mardi 2 juin 2009

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Dans le billet du 22 mars 2009 rendant compte du café littéraire du 30 janvier 2009 consacré au "Vir Nemoris" de Giuseppe Ottaviano Nobili-Savelli en présence de François-Michel Durazzo et Jean-Louis Charlet,

je signalais ceci :

Jean-Louis Charlet évoque les trois raisons qui l’ont fait s’intéresser à ce texte :
1. C’est une épopée politique dans laquelle l’auteur est personnellement engagé. Il choisit le latin parce qu’il veut toucher tout le monde, toute l’intelligentsia européenne et pas seulement l’Italie.
2. D’un point de vue technique d’écriture, une de ses étudiantes, Mademoiselle Gareddu-Delfini, travaillera sur les influences (Ovide, Virgile ?) dans l’écriture latine de Nobili-Savelli : le texte contient de beaux vers, l’auteur a le sens du vers latin. Il s’agira de placer l’auteur dans la tradition et l’histoire de l’hexamètre.
3. Certaines descriptions de paysage sont stupéfiantes. L’auteur a le sens de la nature (qui n’est pas un simple décor symbolique) : montagne, forêt, cascades, grottes. Un peu à la manière d’un auteur contemporain, Bernardin de Saint-Pierre décrivant les paysages exotiques de l’île de France (future île Maurice) en 1787.

Alors, ce soir, je meublerai ce blog avec une nouvelle citation (illustrant le point 3) de cet incroyable poème épique corse en latin inachevé de 1770-1771. Jean-Louis Charlet avait scandé ces vers devant l'assistance ravie : nous entendions la voix d'un Paoliste qui avait combattu à Ponte Novu... (je suis désolé - rapport au premier commentaire du billet précédent - il s'agit d'une lamentation ! mais je suis obligé de retenir ce passage, pour sa beauté - que je n'avais pas "remarquée" à la première lecture -, et du fait de son élection par un lecteur : ce qui est l'objet propre de ce blog, souvenez-vous en chers lecteurs !)

Version française (puis texte latin, vers 42 à 54 : écoutez le travail du poète dans les vers 48 à 50 dont les sonorités cherchent à faire entendre le bruit de l'eau - J.-L. Charlet insista sur ces sonorités) :

Ici, tout excite ma complainte et mes cris lamentables, tout porte au deuil. Ici, l'immense et sombre bois sacré aux vieux troncs, au bruit terrible et plein d'effroi, le silence nocturne et l'horreur de l'ombre, qui recouvre et enveloppe tout, célèbrent les âmes de nos morts qui hantent la nuit, selon un rite funèbre. Ici, l'eau précipitée du haut des rochers s'écoule en retentissant, car elle se brise dans un violent fracas, et elle jaillit haut, tout écumante, crépitant aux oreilles et gorgeant la terre d'humidité. Un vent glacial, calme et frémissant, annonce une inquiétante journée du haut de la montagne, l'humide Aurore dépose des gouttelettes de rosée, le rossignol pleure, l'herbe des cimes bruit, le funèbre hibou rappelle de tristes événements.

Hic querulas uoces et lamentabile carmen
cuncta cient tristemque inducunt omnia luctum.
Hic nemus umbriferum truncis immane uetustis,
horrisonumque fremens noctisque silentia et horror
umbrae claudentis circum lateque cubantis
funereo celebrant nocturna Lemuria ritu.
Rupibus hic acqua praecipitans delabitur, acri
fracta fragore strepens et spumans emicat alte,
auribus increpitans terramque uligine complens.
Frigidulum celso cliui de culmine flamen
lene fremens lucem infestam monet, humida rorat
lacrimulis Aurora comas, luscinia plorat,
mussitat herba iugi, Stygius fert tristia bubo.

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