaires (gratitude infinie), et toutes ces pages hypertextes qui se cachent dans les mots à cliquer, comme si tout cet ensemble de mots, d'images, de sons ne pouvait enfin prendre son sens qu'avec le 61ème billet, avec le texte caché dans ce billet, enfin révélé. Comme si ce texte en fait n'avait pas cessé d'être présent, comme un fantôme numérique, absolument silencieux, invisible, derrière chaque page à dérouler.
Je ne veux rien en dire d'autre ici, ni le nom de son auteur (le premier qui trouve gagnera le droit d'avoir son nom en titre d'un prochain billet sur ce blog), ni la date et les circonstances de sa publication ; plus tard (j'ai trop d'affection et d'admiration pour ce texte, mais j'accepte tout à fait que vous ne soyez pas d'accord avec moi, n'hésitons pas à préciser nos pensées sur ce sujet de la plus haute importance !).
Le voici (et je lève "la toile" - comme Baudelaire à la fin du "Rêve d'un Curieux", dédié au photographe Nadar..., et je ne mets pas de lien direct vers le poème, imaginez-le quelque peu ou souvenez-vous en avant d'y faire retour...) :
RÉSEAUX, BRUMES, MIROIRS
J'écris ceci dans la somnolence du jour.
Analogue à celle où naguère les saluts aux marins restés à terre résonnaient le long des côtes du Cap.
Silencieuses - mais d'où jaillissaient des lumières, comme si elles étaient pierres à briquet.
Ce n'est pourtant pas un départ que j'évoque, c'est une arrivée.
Et non le soir, mais le matin.
Un matin d'octobre, il y a presque un quart de siècle.
Octobre est mois de naissance pour moi.
Et de retour.
Je retournais alors où je n'étais jamais allé.
Sur le pont du Sampiero Corso, je regardais la ville où j'allais débarquer pour la première fois.
Dans une brume légère, elle se dressait, pâle, grise, fantôme de pierres réelles, serrée entre une paroi de montagnes désertes, à peine emmaquisées, et la mer, la mer comme un acier liquide, miroir vide du ciel.
Debout, sans épaisseur, la ville semblait elle-même miroir de je ne sais quoi.
Sans doute d'une autre ville, jamais vue, enfouie au plus profond de ma mémoire.
De ce rêve sans bruit d'un qui dort les yeux ouverts au soleil levant, je crus que je ne sortirais pas.
Je n'en suis pas sorti, en effet.
J'ai seulement traversé le miroir de la ville et celui de la mer, pour cheminer dans des labyrinthes infinis, comme ceux des champs de foire et des cosmogonies mythiques.
Labyrinthes, rêves, mythes, réseaux, filets, chemins, c'est tout cela - qui est la même chose - que l'Île m'apprendra peu à peu, l'île des rêves et des amitiés, amitiés jusqu'au-delà des ruisseaux calomniés.
Elle m'apprendra aussi la traversée des brumes et des miroirs.
Sous la mer, pas très loin de la surface, lacés et délacés par les courants de lumière, les noirs filets glissent, se balancent.
Solitaires, mais non oubliés, les chemins aussi : derrière la ville, le tissu large et obscur des chemins.
J'ai appris de l'Île ce qu'est un chemin, et pourquoi, là où ils se croisent, les morts les gardent.
Ou les pierres, qui sont le nom des morts glorieux.
Grâce aux pierres, les âmes montent au ciel et suivent la route de lucioles et d'asphodèles allumés qui s'élancent la nuit vers les lieux saints, comme un pont jeté entre ce monde et l'autre.
Aux croisements des routes du ciel, les âmes sont des étoiles, noeuds du même filet qui couvre la terre, du même réseau.
Constellation des tombeaux ?
Ce matin d'octobre, j'étais à un bout du réseau qui couvre la terre et qui n'est pas seulement celui des chemins, mais celui des hommes, et pas seulement des hommes morts, mais des hommes vivants.
