Brusque envie ce matin, encore une fois, de replonger dans la bibliothèque corse (ensemble de livres) pour la transformer en littérature (ensemble des lectures réelles)...
Dans la chambre à l'étage, des livres corses sur une étagère, et beaucoup d'autres dans un grand carton, où je fouille quelques instants, en en laissant certains de côté (pour plus tard, peut-être : "Justice en Corse" de Rogliano, "Le retour de Don Giovanni" de Jean-Pierre Orsi, "Le syndrome de Pénélope" de Sanguinetti), et m'arrêtant pour ce matin à ce choix : "La halte blanche" de Ghjacumu Thiers.
Je me souviens que ce recueil de poèmes a d'abord été publié en traduction française (ce qui ne me pose pas de problèmes particuliers, personnellement, mais je comprends que cela ait pu paraîre étrange ; encore que ce phénomène ne soit pas unique dans la production littéraire mondiale). Traduction par F.M. Durazzo de poèmes écrits en langue corse.
Je me souviens de l'auteur me disant à ce propos, sous forme de boutade : " j'ai d'abord publié la traduction française parce qu'elle est tout simplement meilleure que la version originale !"
Je feuillette le livre (que j'avais lu il y a déjà plusieurs mois), je feuillette et je m'arrête sur un poème (qui me plaît particulièrement ce matin, notamment pour son lien avec le titre du précédent billet sur ce blog qui évoquait les "départs"), puis je me remmémore que le thème de l'immobilisation et de la paralysie est prégnant dans les romans de Thiers, je lis le poème qui précède (page de gauche), je le choisis lui aussi, je feuillette encore et je me dis, bien, voici deux autres poèmes qui feraient bien le pendant des deux premiers, deux autres poèmes où sourient le soleil et ce qui pourraient peut-être ressembler à une façon d'échapper à la paralysie.
Je transcris ici les quatre poèmes, dans l'ordre de ma lecture. Et puis voilà (vous avez peut-être envie de parler de votre propre lecture de ce recueil ? ou de réagir à ce billet ? n'hésitez pas).
ULYSSE
Combien sommes-nous d'Ulysse
amputés des départs
restés sur le rivage !
Nous n'avons dans la main
qu'un vilain bout de corde
qui pendouille
où ricanent des rêves
grands comme des mondes perdus.
ETREINTES
Vous fûtes des Circé
d'occasion,
avec des parfums bon marché
et un peu écoeurants,
mais peu importe
car vous m'avez consolé
et m'avez fait accroire
que si j'avais voulu,
j'aurais pu m'embarquer,
comme autrefois,
et toucher l'horizon
de mes envoûtements.
LE BON AMI
Sans doute y a-t-il moyen
de laisser quelque place
pour le doute
l'incertitude
la paralysie du savoir.
Et alors, j'en suis sûr,
je sentirai sur ma nuque
la tape lisse du soleil
venu
à l'improviste,
le bon ami.
NAPLES
Un matin à Naples,
j'ouvre ma fenêtre :
le Vésuve est là,
vertical, silencieux,
sans la moindre fumée.
J'ouvre le robinet
l'eau coule,
la vie
va bien.
Ce blog est destiné à accueillir des points de vue (les vôtres, les miens) concernant les oeuvres corses et particulièrement la littérature corse (écrite en latin, italien, corse, français, etc.). Vous pouvez signifier des admirations aussi bien que des détestations (toujours courtoisement). Ecrivez-moi : f.renucci@free.fr Pour plus de précisions : voir l'article "Take 1" du 24 janvier 2009 !
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Pour ceux qui seront loin de chez eux en ce jour de Noël...
RépondreSupprimerLe départ!
Il y a en nous tous la peur du "grand départ",certains galvanisés par l'idée qu'il va arriver à grands pas s'offrent le luxe d'une vie périlleuse, riche et parfois brève. D'autre trop frileux se disent qu'ils seront mieux au coin du feu pour voir dans les flammes dansantes leur vie s'étirer doucement,ils mourront d'ennui sans avoir rien tenter pour y échapper.
Les départs forcés ou volontaires forgent, ouvrent aux autres et à soi-même, ce qui parfois est un grand voyage dans l'espace et dans le temps. Il faut partir pour mieux revenir.
Bon Noël à vous.
Moi j'aime cette image
RépondreSupprimer"la tape lisse du soleil
venu
à l'improviste,
le bon ami"
Quand l'intellect abandonne et que la "vie" nous rappelle qu'il y a de la douceur à se laisser surprendre...
"la vie
va bien"
quand on peut apprécier, insouciants pour un moment, la douce chaleur du soleil (ou d'un baiser?)sur la nuque, malgré tout le poids du monde et du quotidien...
Belle image pour Noël!!
Bon Natale à tutti!!
J'ai vraiment aimé ces quatre poèmes. Lus lisses. Haut hissent. D'un bon ami à un autre. Bise.
RépondreSupprimerMerci à tous pour ces échos et ces lectures.
RépondreSupprimerPartir, revenir, repartir... Oui.
En ce moment même, il pleut continûment une pluie fine sur le village, entouré par le nuage, et il semble perché ainsi dans un ciel de ouate, semblant ignorer le gouffre de la vallée qui se cache juste derrière... et nous prenons le bateau pour Toulon ce soir.
A bientôt pour se croiser à nouveau sur ces lieux numériques, ou bien d'autres encore !