J'étais à un bout du réseau et déjà le filet venait de moi, alors que je n'avais pas encore quitté le navire et que le quai s'avançait lentement.
Déjà des hommes vivants se tendaient les mains.
Pays des morts, pays des vivants.
Le pays des rêves se tisse entre les deux, et fait ce que l'on appelle une culture.
On y chemine dans le même réseau, le même filet, la même toile d'araignée, la même tarentèle.
Un rêve est comme cette toile, cette "arantèle", comme on a dit naguère en France, fait non d'un chemin unique, mais de noeuds de chemins, de voies croisées et amarrées les unes aux autres.
Un rêve est un territoire ainsi constellé.
L'araignée rêve, et d'un nuage de lait fait un territoire, qui est aussi sa demeure, qui est elle-même.
L'araignée de la culture est prise dans sa propre toile.
Elle est elle-même son filet, sa toile ; elle est la tarantèle.
Il suffit de délover le filet pour que des clartés moucheronnes sortent de l'ombre.
Mais il est beaucoup plus difficile de défaire les noeuds.
Comme de les faire.
Deligny l'a dit : entrelacer n'est pas nouer.
L'araignée, à vrai dire, ne noue pas.
L'homme noue parce qu'il a trois mains, dit Deligny : les deux siennes et la main de l'autre.
Ainsi le filet se noue.
Ou le réseau.
Y compris le réseau ferroviaire, qui a, lui aussi, ses noeuds.
C'est pour son chemin de fer que la Corse s'éveillait alors, en ce mois de naissance, en ce mois où je fis retour là où je n'étais jamais allé.
Elle se réveillait pour défendre sa trame, son chemin de coeur, le chemin de Corti, celui de sa renaissance, après laquelle elle peine encore aujourd'hui, par le refus, qu'elle subit toujours, d'être reconnue.
Renaître, renaître de la rumeur des vagues, des embruns et des brouillards où gémissent les lacrymants, les agramanti, les ombres mal nées, mal mortes, qui se repentent au déclin des monts, au bord des ruisseaux.
Les hommes ne peuvent naître, mais seulement renaître, et ainsi connaître, dans le réseau, dans le filet jeté au fond du miroir, jeté au fond des eaux, délové puis lové sans cesse, sans cesse ravaudé.
Comme les chemins, comme les courants, comme les rêves et les rivières.
Pour obéir aux constellations et à l'épacte.
En ce matin d'octobre, j'obéissais déjà aux constellations qui s'effaçaient au-dessus de la Serra di Pignu.
La ville et la mer délivraient leurs hiéroglyphes, ravaudant derrière la brume et les miroirs les mêmes filets, les mêmes réseaux, le même sens derrière la même image, grise et brillante comme la mémoire.
Est-il possible que tout ait déjà été dans cette figure de ville, haute, raide, perçant soudain les incertitudes de l'aube, face à la mer qui ployait sa rumeur sous le petit jour froid, mais si lumineux ?
Dans le corbillon du plus ancien souvenir, est-ce que je ne mets pas, indûment, tout le trésor des années qui suivirent ?
Ne trouvais-je pas de reliques que celles que j'y apporte, de douces amandes du paradis terrestre, comme celles que s'appropria jadis sainte Catherine de Siscu ?
En fait, à la description de l'image matricielle, ne manquera même pas le "colophon du doute" pour en attester la vérité sous le mensonge.
Ce blog est destiné à accueillir des points de vue (les vôtres, les miens) concernant les oeuvres corses et particulièrement la littérature corse (écrite en latin, italien, corse, français, etc.). Vous pouvez signifier des admirations aussi bien que des détestations (toujours courtoisement). Ecrivez-moi : f.renucci@free.fr Pour plus de précisions : voir l'article "Take 1" du 24 janvier 2009 !
Max Caisson.
RépondreSupprimerLa question s'est maintenant démultipliée :
RépondreSupprimer1. "Max Caisson" est-il la bonne réponse ? Si oui, pouvez-vous donner des informations sur les circonstances de publication de ce texte ?
2. Quel est le nom d'"Anonyme" ? (Question amusante : "Anonyme" s'appelle-t-il "Max Caisson" ?) Comment est-il arrivé à la conviction que ce texte est de "Max Caisson" ?
3. Qui est "Max Caisson" ?
4. Qui a lu des textes de "Max Caisson" ? (Cette question ne contient pas la réponse à la question 1.) Que pensez-vous de ses textes ? Pouvez-vous citer les passages qui vous ont marqués, plus, intéressés ?
En bref, vous l'avez compris, chez Anonyme, je vous remercie pour cette proposition de réponse ; attendons de voir si d'autres propositions nous parviennent...
Au plaisir de vous voir répondre à certaines des questions ci-dessus... Non ?
Moi je peux dire qui est Max Caisson, puisque c'était mon prof à Aix pour une des deux seules UV que j'aie jamais obtenu en première année de DEUG d'Histoire (les UV en question c'était Corse et Italien, Caisson s'occupait du Corse, et il m'a quand même mis 19. Je m'en vante d'autant plus facilement que pour toutes les autres matières ce fut Iwo Jima...).
RépondreSupprimerBon je sais, je réponds pas à toutes les questions, et je ne dis pas quel passage m'a plus plus qu'un autre etc.
Je vais quand même me risquer à répondre à la question 2 : Anonyme c'est FXR, non ?
Ghjuvan Filici
(Sinon j'ai trouvé Septième Ciel de Thiers et je suis en train de le lire. J'en dirai un mot ici et ailleurs.)
Ghjuvan Felici,
RépondreSupprimervous ne répondez pas à toutes les questions, c'est vrai, mais la réponse est déjà très intéressante. Pour vous, Iwo Jima est une défaite... Est-ce parce qu'il y a la photo d'une corso-japonaise dans la rubrique "Abonnés fidèles" ?
Je plaisante, après tout, Ponte Novu est aussi et très logiquement une victoire !
Question 2 : Non, Anonyme n'est pas moi ! Qui me disait, à Bastia, que les rédacteurs de Kyrn avaient tous un voire plusieurs pseudonymes et envoyaient à leur propre magazine des articles incendiaires auxquels ils répondaient bien sûr, entretenant ainsi la vie et les débats ! Cela peut paraître triste, mais c'est aussi un moyen amusant de révéler qu'on n'est jamais d'accord avec personne et encore moins avec soi-même ! (D'ailleurs, si les anciens rédacteurs de Kyrn lisent ces mots, il serait utile et réjouissant qu'ils révèlent - il y a prescription maintenant - la liste secrète de leurs pseudonymes...)
Donc, maintenant, j'attends avec grand intérêt les résultats de votre lecture de "Septième ciel" !
Et pourquoi pas Jaques Thiers ?...
RépondreSupprimerJe n'ai pas assez de références, mais...
This is my guess !
Des bises, David
David,
RépondreSupprimertu n'as peut-être pas assez de références, comme tu dis, mais la proposition est intéressante. Cependant, certains éléments ne collent pas : il est question d'un "retour" vers la Corse où l'auteur n'était jamais allé ; or Thiers est né à Bastia...
A bientôt.
Pancrazi ?
RépondreSupprimerGF
Iwo Jima une défaite ? De manière inconsciente je dois considérer les grandes batailles de l'humanité du côté des vaincus.
RépondreSupprimerMais je suis en revanche capable de défendre le point de vue que Ponte Novu était bien une victoire, dans le sens où Paoli avait besoin d'un engagement fort et symbolique contre les armées françaises afin de s'attirer la sympathie des puissances européennes, et de préparer un exil inéluctable à Londres.
Et puis Ponte Novu c'était en fait une escarmouche. On a écrit plus d'encre qu'il n'y a coulé de sang. Bon, je détruis peut-être un mythe (preuve que l'on peut considérer ce combat comme une victoire, et raison qui fait qu'on en parle encore...) mais j'ai le droit, moi. J'y étais !
Ghjuvan Filici
Ghjuvan Felici,
RépondreSupprimer- non ce n'est pas Jean-Noël Pancrazi.
Il y aurait d'ailleurs matière à billet : j'ai lu "L'heure des adieux" qui imagine une Corse indépendante (vision très pessimiste), et puis sa suite autobiographique, "Madame Arnoul", "Long séjour" et le texte qui se trouve dans le volume accompagné des photos de Depardon et intitulé "Corse" ; j'ai lu aussi "Les quartiers d'hiver" (beaucoup aimé, particulièrement les dernières pages, mais c'est un vieux souvenir). Je l'ai croisé par deux fois, à Ajaccio, à La Marge, pour une signature et à Aix, il faisait une conférence.
Encore un écrivain corse né en Algérie (vingt ans avant Marcu Biancarelli). Et qui s'intéresse maintenant à une autre île, Haïti (mais je n'ai pas lu ses derniers livres, il faudrait, il faudrait).
- concernant Ponte Novu, il y a pas mal de textes qui mettent en scène la fameuse "escarmouche" : chez Biancarelli (dans le recueil "San Ghjuvanni in Patmos", je crois), chez Thiers (la petite pièce que je trouve très drôle, "Tutti in Ponte Novu"), une nouvelle de Jean-Pierre Graziani, "Soleil noir", beaucoup plus (trop ?) sérieuse dans le recueil "La vie au bout". Mais il doit y en avoir bien d'autres ; cela peut être une étude très intéressante de voir comment cet "événement" a été traité (par les ouvrages historiques, par les ouvrages fictionnels) depuis qu'il a eu lieu jusqu'à aujourd'hui, l'évolution de son traitement (quantitatif et qualitatif).
- concernant les "victoires" et les "défaites", je me souviens d'une affiche célébrant "A vittoria di u Borgu, ottobre 1768". Victoire évoquée par Salvatore Viale dans sa "Dionomachia" (chant 3 je crois ; mais les paroissiens se servent des tableaux qui évoquent cette victoire pour se donner du courage avant de... se venger de ceux du village d'en face ! Ce qui nous conduit d'une certaine façon à Malcolm Lowry et au billet de de ce jour (26 avril 2009).
- et puis aussi à la préface de Marco Cini au "Vir Nemoris", intitulée "La faible voix des vaincus". Mais comment désespérer quand on voit qu'un tel texte - oeuvre géniale, non ? voir les billets du 26 janvier et du 22 mars 2009 - trouve tout de même sa pleine existence en 2009, presque 240 ans après "l'escarmouche" qui en a été la source et la cause !... De l'utilité littéraire des "escarmouches"...
(Je mets les années dans les dates, on ne sait jamais, ce blog pourrait continuer d'exister en 2010 !...)
Et puis voilà.
Un "ritornu" induve ùn s'hè mai andatu, l'evucazione di l'anni 59 o 60 (u battellu "Sampiero Corso", a difesa di u trenu...)
RépondreSupprimerPerchè micca Philippe Franchini u corso-vietnamianu (per avà assente di u vostru listinu) cuntendu a so scuperta di l'isula di u babbu (in "Continental Saigon" o in "Tarra corsa"?)
Ma dubbiteghju quantunque, ùn m'arricordu di un testu simule.
Hè veru chì ùn aghju mai lettu Philippe Franchini. Bravu per a pruposta è u sforzu per capisce l'annata (1960) di issu "ritornu". Scrittu "presque un quart de siècle" après, issu testu hè statu publicatu in 1984...
RépondreSupprimerMa ùn hè micca Franchini u so autore.
U Vietnam... aghju da ritruvà u libru di Michael Herr, giurnalistu di guerra americanu, "Dispatches" ; era in Saïgon, è parla di i Corsi.
u suspensu hà duratu abbastanza avà : aiò! quale ghjè chì hà scrittu 'ssu testu o FXR??
RépondreSupprimerC'est Max Caisson.Bis.
RépondreSupprimerEh, oui c'est Max Caisson, je dois le confirmer sous la pression amicale des visiteurs de ce blog. Mais nous ne savons toujours pas qui est l'"anonyme" si bien informé !
RépondreSupprimerJe n'ai pas eu le temps de prendre contact avec Monsieur Caisson pour lui demander de répondre lui-même ! Je vais tout de même l'appeler ; il m'avait parlé, voici quelques années, d'une version corrigée de ce texte, publié en 1984, aux éditions du Quai et Jeanne Laffitte (Marseille), dans un recueil collectif intitulé "Créativité et folie. La Corse, une affaire de famille", sous la direction de Sébastien Giudicelli. Evidemment introuvable aujourd'hui.
Donc, pour finir, une question à "Anonyme" : comment avez-vous connu ce texte ? vous plait-il ? Bis.
Ce texte, c'est toi qui m'en a parlé, et c'est ici que je l'ai lu. Il est en effet très beau. Sans être exhaustif (je l'ai été dans un premier billet hélas effacé) voici quelques images fortes : " Renaître(...)au bord des ruisseaux.", "Au croisement des routes du ciel (...) Constellation de tombeaux." La pénultième strophe est magnifique. A relecture, celle d'avant aussi. J'aime moins l'"araignée de la culture" et ce qui annonce les amitiés futures (tout comme je n'aime pas le côté romantico-ringard de l'Ecossais couperosé qui partage ses chants avec les virils autochtones.) Mais par dessus-tout, ce qui me plait, c'est que nous n'avons pas abordé ; c'est que nous sommes dans l'espace temps du rêve ou de la poésie et que, vingt-cinq ans après son arrivée, il n'évoque le pays que par cette frange marine et céleste -, celle de son réseau et de ses brumes -, comme l'écho d'une présence. Voilà. Une utopie au sens premier du terme, à savoir, l'approche d'un non lieu, parce que c'est "son île" qu'il décrit avant tout. La célébration du port ou de la ville dans ses couleurs, bref l'arrivée ordinaire, aussi bien rendue fût-elle ne m'aurait pas fait le même effet.
RépondreSupprimerA.M
A A.M,
RépondreSupprimer- dommage pour le billet exhaustif effacé... (ce qui veut bien dire que l'exhaustivité n'est pas de ce monde)
- merci pour ces précisions concernant ta lecture du texte de Max Caisson (c'était donc toi qui avait trouvé la bonne réponse...)
- tu évoques l'extrait du "Journal" de Boswell cité dans un précédent billet ; tu dis ne pas aimer "le côté romantico-ringard de l'Ecossais couperosé qui partage ses chants avec les virils autochtones"... Ok, j'ai plutôt lu ce passage comme un cliché de propagande (le pendant positif du cliché du sauvage archaïque). Maintenant mon penchant pour l'expérience de Boswell prête sûrement le flanc à ta critique : j'aime effectivement voir dans ce texte une certaine image d'adhésion à la vie, c'est certainement un peu naïf (c'est pourquoi je ne veux pas en faire un absolu et que c'est le jeu entre ce genre d'images et des textes plus incisifs, cruels, ou travaillant les marges, les incertitudes qui m'attire vraiment). Mais enfin je trouve aussi amusant que l'Ecossais joue l'hymne de la marine anglaise et que cela transporte d'aise des Corses qui auraient tout aussi bien pu détester un maître anglais...
- et donc je comprends mieux que le souvenir de cette arrivée, le récit de ce presque abordage, la description de cette marge soient ce que tu préfères dans le texte de Caisson : ce besoin très fort - pour beaucoup d'entre nous - de ne pas avoir à faire allégeance à un mode unique de relation à la Corse, relation qui serait forcément un amour irrationnel et inconditionnel pour la "pauvre petite Corse" (comme dit le Consul chez Lowry), i.d. a Cursichella. Le besoin d'un "non-lieu" au sein même de ce qui veut toujours apparaître comme le Lieu par excellence. Je le ressens aussi.